AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 122-40 du Code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Le Lion de la braderie a mis fin de façon anticipée le 23 juin 1997 au contrat de travail à durée déterminée par lequel elle avait engagé M. Mohamed X... en qualité de responsable de magasin, en lui imputant un retard et une autorisation irrégulièrement donnée à une salariée d'emporter des marchandises ; que ces faits avaient été auparavant énoncés dans une lettre adressée au salarié le 13 mai 1997 ; que M. X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de dommages-intérêts et de rappel de salaires de mise à pied en soutenant notamment avoir été l'objet d'une double sanction pour les mêmes faits ;
Attendu que pour dire la rupture justifiée par une faute grave du salarié et rejeter ses demandes, l'arrêt retient que, dans sa lettre du 13 mai 1997, l'employeur se contente de dresser le constat de fautes commises, sans prendre aucune mesure et poursuivant par ailleurs son enquête, en sorte que ledit courrier ne peut être assimilé à une sanction et que le moyen tiré d'une double sanction n'est pas fondé ;
Attendu cependant que constitue une sanction toute mesure dépassant la simple observation verbale prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par lui comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il résultait de ses constatations que, dans la lettre adressée au salarié, l'employeur lui reprochait, en les qualifiant de fautifs, les faits ultérieurement invoqués à l'appui de la rupture, en sorte que cette lettre, envoyée vingt-quatre jours avant l'engagement d'une procédure de licenciement, avait constitué une sanction disciplinaire et que les mêmes faits ne pouvaient être une seconde fois sanctionnés, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 octobre 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne M. Y..., ès qualités, aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille quatre.