AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (30 septembre 2002), que la société ARTEA, qui avait été mise en redressement judiciaire simplifié le 21 avril 2000, a été soumise au régime général du redressement judiciaire par jugement du 15 décembre 2000 qui a, en outre, décidé la poursuite de son activité jusqu'au 21 avril 2001 ;
que par jugement du 6 avril 2001, le tribunal de commerce a sursis à statuer sur la suite à donner à la procédure collective dans l'attente de la requête du ministère public en vue d'une éventuelle prorogation de la période d'observation et de l'issue de la procédure opposant la société ARTEA à son assureur dans le cadre de l'instance pénale faisant suite à l'incendie des locaux de cette société ; que par jugement du 22 juin 2001, la société ARTEA a été mise en liquidation judiciaire ;
qu'elle a interjeté appel de cette décision ;
Attendu que la société ARTEA fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement prononçant sa liquidation judiciaire alors, selon le moyen :
1 / que le juge ne peut revenir sur sa décision de sursis à statuer par le biais d'une deuxième instance tant que l'événement, cause du sursis, n'est pas survenu ; qu'il ressortait, en l'espèce, des propres constatations de la cour d'appel que le tribunal avait ordonné un sursis jusqu'à l'issue de la procédure pénale ; qu'en considérant, cependant, que le tribunal pouvait ultérieurement revenir sur sa décision de sursis à statuer alors que la cause de celle-ci, soit l'issue de la procédure pénale, n'était pas survenue, la cour d'appel a violé les articles 378 et 379 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que le sursis à statuer s'impose à la juridiction civile tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique susceptible d'exercer une influence sur l'action civile ; qu'en considérant, dès lors, que le tribunal pouvait révoquer sa décision de sursis et prononcer la liquidation judiciaire sans rechercher si la décision pénale à intervenir opposant la société ARTEA à son assureur, dont dépendait le sort d'indemnités d'assurance près de deux fois supérieures au montant du passif admis, n'était pas susceptible d'exercer une influence sur la solution de l'instance civile, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4 du Code de procédure pénale ;
3 / qu'il n'existe aucune sanction en cas de dépassement des délais prévus par l'article L. 621-6 du Code de commerce ; que le juge peut prolonger la période d'observation au-delà de ces délais lorsque les circonstances l'exigent ; qu'en considérant, dès lors, que ces délais ne pouvaient être dépassés en aucun cas, la cour d'appel a violé l'article L. 621-6 du Code de commerce et l'article 20 du décret du 27 décembre 1985 ;
Mais attendu qu'abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par la troisième branche, la cour d'appel a retenu, par motif adopté du jugement, que l'activité de la société ARTEA s'est poursuivie dans des conditions difficiles et déficitaires, avec un chiffre d'affaire en baisse constante, que cette activité a généré une perte courante de 603 000 francs, outre des frais exceptionnels de 510 000 francs, et, par motifs propres, que cette société ne proposait aucun plan de redressement, justifiant ainsi légalement sa décision prononçant la liquidation judiciaire ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société ARTEA aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille quatre.