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23/09/2004 | FRANCE | N°02-15782

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 23 septembre 2004, 02-15782


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Versailles, 10 avril 2002) qu'un incendie, qui avait pris naissance sur un véhicule Volvo, ayant eu lieu dans le tunnel du Mont Blanc, la société Allianz vie assurances, aux droits de laquelle vient la compagnie AGF IART, a demandé à un juge des référés d'ordonner une expertise sur le fondement de l'article 145 du nouveau Code de procédure civile ; que le collège d'experts désigné s'étant heurté à des difficultés dans l'

accomplissement de sa mission, le juge chargé du contrôle des expertises a ord...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Versailles, 10 avril 2002) qu'un incendie, qui avait pris naissance sur un véhicule Volvo, ayant eu lieu dans le tunnel du Mont Blanc, la société Allianz vie assurances, aux droits de laquelle vient la compagnie AGF IART, a demandé à un juge des référés d'ordonner une expertise sur le fondement de l'article 145 du nouveau Code de procédure civile ; que le collège d'experts désigné s'étant heurté à des difficultés dans l'accomplissement de sa mission, le juge chargé du contrôle des expertises a ordonné, sous astreinte, à la société Volvo Trucks France de communiquer aux experts différentes pièces ; que la société Volvo Trucks France, la société Volvo Truck Corporation et la société Volvo Europe Truck NV ont interjeté appel de cette ordonnance ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le moyen fait grief à l'arrêt d'avoir fait injonction à la société Volvo Trucks France de communiquer aux experts les pièces visées dans le dispositif de l'ordonnance de première instance, et ce à peine d'astreinte, alors, selon le moyen :

1 / qu'en considérant globalement que les pièces sollicitées étaient pertinentes au regard de la mission des experts, laquelle aurait permis de rechercher si des tracteurs du même type que le FH12 D12A 420 Globe-trotter XL avaient subi des incidents et avaient été modifiés, sans analyser même sommairement la pertinence de chacune des pièces sollicitées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 145 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / que dans ses écritures d'appel, la société Volvo Trucks France faisait valoir que la liste des principales modifications apportées sur le moteur D12A, les commentaires en français sur ses principales modifications et leur utilité, la communication d'un ou plusieurs éclatés du moteur D12C, avaient d'ores et déjà été communiqués aux experts ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / qu'en statuant ainsi, sans prendre en considération les intérêts de la société Volvo Trucks France, laquelle faisait valoir que certaines des pièces sollicitées n'étaient pas pertinentes et que la méthode employée procédait d'un audit de l'ensemble des incidents rencontrés sur la flotte dans le seul but de dresser un inventaire statistique des causes possibles d'incendies sans que soit démontré qu'un seul de ces antécédents ait pu avoir un rapport quelconque avec une constatation objective préalablement effectuée sur l'épave du tracteur actuellement placé sous scellés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 145 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que le juge chargé du contrôle des expertises est tenu de veiller, en application des articles 11 et 275 du nouveau Code de procédure civile, à ce que les parties apportent leur concours aux mesures d'instruction et remettent sans délai aux experts les pièces nécessaires à l'accomplissement de leur mission ; qu'après avoir rappelé la mission des experts et précisé qu'il leur appartenait non seulement d'examiner le tracteur qui avait pris feu mais aussi de rechercher si des véhicules de même type avaient subi des incidents et si des corrections techniques avaient été apportées pour y remédier, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel, qui n'avait pas à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a retenu la pertinence des demandes de communication portant sur des documents très précis, en relation directe avec le contenu de la mission ;

Et attendu qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que la communication de pièces effectuées par "le groupe Volvo" ne correspondait pas à la demande des experts, la cour d'appel a répondu aux conclusions ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Volvo Trucks France reproche à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le moyen :

1 / qu'en s'abstenant de rechercher si la société AGF, importante compagnie d'assurance et non simple particulier consommateur, avait pu légitimement croire que la société Volvo Trucks France représentait la société Volvo Truck Corporation, alors même que cette dernière était elle-même partie à l'instance et la société Volvo Trucks France n'avait pas conclu au nom et pour le compte de la société Volvo Truck Corporation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de l'apparence et de l'article 1985 du Code civil ;

