AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X... a été engagé le 5 février 1971 en qualité de principal clerc par M. Y..., notaire, auquel a succédé le 19 août 1983 la SCP Monetti-Maury puis en juin 1987 la SCP Z... et A..., aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la SCP Mantion-Wesling-Joassin ; que le 11 septembre 1987, M. X... a mis en demeure la SCP Maury-Mantion de lui régler des arriérés de salaires avant de présenter sa démission par lettre du 26 septembre 1987 en alléguant plusieurs griefs envers son employeur ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant au paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat ; que par arrêt rendu le 27 mars 2002 rectifié le 2 juillet 2002, la Chambre sociale a cassé l'arrêt rendu par la cour d'appel en ce qu'il avait rejeté les demandes du salarié ;
sur les trois moyens réunis du pourvoi principal de la SCP Mantion-Wesling-Joassin et le moyen unique du pourvoi incident des consorts Y... qui invoquent des griefs tirés d'une violation des articles R. 143-2, L. 212-1-1, L. 122-4, L. 122-14-3 du Code du travail, 1134 et 1315 du Code civil, 4, 455 et 624 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu que ces griefs ne tendent qu'à remettre en cause les appréciations de la cour d'appel, qui a caractérisé le caractère équivoque de la démission de M. X... et le bien-fondé des griefs qu'il formulait à l'encontre de son employeur, quant aux rappels de salaires et indemnités dues au salarié ; que ces moyens ne peuvent dès lors être accueillis ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de M. X... :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt (Montpellier, 17 mars 2003) d'avoir limité quant aux intérêts la condamnation de l'employeur à lui payer une somme à titre d'indemnité de licenciement et une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1 / que l'indemnité conventionnelle de licenciement résulte de l'application de la convention collective et constitue une créance que le juge ne fait que constater de sorte que les intérêts légaux courent de plein droit sur cette somme à compter de la convocation devant le bureau de conciliation ; qu'en refusant de fixer au 28 septembre 1987, date d'introduction de l'instance, la date du point de départ des intérêts légaux sur l'indemnité conventionnelle de licenciement accordée à M. X..., la cour d'appel a violé l'article 1153 du Code civil ;
2 / que l'article 1153-1 du Code civil permet au juge de fixer le point de départ des intérêts dus sur une indemnité à une date différente de celle de sa décision ; qu'en l'espèce M. X... demandait que les dommages-intérêts pour licenciement abusif portent intérêts au taux légal à compter de la date d'introduction de l'instance, à savoir à compter du 28 septembre 1987 ; qu'en condamnant l'employeur à verser la somme de 46 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans expliquer les raisons pour lesquelles ces sommes ne pouvaient emporter intérêts au taux légal à compter de la date retenue par le salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
3 /qu'aux termes de l'article 1154 du Code civil , les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale ; qu'en l'espèce, M. X... sollicitait l'application de cette disposition aux sommes qu'il réclamait à l'employeur à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement abusif ; qu'en condamnant l'employeur à verser au salarié ces diverses sommes, sans expliquer les raisons pour lesquelles il ne pouvait être fait droit à la demande d'anatocisme formée par le salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
Mais attendu que, sous couvert d'un manque de base légale et d'une violation de la loi, le moyen critique une omission de statuer sur un chef de demande ; que selon l'article 463 du nouveau Code de procédure civile, cette omission ne peut donner lieu qu'à un recours devant la juridiction qui s'est prononcée ; qu'elle ne saurait donc ouvrir la voie de la cassation ; que dès lors le moyen est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi principal ;
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi incident de M. X... ;
Condamne M. A... et la SCP Mantion-Wesling et Joassin aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la SCP Mantion-Wesling-Joassin à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des consorts Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille cinq.