AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 29 octobre 2002) que par acte du 17 mars 1995, les consorts X... ont vendu aux époux Y... la totalité du capital de l'exploitation agricole à responsabilité limitée X... (l'EARL) ; que les acquéreurs ont assigné leurs vendeurs en remboursement d'une partie du prix de vente des parts au motif qu'elle dissimulait le rachat d'un "pas de porte" prohibé et ne correspondait pas à la valeur de celles-ci ;
Attendu que les époux Y... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande alors, selon le moyen :
1 / que l'action en répétition visée à l'article L. 411-74 est applicable à tout bailleur, tout preneur sortant ou tout intermédiaire qui aura directement ou indirectement, à l'occasion d'un changement d'exploitant, obtenu ou tenté d'obtenir une remise d'argent ou de valeur non justifiée, ou encore imposé ou tenter d'imposer la reprise de biens mobiliers à un prix ne correspondant pas à la valeur vénale de ceux-ci ;
qu'en statuant comme elle l'a fait tout en constatant que les consorts X... avaient tout à la fois la qualité de propriétaire d'une partie des terres proposées aux époux Y... et de seuls associés exploitants de l'EARL X... au sein de laquelle ils mettaient les terres en valeur et avaient cédé la totalité de leurs parts à ces derniers, ce qui impliquait nécessairement un changement d'exploitant, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 411-74, L. 411-1 et L. 411-2 du Code rural ;
2 / que les améliorations culturales sont dues par le bailleur au preneur sortant et ne peuvent en aucun cas être mises à la charge du preneur entrant ; qu'en outre, la présence sur le fonds de quotas betteraviers ne constitue pas une amélioration susceptible de donner lieu au paiement d'une contrepartie à l'occasion d'un changement d'exploitant ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, sans même rechercher si les sommes remises par les époux Y... à l'occasion de l'acquisition des parts sociales de l'EARL X... étaient justifiées, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 411-74 du Code rural ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel, qui a relevé que les époux X... étaient bailleurs de terres qu'ils avaient données en location à l'EARL et qu'il n'y avait pas changement d'exploitant puisqu'elles continuaient à être exploitées par l'EARL, en a exactement déduit que l'article L. 411-74 du Code rural était inapplicable ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant constaté que les améliorations culturales n'avaient pas été prises en compte pour la détermination du prix des parts sociales, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les époux Y... à payer aux consorts X... la somme de 1 900 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille quatre.