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12/10/2004 | FRANCE | N°02-12541

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 octobre 2004, 02-12541


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses six branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 15 janvier 2002), que par jugement du 12 juin 1995, L'EURL Percy constructions (l'EURL) a été mise en redressement judiciaire, M. X... étant désigné en qualité d'administrateur avec mission d'assister L'EURL dans tous les actes de gestion et d'administration ; que L'EURL a été autorisée à poursuivre ses activités jusqu'au 4 décembre 1995, date à laquelle

sa liquidation judiciaire a été prononcée ; que la société Cochard (la société),...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses six branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 15 janvier 2002), que par jugement du 12 juin 1995, L'EURL Percy constructions (l'EURL) a été mise en redressement judiciaire, M. X... étant désigné en qualité d'administrateur avec mission d'assister L'EURL dans tous les actes de gestion et d'administration ; que L'EURL a été autorisée à poursuivre ses activités jusqu'au 4 décembre 1995, date à laquelle sa liquidation judiciaire a été prononcée ; que la société Cochard (la société), qui n'a pas obtenu le paiement de factures correspondant à des livraisons effectuées durant la période d'observation, a mis en oeuvre la responsabilité personnelle de M. X... ; que le tribunal a condamné M. X... à payer à la société la somme de 87 512,99 francs outre intérêts ; que la cour d'appel, statuant par motifs substitués, a confirmé cette décision ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :

1 / que dans sa lettre du 15 juin 1995, il se bornait à préciser à la société que le gérant de L'EURL était autorisé, s'agissant d'actes de gestion courante, à passer des commandes à hauteur de 300 000 francs, moyennant paiement à soixante jours de la réception de la facture plus dix jours ; que, dans sa lettre du 29 juin 1995, il ne donnait aucune assurance particulière de règlement à la société, se bornant à faire état du "privilège" de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, tout en rappelant que ce "privilège" était primé par le superprivilège des créances salariales et par les frais de justice ; qu'en ajoutant à ces correspondances, pour y déceler "un engagement explicite de paiement de l'administrateur dans les limites de 300 000 francs TTC", la cour d'appel a statué au prix d'une dénaturation des lettres précitées ;

2 / qu'en l'absence de toute garantie de paiement imprudemment donnée par l'administrateur judiciaire, sa responsabilité ne pouvait être engagée, à raison de commandes passées par le débiteur seul, comme n'ayant pas été visées ou approuvées par le mandataire, que s'il était avéré qu'à la date de passation des commandes demeurées impayées, la situation de la société débitrice apparaissait déjà comme irrémédiablement compromise ; qu'en l'absence de toute constatation en ce sens, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ;

3 / qu'à supposer que l'administrateur ait souscrit l'obligation de s'assurer, lors des commandes, que la trésorerie du débiteur permettrait d'acquitter les factures à leur échéance, le juge devait, pour apprécier la faute du mandataire, se placer à la date à laquelle ont pris naissance les créances du fournisseur ; qu'en déduisant la faute de l'administrateur du simple constat que certaines factures étaient demeurées impayées à leur échéance, la cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ;

4 / qu'il ne résulte d'aucune constatation de l'arrêt qu'à la date de passation des commandes litigieuses, qui n'est même pas mentionnée, il apparaissait déjà que celles-ci ne pourraient être payées à leur échéance, ce en quoi la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ;

5 / que l'administrateur n'étant tenu que d'une obligation de moyens et sa responsabilité ne pouvant dès lors être engagée que pour faute prouvée, la cour d'appel ne pouvait lui reprocher, sauf à inverser la charge de la preuve, de ne pas justifier, par la production des documents jugés utiles (bilans mensuels de l'activité de l'EURL, relevé des comtes bancaires de l'entreprise...), de ce qu'il n'avait pas commis de faute dans l'accomplissement de ses devoirs professionnels ; qu'à cet égard, l'arrêt a été rendu au prix d'une violation de l'article 1315 du Code civil ;

6 / que l'administrateur judiciaire n'a pas l'obligation de faire dresser, chaque mois, le bilan de l'entreprise ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel, qui a par ailleurs constaté que l'exploitation de l'entreprise avait été suivie au moyen de tableaux de bord mensuels et que des études prévisionnelles avaient été établies, a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ;

Mais attendu qu'analysant les termes du courrier adressé le 15 juin 1995 par M. X... à la société, l'arrêt retient que l'administrateur a donné l'assurance à ce fournisseur que, durant la période de poursuite d'exploitation, il serait payé de ses factures à concurrence de la somme de 300 000 francs TTC ; qu'après avoir relevé, d'un côté, l'existence de deux factures impayées et d'une situation comptable datée du 31 octobre 1995 révélant l'insuffisance de trésorerie et, de l'autre, des dettes nées après l'ouverture de la procédure et dépassant 1 000 000 francs, l'arrêt en déduit que l'administrateur ne s'est pas assuré que la trésorerie de L'EURL permettait d'honorer les commandes passées à la société ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations qui rendaient inopérantes les recherches évoquées aux deuxième, troisième et quatrième branches, la cour d'appel, qui n'a pas dénaturé le courrier du 15 juin 1995, ni inversé la charge de la preuve, a légalement justifié sa décision ; que le moyen, qui manque en fait en sa sixième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la société François Cochard la somme de 1.800 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 02-12541
Date de la décision : 12/10/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen (1re chambre, section civile), 15 janvier 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 oct. 2004, pourvoi n°02-12541


Composition du Tribunal
Président : Président : M. TRICOT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:02.12541
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