AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 5 février 2002), que, par acte du 14 avril 1995, M. X..., exploitant un fonds de commerce de débit de boissons, a souscrit un contrat de fournitures exclusives auprès de la société Hencovin pour une durée de cinq ans et s'est engagé à transmettre cette obligation à son successeur ; que, par acte notarié du 30 septembre 1996, M. X... a cédé son fonds de commerce aux époux Y... sans mentionner dans l'acte le contrat de fournitures le liant à la société Hencovin ; que celle-ci a assigné M. X... en réparation de son préjudice ;
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de la société Hencovin, alors, selon le moyen :
1 / que M. X... faisait valoir dans ses conclusions récapitulatives d'appel déposées le 23 janvier 2001 que la société Hencovin avait eu connaissance de la cession de fonds de commerce entre M. X... et les époux Y... puisqu'elle avait informé par télécopie, le 30 septembre 1996, le notaire chargé de la rédaction de l'acte de cession de ce que les époux Y... s'étaient engagés, le 25 septembre 1996, pour sept ans avec elle-même et lui précisait que " cet accord est subordonné à ce que les époux Y... acquièrent l'établissement libre de fournitures de boissons de quelque nature que ce soit " et que, par ailleurs, la société Z... comme la société Hencovin était représentée par M. Z... ; qu'en décidant que le notaire rédacteur informait non pas la société Hencovin mais les Etablissements Z... domiciliés à une adresse différente de celle du siège social de la société Hencovin et qu'ainsi M. X... n'avait pas respecté les obligations de l'article 7 du contrat du 14 avril 1995, en dépit de ces écritures démontrant que la société Hencovin avait eu une parfaite connaissance de la cession, la cour d'appel, qui n'a pas répondu aux conclusions de M. X..., a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que M. X... faisait encore valoir, en s'appropriant les motifs du jugement entrepris, que la société Hencovin, en ne répondant pas aux questions du notaire, chargé de rédigé l'acte de cession, relative à la nature des contrats de fournitures, et en lui imposant, par une télécopie du 30 septembre 1996, de céder le fonds de commerce aux époux Y... libre de tout contrat de fournitures de boissons, le mettait dans l'impossibilité de transmettre le contrat de fournitures qui le liait à la société Hencovin à un successeur, ce qui lui était imposé par l'article 7 du contrat de bière du 14 avril 1995 ; qu'il en déduisait que la rupture du contrat de fournitures était imputable à la société Hencovin et qu'il ne pouvait être tenu d'en assumer les conséquences ; qu'en considérant que M. X... n'avait pas respecté les obligations de l'article 7 du contrat du 14 avril 1995, sans statuer sur le moyen tiré de ce que la rupture du contrat était imputable à la société Hencovin elle-même, la cour d'appel, qui n'a pas répondu aux conclusions dont elle était régulièrement saisie sur ce point, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
3 / que M. X... soutenait dans ses conclusions récapitulatives d'appel déposées le 1er février 2001 que la rupture du contrat de fournitures du 14 avril 1995 était imputable à la société Hencovin, ne lui ayant laissé aucune possibilité de transférer les clauses du contrat de bières auxquelles il avait été obligé ; qu'en se bornant à relever que M. X... n'avait pas respecté les obligations de l'article 7 du contrat de fournitures du 14 avril 1995, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la rupture de ce contrat n'était pas imputable à la société Hencovin, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du Code civil ;
4 / que la cour d'appel ne pouvait non plus infirmer le jugement entrepris sans répondre aux motifs de celui-ci dont la confirmation était demandée par M. X... et notamment à celui d'entre eux ayant retenu que la société Hencovin, en signant le 25 septembre 1996 une convention de fournitures avec les époux Y..., renonçait à exiger la poursuite du contrat qu'elle avait antérieurement signé avec M. X... du moment qu'elle connaissait l'existence du contrat qui la liait à celui-ci et exigeait simultanément la vente d'un fonds " libre de fournitures et de boissons " et a, partant, entaché sa décision d'un défaut de motif en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
5 / que l'article 7, alinéa 11, du contrat de fournitures du 14 avril 1995 prévoyait qu': " à l'expiration du présent contrat, l'entrepositaire aura la faculté de réclamer au revendeur sur les quantités prévues, non débitées, 20 % du prix auquel les produits ont été revendus au revendeur lors de la dernière livraison " ; qu'en appliquant l'article 7, alinéa 11, à la résiliation du contrat quand il ne concernait que l'expiration du contrat et en condamnant, sur ce fondement, M. X... au paiement de la somme de 20 010,49 euros, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir constaté que le contrat du 14 avril 1995 comportait pour M. X... une obligation de se fournir chez la société Hencovin pendant une durée de cinq ans et que cette obligation était transmissible à son successeur, l'arrêt relève que le compromis de cession du fonds de commerce de mars 1996 ne fait pas mention de l'existence du contrat de fournitures et que ladite obligation ne figure pas dans l'acte de cession du fonds de commerce du 30 septembre 1996 conclu entre M. X... et les époux Y... ; qu'il en déduit que M. X... n'a pas respecté son obligation envers la société Hencovin ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations d'où il résulte que la résiliation du contrat de fourniture est imputable à M. X..., la cour d'appel a effectué la recherche exposée à la troisième branche et n'était pas tenue de répondre aux conclusions invoquées aux première, deuxième et quatrième branches, inopérantes pour la solution du litige ;
Attendu, en second lieu, que M. X... est sans intérêt à critiquer l'arrêt qui a appliqué la clause du contrat prévoyant qu'à l'expiration de celui-ci, la société Hencovin avait la faculté de demander le paiement d'une somme correspondant à 20 % des quantités de fourniture prévues et non vendues, dès lors que la cour d'appel a constaté que le contrat stipulait la même pénalité en cas de violation par M. X... de son obligation de transmettre le contrat à son successeur ;
D'où il suit que la cour d'appel ayant légalement justifié sa décision, le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de M. X... et de la société Elidis boissons services qui vient aux droits de la société Hencovin ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille cinq.