AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 1er octobre 2002), que la société Application des Gaz Le Favier (la société ADG), a donné congé pour le 30 juin 2001 à son bailleur commercial, la société Bellissima (la SARL) ; que par courrier du 14 juin 2001 elle a informé la SARL que, rencontrant des difficultés pour trouver de nouveaux locaux, elle demeurerait sur place en proposant de verser des indemnités d'occupation ; que la SARL a alors saisi le juge des référés d'un tribunal de grande instance, lequel, par ordonnance du 17 août 2001, après s'être déclaré compétent et avoir constaté que la société ADG était occupante sans droit ni titre, a autorisé la SARL à la faire expulser ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société ADG fait grief à l'arrêt d'avoir dit que le litige qui l'opposait à la SARL relevait de la compétence du juge des référés du tribunal de grande instance alors, selon le moyen que les litiges de droit commun entre deux sociétés commerçantes relèvent de la compétence du tribunal de commerce ; que le tribunal de grande instance n'est compétent que pour connaître des contestations relatives à l'application du décret du 30 septembre 1953 ; qu'en décidant que le litige portait sur "les conséquences d'un congé donné en application de l'article 3-1 du décret du 30 septembre 1953", pour en déduire la compétence du juge des référés du tribunal de grande instance, bien que le litige ait seulement au pour objet l'occupation sans droit ni titre postérieure à un congé qui n'a lui-même soulevé aucune contestation et qui a mis fin au bail commercial, la cour d'appel a violé ensemble les articles 29 du décret du 30 septembre 1953 et L. 411-4 du Code de l'organisation judiciaire ;
Mais attendu que la cour d'appel, investie de la plénitude de juridiction en tant que juridiction d'appel tant du juge des référés du tribunal de grande instance que du tribunal de commerce, avait, en tout état de cause, le pouvoir et le devoir de statuer ;
D'où il suit que le moyen est inopérant ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société ADG fait encore grief à l'arrêt d'avoir dit qu'elle était occupante sans droit ni titre des locaux appartenant à la SARL et que celle-ci subissait un préjudice imminent alors, selon le moyen, que tant en première instance qu'en appel, la juridiction des référés doit pour statuer se placer à la date à laquelle elle prononce sa décision ; que lorsque le dommage a disparu au jour où le juge statue, il n'y a plus lieu à référé ; qu'en décidant, pour confirmer l'ordonnance, qu'à la date à laquelle celle-ci avait été rendue la bailleresse justifiait d'un dommage imminent, bien qu'elle ait elle-même constaté que le trouble avait déjà cessé au jour où elle statuait, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 809 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que la société ADG avait libéré les lieux en cours de procédure et que les demandes relatives à l'expulsion et aux délais étaient devenues sans objet, la cour d'appel n'a statué que sur la demande relative à des dommages-intérêts pour procédure abusive et dilatoire, à celle fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et sur les dépens ; qu'en conséquence, il ne peut lui être reproché d'avoir examiné si la demande était justifiée lorsqu'elle avait été soumise au premier juge ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Application des Gaz Le Favier aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Application des Gaz Le Favier à payer à la société Bellissima la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille quatre.