2 / que dans ses écritures, la société Volvo Trucks France faisait valoir qu'elle n'avait jamais été présentée "comme le mandataire des sociétés Volvo" autrement que par la société AGF dans son acte introductif d'instance et ce, dans le seul but de tenter de justifier d'une prétendue compétence territoriale du tribunal de commerce de Nanterre ;

qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / que la théorie de l'apparence n'a qu'un caractère subsidiaire et ne peut recevoir application que si les textes n'offrent aucun autre moyen de nature à accueillir la prétention du demandeur ; que la cour d'appel pouvait ordonner à la société Volvo Truck Corporation, partie à l'instance, de communiquer les pièces qui étaient en sa seule possession ; qu'en faisant injonction à la société Volvo Trucks France, sur le fondement d'un prétendu mandat apparent, de communiquer les pièces qui ne sont pas en la possessoin de Volvo Trucks France et qui ne sont qu'éventuellement en la possession de Volvo Truck Corporation, la cour d'appel a violé le principe de l'apparence et l'article 1985 du Code civil ;

4 / qu'en condamnant sous astreinte la société Volvo Trucks France à produire des pièces détenues par une autre société, la cour d'appel a violé les articles 145 du nouveau Code de procédure civile et 1142 du Code civil ;

5 / qu'il appartient au demandeur à la production d'établir que la partie adverse a la détention des pièces sollicitées ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 145 du nouveau Code de procédure civile et 1315 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'avait pas à faire une recherche qui ne lui avait pas été demandée, dès lors que le juge chargé du contrôle des expertises avait été saisi de difficultés d'exécution de la mesure à l'initiative des experts a pu, répondant aux conclusions, retenir qu'au cours des opérations d'expertise, la société Volvo Trucks France était le mandataire apparent des sociétés Volvo, la défense commune aux sociétés du groupe ayant adressé ses dires aux experts au nom de "la société Volvo" ;

Et attendu qu'au regard de la position commune des sociétés du groupe au cours des opérations d'expertise, la cour d'appel qui a relevé, sans inverser la charge de la preuve, que l'existence de pièces demandées par les experts est vraisemblable, a pu ordonner à la société Volvo Trucks France de communiquer les pièces demandées, sans avoir à rechercher si elle les détenait personnellement ou si une autre société du groupe en possédait certaines, normalement accessibles à la filiale française ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Volvo trucks France aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Volvo Trucks France ; la condamne à payer aux AGF la somme de 2 500 euros, à la société Astruck renting et co et à la société Fortis corporate insurance la somme globale de 2 500 euros, à la société SITMB la somme de 2 500 euros et à la société Assitalia groupe INA la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, signé et prononcé par M. Séné, conseiller le plus ancien, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du nouveau Code de procédure civile, en l'audience publique du quatre décembre deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 02-15782
Date de la décision : 23/09/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Pièces - Versement aux débats - Refus - Demande de communication forcée - Injonction de communiquer - Conditions - Vérification préalable de la détention des pièces par une personne déterminée - Dispense - Cas - Vraisemblance de la détention des pièces par l'une des sociétés du groupe en cause.

POUVOIRS DES JUGES - Injonction - Injonction de communication de pièces - Conditions - Vérification préalable de la détention des pièces par une personne déterminée - Dispense - Cas - Vraisemblance de la détention des pièces par l'une des sociétés du groupe en cause

MESURES D'INSTRUCTION - Expertise - Opérations d'expertise - Documents nécessaires à l'expertise - Communication - Carence des parties - Pouvoirs des juges - Injonction de produire des pièces - Conditions - Vérification préalable de la détention des pièces par une personne déterminée - Dispense - Cas

N'inverse pas la charge de la preuve la cour d'appel qui, pour ordonner à l'une des sociétés d'un même groupe, de produire certaines pièces, sans avoir à rechercher si celle-ci les détenait personnellement ou si une autre société du groupe les possédait, retient qu'au regard de la position commune des sociétés du groupe au cours des opérations d'expertise, l'existence desdites pièces est vraisemblable et qu'elles lui sont normalement accessibles.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 10 avril 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 23 sep. 2004, pourvoi n°02-15782, Bull. civ. 2004 II N° 428 p. 362
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2004 II N° 428 p. 362

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Sené, conseiller le plus ancien faisant fonction et rapporteur.
Avocat général : Avocat général : M. Kessous.
Rapporteur ?: Président : M. Sené, conseiller le plus ancien faisant fonction et rapporteur.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Defrenois et Levis, la SCP Boré, Xavier et Boré, la SCP Célice, Blancpain et Soltner, la SCP Delaporte, Briard et Trichet, Me Foussard, Me Le Prado, la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:02.15782
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