AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 6 mai 2003), que M. X..., de nationalité roumaine, a été interpellé, le 1er mai 2003, à 1 heure 30 du matin, démuni de papiers d'identité et a été placé en garde à vue ; qu'il a été l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière du 2 mai 2003 et a été maintenu dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire le même jour, par décision du préfet de Seine-Saint-Denis ;
que par ordonnance en date du 4 mai 2003, le juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation du maintien en rétention de l'intéressé pour une durée de cinq jours ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé la décision du premier juge et d'avoir ordonné la prolongation de sa rétention alors, selon le moyen, que l'interprète n'avait pas prêté serment devant le premier juge, violant ainsi les dispositions de l'article 407 du Code de procédure pénale et l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que les dispositions de l'article 407 du Code de procédure pénale ne sont pas applicables à la procédure suivie devant le juge statuant sur la requête du préfet en prolongation du maintien en rétention d'un étranger et qu'aucun texte n'exige que l'interprète ait prêté serment ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé la décision du premier juge et d'avoir ordonné la prolongation de sa rétention alors, selon le moyen, que ses droits en garde à vue lui ont été notifiés tardivement et que les dispositions de l'article 63-1 du Code de procédure pénale ont été violées ;
Mais attendu que l'ordonnance retient que M. X..., interpellé à 1 heure 30 du matin le 1er mai, a été présenté dès 1 heure 50 à l'officier de police judiciaire ; que, l'intéressé ne s'exprimant pas en français, les services de police ont recherché un interprète en langue roumaine et constaté par procès-verbal établi à 2 heures 30 qu'aucun n'avait la possibilité de se déplacer au service ; que l'interprète, qui a pu être joint à 9 heures 30, n'est arrivé qu'à 12 heures 25 ; que le 1er mai est un jour férié qui se trouve au milieu d'un "pont" ; que les policiers ont mis en oeuvre tous les moyens pour y parvenir ;
Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, caractérisant des circonstances insurmontables justifiant qu'il ait été impossible de faire appel à un interprète en langue roumaine lors du placement en garde à vue, le premier président a pu statuer comme il l'a fait sans encourir les griefs du moyen ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé la décision du premier juge et d'avoir ordonné la prolongation de sa rétention alors, selon le moyen, que M. Y..., signataire de la requête en prolongation de la rétention, n'avait reçu délégation pour signer cet acte qu'en cas d'absence ou d'empêchement de MM. Z... et A... ; qu'à défaut de la mention, dans la procédure, de l'absence ou de l'empêchement de MM. Z... et A... les dispositions de l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ont été violées ;
Mais attendu que la signature de la requête par M. Y... impliquait nécessairement l'indisponibilité de MM. Z... et A... et qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que MM. Z... et A... n'aient pas été absents ou empêchés à la date de la requête en prolongation de la rétention administrative ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le sixième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé la décision du premier juge et d'avoir ordonné la prolongation de sa rétention alors, selon le moyen, que le procureur de la République n'a pas été informé du placement en rétention administrative, en violation de l'alinéa 6 de l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Mais attendu que l'ordonnance retient que l'officier de police judiciaire a informé le procureur de la République de ce qu'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière allait être pris à l'encontre de M. X..., que c'est dans ce contexte que le procureur de la République a donné instruction de mettre fin à la garde à vue, que cette mainlevée avait nécessairement pour conséquence de placer M. X... en rétention administrative, que le procureur de la République n'avait pas à être informé d'une mesure, conséquence directe de celle qu'il venait de prendre ;
Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, d'où il résulte que le procureur de la République avait nécessairement été informé de la mesure de placement en rétention, le premier président a légalement justifié sa décision ;
Sur le septième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé la décision du premier juge et d'avoir ordonné la prolongation de sa rétention alors, selon le moyen, que le préfet n'a pas apporté les justifications des diligences qui lui incombaient pour exécuter la mesure d'éloignement de l'étranger, violant ainsi les dispositions de l'alinéa 2 du décret du 12 novembre 1991 ;
Mais attendu que l'ordonnance, par motifs adoptés, retient que l'Administration justifie des diligences pour assurer le retour de l'intéressé dans son pays d'origine, celui-ci étant dépourvu de document d'identité et devant obtenir un laissez-passer délivré par les autorités consulaires ;
Que, par ces constatations et énonciations, le premier président a pu retenir que le préfet avait effectué toutes les diligences qui lui incombaient pour reconduire M. X... à la frontière ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les premier, cinquième et huitième moyens dont aucun ne serait de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept octobre deux mille quatre.