AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par deux actes de 1993 et 1996, la banque Marzé, créancière de la société Lafarge et compagnie (la société Lafarge), a obtenu que des lingots d'or et un bon de caisse lui soient donnés en gage en garantie de cette créance ; que la société Lafarge a été mise en liquidation judiciaire le 17 septembre 1998 et M. X... désigné liquidateur ; que la créance de la banque Marzé a été admise au passif de la société débitrice à titre chirographaire ; que M. X..., ès qualités, a demandé la restitution des biens retenus par la banque Marzé ;
Sur le moyen unique pris pris en ses première et deuxième branches :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu que pour rejeter la demande du liquidateur, l'arrêt retient que la banque Marzé est le légitime rétenteur des biens affectés en gage par les dirigeants de la société Lafarge ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les actes en cause désignaient la société Lafarge comme étant l'autorité constituant le gage, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis ;
Et sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Vu les articles L. 621-104 et L. 622-21 du Code de commerce, ensemble l'article 2082 du Code civil ;
Attendu qu'un créancier, dont la créance a été admise à titre chirographaire au passif de son débiteur, ne peut invoquer le privilège garantissant cette créance ;
Attendu que pour rejeter la demande du liquidateur, l'arrêt retient qu'elle se heurte au droit de rétention de la banque Marzé ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la créance de la banque Marzé n'ayant été admise qu'à titre chirographaire, celle-ci ne pouvait faire état du droit de rétention, conséquence du gage, pour s'opposer à la demande de restitution des biens, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mars 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;
Condamne la banque Marzé aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la banque Marzé ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille cinq.