AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, ordonne la jonction des instances n° N 01-15.471 et n° P 01-15.472s ;
Sur les moyens des deux pourvois, pris en leurs cinq branches, qui sont énoncés en termes identiques :
Attendu qu'à la suite d'un accident aérien survenu après un décollage de l'aéroport de Tambacoundé (Sénégal), la société Chasse et pêche, organisateur du voyage, et son assureur, la société Axa courtage, toutes deux assignées en responsabilité devant le tribunal de grande instance de Paris, ont appelé en garantie la compagnie Air Sénégal Sonatra, ses assureurs et réassureurs, ainsi que l'Agence pour la sécurité de la navigation en Afrique (ASECNA), agence internationale créée par la convention de Dakar du 25 octobre 1974 pour assurer la régularité et la sécurité aérienne dans les territoires des pays signataires ; que cette agence était aussi chargée de la sécurité de la navigation aérienne de cet aéroport par contrat du 7 décembre 1987 conclu avec l'Etat du Sénégal conformément aux dispositions de l'article 10 de cette convention ; que les arrêts attaqués (Paris, 6 juin 2001) ont dit l'ASECNA bien fondée à se prévaloir d'une immunité de juridiction ;
Attendu qu'il est fait d'abord grief aux arrêts d'avoir violé la convention de Dakar du 25 octobre 1974 et les principes gouvernant les immunités de juridiction des organisations internationales, alors que ni cette convention ni la coutume internationale ne confèrent à cette agence une immunité et qu'elle n'est pas une émanation de l'Etat du Sénégal, puis, d'avoir entaché sa décision d'un manque de base légale tant au regard de l'article 6 1 de la Convention européenne des droits de l'homme pour n'avoir pas recherché si l'immunité de juridiction ne se serait pas imposée au Sénégal, qu'au regard des principes sur les immunités de juridiction pour n'avoir pas, de même, recherché si la responsabilité de l'agence était engagée pour une mission de service public ou bien pour une activité de nature commerciale ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu, à bon droit, que l'immunité de juridiction invoquée par l'ASECNA n'était pas fondée sur son statut d'agence internationale en application de la convention de Dakar, mais sur les activités exercées, pour le compte de l'Etat sénégalais, en exécution du contrat du 7 décembre 1987, de sorte que les griefs des trois premières branches manquent en fait ; qu'ensuite, la cour d'appel n'avait pas à faire une recherche qui ne lui était pas demandée ; qu'enfin, ayant relevé que la responsabilité de l'agence était mise en cause pour les conditions de stockage des dépôts de carburants soumis à son contrôle et que, contrairement aux énonciations du premier juge qui ne s'était attaché qu'à l'activité commerciale confiée à l'ASECNA, cet organisme accomplissait, pour le compte de l'Etat sénégalais, une mission de service public ayant trait à la sécurité des transports aériens nationaux et à la maintenance des aéroports sous le contrôle administratif et financier du ministre de l'Aviation civile de cet Etat, la cour d'appel en a justement déduit que l'ASECNA, qui agissait en vertu d'une délégation de service public, devait bénéficier de l'immunité de juridiction, ce qui privait la juridiction française du pouvoir de juger à son égard ; que l'arrêt est ainsi légalement justifié ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne les sociétés Axa courtage IARD et Chasse et pêche voyage aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille quatre.