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13/07/2004 | FRANCE | N°02-41577

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 juillet 2004, 02-41577


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 15 janvier 2002), que M. X... a été engagé, le 16 décembre 1968, en qualité de chauffeur, dans l'entreprise de transports dirigée à l'époque par son beau-père et dont il devait devenir le mandataire social ; que connaissant d'importantes difficultés de trésorerie, M. X... va céder au Groupe Ziegler l'ensemble des actifs de la société Transports Rochais-Bonnet ;

qu'un protocole d'accord est signé le 2 septembre 1996 moyennant

une garantie d'actif et de passif ; qu'à ce protocole était annexé un contrat de t...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 15 janvier 2002), que M. X... a été engagé, le 16 décembre 1968, en qualité de chauffeur, dans l'entreprise de transports dirigée à l'époque par son beau-père et dont il devait devenir le mandataire social ; que connaissant d'importantes difficultés de trésorerie, M. X... va céder au Groupe Ziegler l'ensemble des actifs de la société Transports Rochais-Bonnet ;

qu'un protocole d'accord est signé le 2 septembre 1996 moyennant une garantie d'actif et de passif ; qu'à ce protocole était annexé un contrat de travail prévoyant l'embauche de M. X... aux fonctions de directeur de la société Transports Rochais-Bonnet moyennant un salaire annuel brut de 700 000 francs ; qu'à la suite de la mise en oeuvre par le Groupe Ziegler de la garantie de passif, un protocole d'accord était signé le 9 juillet 1997 aux termes duquel, parmi des dispositions concernant le passif, il était stipulé que M. X..., tout en conservant le titre de directeur, serait dorénavant chargé des grands comptes clients, sa rémunération étant ramenée à 20 000 francs brut par mois ; que convoqué à un entretien préalable, M. X... a été licencié pour faute grave le 24 septembre 1999 ; que contestant le bien-fondé de cette mesure, il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement de rappels de salaires et congés payés afférents, alors, selon le moyen :

1 / qu'on ne peut transiger sur des matières qui intéressent l'ordre public, qu'une transaction n'est pas valable dès lors qu'elle opère, en méconnaissance de l'article L. 144-1 du Code du travail, une compensation entre les créances de salaires et les sommes dues par le salarié à l'employeur en application d'une clause de garantie de passif contenue dans un protocole de cession de l'entreprise conclu par le salarié à une époque où il était mandataire social ; qu'en décidant que la transaction conclue entre M. X... et le Groupe Ziegler était valide en ce qu'elle avait prévu une réduction du salaire de l'exposant, quand il résultait des constatations de l'arrêt que cette réduction intervenait en compensation de la mise en application de la garantie de passif contenue dans le protocole de cession de l'entreprise et que la transaction n'avait pour objet ni l'exécution, ni la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles 2046 du Code civil et L. 144-1 du Code du travail ;

2 / que l'exécution par un salarié d'une transaction, et en particulier, son acceptation sans protestation ni réserve d'une réduction de son salaire, n'implique pas renonciation de sa part à en demander la nullité ; qu'en relevant que la transaction litigieuse était valide, dès lors que M. X... l'avait intégralement exécutée et, en particulier, qu'il avait accepté la réduction de son salaire, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article L. 143-4 du Code du travail et, par fausse application, l'article 2052 du Code civil ;

3 / que les sanctions pécuniaires sont interdites ; que toute disposition ou stipulation contraire est réputée non écrite ; qu'après avoir reproché à M. X... d'avoir volontairement caché au Groupe Ziegler le caractère obéré, sinon catastrophique, de la situation de la société Transports Rochais-Bonnet au mois d'août 1996, et relevé que celle-ci était, dès lors, fondé à faire jouer la garantie de passif à l'encontre de l'exposant, la cour d'appel, qui a considéré qu'était valable la transaction prévoyant comme modalité de règlement du passif la réduction du salaire de M. X..., quand cette réduction de salaire caractérisait une sanction pécuniaire prohibée, et que la transaction était réputée non écrite, a violé, par refus d'application, l'article L. 122-42 du Code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la transaction intervenue le 9 juillet 1997 avait pour seul but de mettre fin au litige résultant de la mise en oeuvre de la clause de garantie de passif et que la réduction de la rémunération de M. X..., intervenue à l'occasion de cette convention, n'était que la résultante de la modification des attributions de celui-ci au sein de l'entreprise, la cour d'appel n'encourt pas les griefs du moyen ;

Sur le deuxième moyen, tel qu'il figure en annexe :

Attendu qu'il n'y a pas lieu à statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le moyen :

1 / que les périodes de mandats sociaux ne sont suspensives du contrat de travail qu'en l'absence de convention contraire des parties ; que l'engagement unilatéral d'un employeur de prendre en compte l'ancienneté du salarié pendant les périodes de mandats sociaux est supplétif de la volonté des parties ; qu'en ne s'expliquant pas sur les conclusions d'appel de M. X..., selon lesquelles la société Transports Rochais-Bonnet s'était engagée à faire remonter son ancienneté au 16 décembre 1968, date de son embauche, abstraction faite des périodes de mandats sociaux, dès lors qu'elle mentionnait régulièrement sur les bulletins de salaire du salarié une ancienneté remontant à cette date du 16 décembre 1968, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

