AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X... a été engagé en 1992 par M. Y..., restaurateur, en qualité d'aide cuisinier à temps partiel ; que, le 24 mars 2000, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de l'entreprise ; que le mandataire-liquidateur n'a pas licencié le salarié mais que les relations de travail se sont poursuivies jusqu'au 12 mai 2000 ;
Sur le moyen unique du pourvoi formé par l'AGS :
Vu l'article L. 143-11-1, alinéa 2.2 , du Code du travail ;
Attendu que, selon ce texte, l'assurance des salariés contre le risque de non-paiement, en cas de procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, des sommes qui leur sont dues en exécution du contrat de travail couvre les créances résultant de la rupture des contrats de travail intervenant pendant la période d'observation, dans le mois suivant le jugement qui arrête le plan de redressement, dans les quinze jours suivant le jugement de liquidation et pendant le maintien provisoire de l'activité autorisé par le jugement de liquidation judiciaire ;
Attendu que pour décider que l'AGS doit garantir le paiement des sommes dues au salarié, à titre d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de licenciement, compensatrice de préavis, de congés payés y afférents et de non-respect de la procédure de licenciement, l'arrêt attaqué retient que l'entreprise n'a plus eu d'existence à compter du 24 mars 2000 ; que le salarié ne pouvait travailler pour une entreprise qui n'existait plus ; qu'il convient de fixer la date de rupture des contrats de travail à la date du prononcé de la liquidation judiciaire ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'ouverture de la liquidation judiciaire de l'employeur n'entraîne pas en soi la rupture des contrats de travail au sens de l'article L. 143-11-1, alinéa 2.2 , du Code du travail, la cour d'appel, qui a constaté que le contrat de travail n'avait pas été rompu par le liquidateur dans le délai de quinze jours du jugement de liquidation, en sorte que la garantie de l'AGS n'était pas due pour les indemnités de rupture allouées aux salariés, a violé ledit texte ;
Et sur le moyen unique du pourvoi formé par le mandataire-liquidateur :
Vu l'article L. 622-9 du Code de commerce ;
Attendu que la cour d'appel a fixé au passif de la liquidation judiciaire la créance du salarié résultant de la rupture du contrat de travail au jour de l'ouverture de la procédure collective tout en retenant que les relations de travail s'étaient poursuivies jusqu'au 12 mai 2000 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les actes juridiques accomplis par le débiteur en liquidation judiciaire sont frappés d'inopposabilité à la procédure collective et qu'elle avait constaté que l'employeur avait poursuivi la relation de travail, postérieurement à la liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la cour est en mesure de mettre fin partiellement au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 mars 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi du chef de la garantie de l'AGS ;
Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris pour qu'elle statue sur la créance du salarié ;
Dit que l'AGS ne garantit pas la créance du salarié fixée au passif de la liquidation judiciaire de M. Y... ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille cinq.