AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
26 / M. Matias XA..., demeurant ...,
27 / M. Michel XB..., demeurant ...,
28 / M. Michel XD..., demeurant ...,
29 / Mme Anne-Marie XF..., demeurant ..., résidence Michelet, appartement 18, Saint-Dizier,
30 / M. Marcel XG..., demeurant ...,
31 / M. Bernard XH..., demeurant ...,
32 / M. Denis XJ..., demeurant ...,
33 / M. Michel XK..., demeurant ...,
34 / M. Jacques XM..., demeurant ...,
35 / M. Bernard XN..., demeurant ...,
36 / M. Claude XO...,
37 / Mme Raymonde XO...,
demeurant ensemble ...,
38 / M. Jack Y..., demeurant ...,
39 / M. Gilbert XI..., demeurant ...,
40 / M. André E..., demeurant ...,
41 / M. Jean-Grégoire O..., demeurant ...,
42 / M. Claude P..., demeurant ...,
43 / M. Jean R..., demeurant ... Saint-Dizier,
44 / M. Jean XC..., demeurant 52220 Puellemontier,
45 / M. François XE..., demeurant ...,
46 / M. Claude XL..., demeurant ...,
en cassation du même arrêt rendu le 8 avril 2004 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale) au profit de la société CNH France, venant aux droits de la société CASE France, société anonyme, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
Vu leur connexité, joint les pourvois n° Q 04-44.626 à Y 04-44.634, A 04-44.636 à P 04-44.648, R 04-44.650 à Z 04-44.658 et B 04-44.660 à S 04-44.674 ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 2044 du Code civil, ensemble les articles L. 132-4 et L. 321-4-1 du Code du travail et l'article 10 de l'accord collectif du 2 juin 1999 ;
Attendu qu'envisageant de réorganiser son établissement de Saint-Dizier, la société Case France, aux droits de laquelle vient la société CNH France, a informé et consulté le comité central d'entreprise et le comité d'établissement sur ce projet et sur le plan social qu'elle avait établi ; qu'au cours de la procédure de consultation, un accord a été conclu le 2 juin 1999 entre l'employeur et cinq syndicats, qui comportait des dispositions destinées à améliorer le plan social et dont la mise en oeuvre était fonction de l'âge des salariés ; qu'il était notamment prévu dans cet accord que les salariés remplissant des conditions d'âge et licenciés pour motif économique percevraient une "indemnité transactionnelle globale, forfaitaire et définitive" correspondant à 65 % du salaire brut dû jusqu'à l'acquisition des droits à la retraite ; qu'après avoir été licenciés pour motif économique, des salariés ont conclu avec l'employeur un "protocole transactionnel" par lequel ils déclaraient renoncer à contester leur licenciement, en contrepartie du paiement de l'indemnité prévue dans l'accord du 2 juin 1999 ; qu'ils ont ensuite saisi le juge prud'homal de demandes en annulation de la transaction et en paiement de dommages-intérêts, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que, pour les déclarer irrecevables en leurs demandes, la cour d'appel a retenu qu'en reconnaissant à l'indemnité mise à la charge de l'employeur la nature juridique d'une indemnité "transactionnelle", les parties à l'accord du 2 juin 1999 ont nécessairement convenu d'en subordonner l'attribution à la conclusion par l'employeur et chaque salarié licencié d'une transaction emportant obligation de payer cette indemnité en contrepartie de concessions consenties par le salarié ; que l'"indemnité forfaitaire, transactionnelle et définitive de rupture" convenue correspondait à "l'indemnité transactionnelle, globale forfaitaire et définitive" prévue par l'accord du 2 juin 1999 ; qu'en contrepartie de cette indemnité qui répare le préjudice non compensé par les indemnités de licenciement, les salariés se sont engagés à renoncer "expressément, de façon définitive et irrévocable, à contester judiciairement à la fois la procédure ainsi que la réalité et le sérieux du motif du licenciement prononcé à leur encontre, sans toutefois en admettre le bien fondé" ; que ces transactions emportaient renonciation des salariés à contester les conditions d'exécution de leur contrat ou celles de sa rupture et qu'étant revêtues de l'autorité de la chose jugée en dernier ressort entre les parties, elles font obstacle à l'examen par la juridiction prud'homale de la contestation tant du bien-fondé du licenciement économique que du quantum de l'indemnité transactionnelle, dont le versement a eu pour effet de régler définitivement les comptes entre les parties ;
Attendu, cependant, que la mise en oeuvre d'un accord collectif dont les salariés tiennent leurs droits ne peut être subordonnée à la conclusion de contrats individuels de transaction ;
Que la cour d'appel, qui a faussement interprété un accord collectif qui ne contenait pas cette condition, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 avril 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société CNH France, venant aux droits de la SA CASE France, aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille cinq.