AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu que M. X... a été embauché par la société EGT Asport en 1983 en qualité de chauffeur poids lourds ; qu'il a saisi, le 21 juillet 1998, le conseil de prud'hommes d'une demande en paiement de remboursement de frais kilométriques de septembre 1996 à septembre 1999, ainsi que de primes de non accident et congés payés afférents ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Reims, 5 juin 2002) de l'avoir condamné à payer à M. X... une somme correspondant à la prise en charge des frais de déplacement des chauffeurs routiers de leur domicile à leur lieu de travail, alors, selon le moyen :
1 / que l'usage d'entreprise correspond à une pratique constante, générale et fixe suivie dans l'entreprise et résultant de la volonté non équivoque de l'employeur de s'engager envers ses salariés et de leur octroyer un avantage ; que la simple tolérance n'est pas constitutive d'un usage d'entreprise ; qu'en déduisant, dès lors, l'existence, au sein de la société EGT Asport, d'un usage d'entreprise, consistant à laisser aux salariés chauffeurs routiers le droit d'utiliser le véhicule de transport de l'entreprise pour se déplacer entre leur domicile et le lieu de leur travail, de la simple habitude qui se serait instaurée en ce sens, habitude qu'elle a elle-même déduite de la seule note de service, dans laquelle l'employeur a énoncé qu'il était désormais interdit aux salariés de se servir des véhicules de l'entreprise comme moyen de locomotion personnel, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
2 / que, pour qu'une pratique soit constitutive d'un usage d'entreprise, elle doit être constante, générale et fixe ; qu'une pratique n'est fixe que si elle obéit à des règles prédéfinies, constantes et reposant sur des critères objectifs et ne dépend donc pas du pouvoir discrétionnaire de l'employeur ; qu'en considérant, dès lors, que la prétendue pratique consistant à laisser aux salariés chauffeurs routiers le droit d'utiliser le véhicule de transport de l'entreprise pour se déplacer entre leur domicile et le lieu de leur travail était fixe, au motif qu'en son principe, cette pratique était la même pour tous les chauffeurs routiers de l'entreprise, quand cette circonstance ne pouvait caractériser que la généralité de la pratique en cause, et non sa fixité, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que, sous couvert de griefs non fondés de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion l'appréciation souveraine des juges du fond qui, au vu des éléments de fait et de preuve qui leur étaient soumis, ont retenu que la pratique litigieuse en vigueur dans l'entreprise revêtait les caractères de généralité, constance et fixité, constitutifs de l'usage ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société EGT Asport aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société EGT Asport à payer à M. X... la somme de 2 200 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille quatre.