La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/01/2005 | FRANCE | N°03-15258

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 janvier 2005, 03-15258


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que les sociétés Sécafi Alpha et Sécafi Alpha conseils ont signé le 4 avril 1997 avec la Fédération nationale des personnels d'études, de conseils et de prévention CGT et le syndicat des bureaux d'études CFDT un accord de réduction du temps de travail pour leur cadres opérationnels ; que cet accord prévoyait une réduction du temps de travail de 10 %, une réduction corrélative des objectifs de ces cadres de 10 % et une augmentation de 18

% des effectifs ; qu'en contrepartie la prime d'ancienneté de l'entreprise incluse...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que les sociétés Sécafi Alpha et Sécafi Alpha conseils ont signé le 4 avril 1997 avec la Fédération nationale des personnels d'études, de conseils et de prévention CGT et le syndicat des bureaux d'études CFDT un accord de réduction du temps de travail pour leur cadres opérationnels ; que cet accord prévoyait une réduction du temps de travail de 10 %, une réduction corrélative des objectifs de ces cadres de 10 % et une augmentation de 18 % des effectifs ; qu'en contrepartie la prime d'ancienneté de l'entreprise incluse dans le salaire de base a été supprimée et remplacée par deux primes distinctes non comprises dans celui-ci, la prime d'ancienneté de la convention collective et une prime de fidélité permettant de maintenir le niveau de rémunération et destinée à disparaitre ; que le comité d'entreprise ayant constaté que 31 cadres visés par cet accord, gérés nationalement au niveau du groupe, avaient bénéficié d'une intégration de la nouvelle prime de fidélité dans leur salaire de base, ce dernier et les syndicats signataires ont saisi le tribunal de grande instance aux fins de faire respecter sous astreinte l'accord du 4 avril 1997 en demandant l'annulation des effets de cette mesure individuelle ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 26 mars 2003) d'avoir débouté les syndicats et le comité d'entreprise de leur demande alors selon le moyen :

1 / que les dispositions d'un accord collectif sont d'application impérative pour ses signataires, sauf dérogation plus favorable au salarié ; que le principe de faveur ne peut cependant jouer que lorsqu'il existe deux avantages concurrents ayant précisément le même objet et la même cause ; qu'en l'espèce, l'intégration de la prime de fidélité dans le salaire de base de certains salariés ne constituait pas un avantage comparable aux effets méconnus des dispositions de l'accord collectif préconisant une séparation de la prime de fidélité par rapport au salaire et une diminution graduelle de cette prime, en contrepartie d'une diminution de la durée du travail et d'embauches ;

qu'en considérant que la méconnaissance de l'accord collectif était justifiée par le caractère plus favorable de la mesure litigieuse pour les salariés concernés, la cour d'appel a violé les articles L. 132-3 et L. 135-2 du Code du travail ;

2 / que les juges du fond ont en tout état cause constaté que le niveau de base de la rémunération déterminait les objectifs de production ; qu'en considérant néanmoins que l'intégration de la prime au salaire de base en contrariété avec l'accord collectif, ayant nécessairement pour effet d'augmenter artificiellement la rémunération de base, ne se traduisait pas par une augmentation des objectifs des salariés concernés de nature à remettre en cause la réduction effective du temps de travail, pour décider à tord que cette mesure était plus favorable que les dispositions de la convention collective, la cour d'appel a violé les articles L. 132-3 et L. 135-2 du Code du travail ;

3 / qu'en outre, l'employeur ne peut s'affranchir de ses obligations découlant d'un accord collectif, fut-ce pour favoriser certains salariés, lorsque cela a pour effet de créer une situation défavorable au détriment des autres ; qu'en l'espèce, à considérer même que l'intégration de la prime au salarie de base de certains cadres opérationnels ait été considérée comme favorable à ces salariés, les juge du fond ont constaté que cette mesure avait pour effet de revaloriser la part d'intéressement de ces salariés au détriment de l'ensemble des autres salariés ; qu'en considérant néanmoins que la méconnaissance d le'accord collectif était justifiée, la cour d'appel a violé l'accord du 4 avril 1997, et les articles 135-2 et suivants Code du travail ;