2 / que la cour d'appel, qui a débouté M. X... de sa demande d'indemnité de licenciement, ne pouvait se prononcer sur son montant sans excéder les pouvoirs qui lui sont conférés par l'article L. 122-3 du Code du travail ;

3 / que la règle prévue par l'article L. 122-10 du Code du travail selon laquelle les périodes de suspension du contrat de travail ne sont pas prises en compte dans le calcul de l'ancienneté n'est applicable qu'au calcul du montant de l'indemnité de licenciement ; qu'en appliquant cette règle à la détermination du point de savoir si M. X... avait droit à la majoration de salaire de 15 % au bout de 15 ans d'ancienneté, prévue par l'article 5 de l'annexe n° 4 de la Convention collective nationale des transports routiers, la cour d'appel a violé, par fausse application, les dispositions précitées de l'article L. 122-10 du Code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que le grief énoncé à la seconde branche du moyen relève une simple erreur de plume qui ne constitue pas un cas d'ouverture à cassation ;

Attendu, ensuite, qu'ayant retenu que pour la détermination des droits au titre de l'ancienneté, les périodes pendant lesquelles le contrat de travail s'est trouvé suspendu, ne peuvent être retenues pour le calcul de ces droits, nonobstant la mention sur les bulletins de salaire de la date d'arrivée de M. X... dans l'entreprise, la cour d'appel en a déduit implicitement mais nécessairement l'absence d'un engagement unilatéral de l'employeur selon lequel les périodes de mandats sociaux seraient prises en compte dans l'ancienneté ;

Attendu, enfin, qu'ayant relevé que M. X... ne justifiait pas de la date à laquelle il était devenu mandataire social, nécessaire à l'appréciation de son ancienneté, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de ses demandes en paiement de sommes à titre d'indemnités de préavis et de licenciement, de dommages-intérêts pour mise à pied vexatoire et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1 / que la faute grave est celle qui résulte d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; qu'en se bornant à reprocher à M. X... d'avoir refusé, malgré les injonctions de son employeur, de lui fournir des rapports d'activités, sans caractériser aucun manquement à des obligations contractuelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6, L. 122-9 et L. 122-14-3 du Code du travail ;

2 / que la cour d'appel ne pouvait sérieusement affirmer que la société "aurait renoncé à imposer une mutation pour se conformer au contrat" sans rechercher si l'absence de précision quant à la durée de ce détachement ne dissimulait pas en réalité un détachement définitif, constituant une modification du contrat de travail du salarié qui ne pouvait lui être imposée sans son accord exprès ; qu'en ne procédant pas à cette recherche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-4, L. 122-6, L. 122-9 et L. 122-14-3 du Code du travail ;

3 / que les motifs de licenciement énoncés dans la lettre de licenciement doivent constituer la vraie cause du licenciement ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme l'y invitaient les conclusions d'appel de M. X..., si la rupture de son contrat de travail ne s'analysait pas en une injonction de manoeuvres insidieuses et agressives ayant pour but de l'éliminer en tant qu'ancien propriétaire des actions de la société Transports Rochais-Bonnet, dès lors qu'à partir du moment où il avait dû signer la transaction prévoyant la mise en jeu de la garantie contractuelle de passif et la réduction de son salaire, l'employeur l'avait mis à l'écart de la direction et privé de ses moyens de travail, puis l'avait brusquement harcelé pour qu'il rende des rapports d'activité, et enfin, lui avait imposé une mutation définitive à Nantes, alors qu'il pouvait exercer son activité aux Herbiers, et ne lui avait finalement proposé un détachement temporaire que pour se mettre en conformité avec le contrat de travail, et ce, alors qu'il venait de refuser une proposition de démission de l'employeur, ce dont il se déduisait que le détachement temporaire visait à masquer une volonté d'élimination, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6, L. 122-9 et L. 122--144 du Code du travail ;

4 / qu'en ne répondant aucunement aux conclusions d'appel précitées de M. X..., la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs, en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

5 / que la suspension du contrat de travail en cas de maladie du salarié, destinée à protéger le lien contractuel, implique, par elle-même, interdiction pour l'employeur de résilier le contrat de travail régulièrement suspendu ; que la méconnaissance de l'interdiction de résiliation du contrat de travail pendant la phase de suspension rend le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en considérant que le licenciement prononcé alors que le salarié était en arrêt maladie était justifié, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 122-6, L. 122-9 et L. 122-45 du Code du travail ;

Mais attendu, d'abord, qu'il ne résulte ni des conclusions ni de l'arrêt que le grief énoncé à la dernière branche du moyen ait été soutenu devant les juges du fond ; qu'il est donc nouveau et, mélangé de fait et de droit, irrecevable ;

Et attendu qu'ayant relevé, d'une part, que le salarié s'était refusé de façon systématique de transmettre ses plannings et rapports d'activités à son directeur général auquel il était subordonné, d'autre part, que celui-ci s'était opposé à son détachement temporaire pour une durée de six mois au siège de la société à Nantes alors qu'en vertu de son contrat de travail il pouvait être appelé à exercer temporairement ses fonctions en dehors de sa région d'affectation, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre le salarié dans le détail de son argumentation, a pu décider que le comportement du salarié était de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis et constituait une faute grave ; d'où il suit que le moyen en ses autres branches, n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 02-41577
Date de la décision : 13/07/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers (chambre sociale), 15 janvier 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 jui. 2004, pourvoi n°02-41577


Composition du Tribunal
Président : Président : M. FINANCE conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:02.41577
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