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08/03/2005 | FRANCE | N°02-10619

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 08 mars 2005, 02-10619


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Rennes, 19 décembre 2000 et 20 novembre 2001), que, le 1er juillet 1987, M. X..., dirigeant la société Emeraude expertise (la société), a conclu avec celle-ci un contrat mettant à sa disposition un bureau moyennant un certain loyer ; que, par avenant du 1er octobre 1992, les mêmes parties se sont accordées pour que la société puisse disposer de deux bureaux dans d'autres locaux moyennant un nouveau loyer ; que l'

avenant stipulait également qu'un intérêt de 7 % pourrait être réclamé e...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Rennes, 19 décembre 2000 et 20 novembre 2001), que, le 1er juillet 1987, M. X..., dirigeant la société Emeraude expertise (la société), a conclu avec celle-ci un contrat mettant à sa disposition un bureau moyennant un certain loyer ; que, par avenant du 1er octobre 1992, les mêmes parties se sont accordées pour que la société puisse disposer de deux bureaux dans d'autres locaux moyennant un nouveau loyer ; que l'avenant stipulait également qu'un intérêt de 7 % pourrait être réclamé en cas de retard de paiement des sommes mises à la charge de la société ;

que M. Y..., actionnaire de la société, a sollicité l'annulation, pour méconnaissance des règles relatives aux conventions réglementées, de cet avenant ; qu'il a invoqué des détournements d'honoraires par M. X... au détriment de la société et demandé la nullité d'une convention conclue entre celui-ci et une autre société ainsi que la désignation d'un nouvel expert ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à voir annuler l'avenant du 1er octobre 1992 avec remboursement à la société des sommes perçues en application de cet avenant, alors, selon le moyen, que les conventions conclues par une société avec l'un de ses administrateurs sans autorisation du conseil d'administration doivent être annulées si elles ont eu des conséquences dommageables pour la société ; que tel est le cas lorsque les conventions en cause ont conduit la société à engager des dépenses ne correspondant pas à une gestion rationnelle de la société ; qu'en déduisant l'absence de préjudice de la seule constatation que le montant des loyers versés était proportionné à l'importance de la surface des locaux mis à disposition, quand il lui incombait seulement de rechercher si des locaux de cette contenance n'excédaient pas manifestement les besoins de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 225-42 du Code de commerce ;

Mais attendu que l'arrêt retient que M. Y... ne produit pas de document montrant que l'avenant causait un préjudice à la société, les termes comparés à ceux du contrat initial montrant seulement que cette société disposait désormais non plus d'un mais de deux bureaux dans un quartier réputé de Paris et de prestations nécessaires à l'exercice d'une activité professionnelle, ni ne démontre le caractère excessif des facturations de M. X... ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations et dès lors qu'il n'a pas été invoqué devant les premiers juges que l'augmentation de surface des locaux mis à la disposition de la société excédait les besoins de celle-ci, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a pu décider que l'avenant, bien que conclu sans l'autorisation du conseil d'administration, n'entraînait pas de conséquences dommageables pour la société ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. Y... fait encore le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :

1 / que l'avenant du 1er octobre 1992 stipulait que les loyers étaient payables mensuellement et prévoyait que tout retard serait sanctionné par un intérêt de retard de 7 % ; qu'en énonçant que cette cause conférait à la société Emeraude expertise la faculté de payer les loyers quand bon lui semblait et de moduler ses flux de trésorerie, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'avenant et violé l'article 1134 du Code civil ;

2 / qu'en déclarant conforme à l'intérêt d'une société locataire de locaux professionnels une clause exorbitante du droit commun imposée par son gérant et prévoyant le versement à celui-ci d'un intérêt forfaitaire, à titre de clause pénale, applicable à compter du premier jour de retard dans le paiement du loyer, la cour d'appel a violé l'article L. 225-42 du Code de commerce ;

Mais attendu que c'est sans dénaturation des termes clairs et précis de la clause de l'avenant augmentant d'un intérêt de 7 % le montant des loyers en cas de retard de paiement que la cour d'appel, dès lors qu'elle constatait l'absence de conséquences dommageables pour la société dans l'exécution de ses obligations vis à vis de M. X..., a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le troisième moyen :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant au prononcé d'une mesure d'expertise complémentaire destinée à évaluer les honoraires revenant à la société et perçus par M. X..., alors, selon le moyen :

1 / que se rend coupable d'un manquement à son obligation de loyauté et commet un abus de son mandat social le dirigeant d'une société d'expertise-comptable qui résilie les contrats conclus par sa société avec plusieurs de ses clients à l'effet de diriger ces derniers vers l'activité d'expertise qu'il exerce et développe en son nom propre ; qu'en se bornant à énoncer que ces résiliations n'avaient causé en l'espèce aucun préjudice à la société Emeraude expertise dès lors que le personnel affecté au traitement des anciens clients de la société Emeraude expertise avait été transféré à M. X... qui en avait assumé la charge financière, quand il lui appartenait seulement de rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée si ces résiliations et le mobile qui les avait inspirées ne caractérisaient pas un manquement grave de l'intéressé à l'obligation de loyauté à laquelle il était tenu dans l'exercice de son mandat social, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1134 du Code civil ;

2 / que les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction sauf au juge à tirer toute conséquence d'une abstention ou d'un refus ; qu'au cas d'espèce, les premiers juges avaient donné mission à l'expert Z... "d'examiner la comptabilité de M. X... pour les années 1988 à 1991 incluses", de "dire si M. X... a encaissé des honoraires en règlement de prestations effectuées par la société Emeraude expertise", d'en "déterminer le montant" et d'"expliquer les conditions dans lesquelles s'est fait cet encaissement", et ce afin de déterminer, le cas échéant, le manque à gagner pour la société Emeraude expertise et corrélativement, le préjudice subi par lui ; que la cour d'appel ayant relevé que l'expert avait indiqué que M. X... s'était délibérément abstenu de mettre à sa disposition sa comptabilité pour 1988 et avait omis toutes les factures d'honoraires pour les autres années concernées par la mission, elle ne pouvait, sans méconnaître les articles 11 et 275 du nouveau Code de procédure civile, mettre les conséquences de cette carence de M. X... et de l'expert à sa charge en le déboutant de l'intégralité de sa demande au motif que lui-même ne produisait pas la preuve des détournements allégués ;

3 / qu'en mettant à sa charge l'obligation de produire les pièces et documents de preuve de faits que l'expertise judiciaire ordonnée par le tribunal avait précisément pour objet de contraindre M. X... à communiquer, la cour d'appel a méconnu la chose jugée par ledit jugement en violation des articles 1351 du Code civil et 11 du nouveau Code de procédure civile ;

4 / qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil en mettant à sa charge une preuve impossible à rapporter autrement que par une expertise qui avait été judiciairement ordonnée à cet effet ;

Mais attendu que dès lors que les éléments de preuve mis aux débats n'établissaient pas les irrégularités comptables évoquées par M. Y..., c'est par une appréciation souveraine du sens et de la portée des documents versés par les parties que la cour d'appel, après avoir relevé que le défaut de remise par M. X... de certaines pièces comptables à l'expert était sans incidence sur la solution du litige, a, sans renverser la charge de la preuve, pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à M. X... la somme de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 02-10619
Date de la décision : 08/03/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes (1re Chambre civile A) 2000-12-19, 2001-11-20


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 08 mar. 2005, pourvoi n°02-10619


Composition du Tribunal
Président : Président : M. TRICOT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:02.10619
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