4 / que dans l'accord collectif sur la réduction du temps de travail l'employeur s'était engagé à augmenter les embauches de 18 % pour accompagner cette réduction, qu'il ressortait pourtant des écritures de l'employeur que l'embauche n'avait augmenté que de 57 % tandis que l'activité avait augmenté de 42 % d'où il résultait que les embauches effectivement destinées à accompagner la réduction du temps de travail n'avaient au mieux augmenté que de 15 % ; qu'en considérant néanmoins, pour écarter tout manquement de l'employeur à ses obligations, qu'il n'y avait pas lieu de prendre en compte l'augmentation de l'activité dans l'évaluation des embauches effectivement liées à la diminution du temps de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'accord du 4 avril 1997 et des articles L. 135-2 et suivants du Code du travail ;

5 / que si l'employeur peut accorder ou supprimer des avantages particuliers à certains salariés c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique puissent en bénéficier ou se voient supprimer l'avantage ainsi accordés et que les règles déterminant l'octroi ou la suppression de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables ; qu'en l'espèce en écartant à tord toute discrimination, sans aucunement caractériser le fait que l'employeur ait préalablement défini les règles déterminant les salariés devant bénéficier de l'intégration de la prime à leur salaire de base, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 135-2 et suivants du Code du travail et du principe "à travail égal, salaire égal" ;

6 / qu'en outre, la cour d'appel a elle-même constaté, pour écarter à tord le caractère discriminatoire de la mesure litigieuse, que l'employeur se proposait de l'étendre à tout cadre opérationnel le souhaitant ; qu'il s'en évinçait que cette mesure ne reposait aucunement sur une différence objective de situation entre les salariés en bénéficiant déjà et ceux ayant, le cas échéant, vocation à en réclamer le bénéfice ;

qu'en rejetant cependant le caractère discriminatoire de la mesure au prétexte que les cadres en bénéficiant n'auraient pas été dans une situation identique aux autres, la cour a omis de tirer les conséquences légales de ses constatations et partant a violé l'accord du 4 avril 1997, les articles L. 135-2 et suivants du Code du travail et le principe "à travail égal, salaire égal" ;

7 / qu'il ressortait des constatations de la cour d'appel que l'intégration de la prime au salaire de base de certains salariés avait pour effet de favoriser ces salariés dans la répartition de l'intéressement au sein de l'entreprise, au détriment de l'ensemble des autres salariés ;

qu'elle a encore constaté que la mesure litigieuse était susceptible d'être étendue à l'ensemble des salariés concernés, ce qui serait revenu à priver d'effet l'accord collectif, sans respecter la procédure de révision ; qu'en considérant néanmoins que le comité d'entreprise n'avait pas à être consulté préalablement à la mise en oeuvre des mesures litigieuses, la cour d'appel a violé les articles L. 132-7 et suivants, L. 431-5 et L. 432-1 du Code du travail ;

Mais attendu que l'arrêt qui a constaté, d'une part, que les engagements de l'accord d'entreprise du 4 avril 1997 avaient été respectés, et, d'autre part qu'il s'agissait d'un avantage individuel consenti à une catégorie de cadres chargés de responsabilité particulière de gestion au niveau du groupe dont la situation n'était pas identique à celles des autres cadres opérationnels, a légalement justifié sa décision ;

que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Fédération nationale des personnels des sociétés d'études de conseil et de prévention CGT, le Syndicat des bureaux d'études CFDT et le comité d'entreprise du Groupe Alpha aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 03-15258
Date de la décision : 11/01/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (1e chambre civile, section S), 26 mars 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 jan. 2005, pourvoi n°03-15258


Composition du Tribunal
Président : Président : M. SARGOS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:03.15258
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award