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30/06/2004 | FRANCE | N°02-14361

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 juin 2004, 02-14361


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° B 02-14.361, V 02-14.493, W 02-14.494 et B 02-14.591 ;

Les demandeurs aux pourvois invoquent, à l'appui de leurs recours, les moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Attendu que MM. X... et Y..., embarqués en qualité de capitaine, sur le navire "La Pointe du cormoran" armé par la société Navale française, invoquant la violation par l'armateur des dispositions relatives à la durée du travail, ont saisi la juridiction

commerciale pour qu'il soit enjoint à la société de se conformer à la législation en e...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° B 02-14.361, V 02-14.493, W 02-14.494 et B 02-14.591 ;

Les demandeurs aux pourvois invoquent, à l'appui de leurs recours, les moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Attendu que MM. X... et Y..., embarqués en qualité de capitaine, sur le navire "La Pointe du cormoran" armé par la société Navale française, invoquant la violation par l'armateur des dispositions relatives à la durée du travail, ont saisi la juridiction commerciale pour qu'il soit enjoint à la société de se conformer à la législation en engageant un second lieutenant et pour obtenir diverses sommes relatives à la durée du travail ;

Sur les moyens réunis, communs aux deux pourvois formés par l'armateur :

Attendu que l'armateur fait grief aux arrêts attaqués de l'avoir condamné à payer aux deux capitaines une somme au titre de la surcharge de travail engendrée par le manque d'un second lieutenant, alors, selon les moyens :

1 / qu'aux termes de l'article 1er du décret du 26 mai 1967, l'effectif fixé par l'armateur est soumis par ce dernier au visa de l'administrateur des affaires maritimes qui apprécie sa conformité aux règles relatives à la durée du travail ; qu'en entrant néanmoins en voie de condamnation à l'encontre de la Société navale française pour ne pas avoir respecté la réglementation du travail, après avoir constaté qu'il résultait de la fiche d'effectif établie le 1er mars 1996 par laquelle l'administrateur des affaires maritimes a délivré son visa à la décision d'effectif présentée par la Société navale française, que l'effectif global proposé par l'armateur permet de satisfaire aux prescriptions législatives et réglementaires, tant en ce qui concerne la sécurité de la navigation que l'organisation de la durée du travail, la cour d'appel, qui a substitué son appréciation à celle de l'autorité maritime, a violé, ensemble, l'article 1er du décret n° 67-432 du 26 mai 1967 et le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, tiré de la loi du 16-24 août 1790 ;

2 / que le juge doit s'assurer que la dénonciation d'un accord collectif a entraîné sa disparition ; qu'en se contentant de retenir, pour refuser de donner effet au protocole d'accord des personnels officiers en date du 30 juin 1997, que cet accord collectif a été ratifié par une seule organisation professionnelle qui l'a dénoncé depuis, sans préciser à quel moment était intervenue cette dénonciation ni rechercher si cet accord ne devait pas continuer à régir les rapports contractuels entre les parties, en raison de sa survie provisoire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 132-8 du Code du travail ;

3 / que, dans ses conclusions d'appel, M. Y... a expressément affirmé que le protocole d'accord du 30 juin 1997 avait été dénoncé le 3 février 2001 ; qu'en refusant néanmoins de faire application du protocole d'accord des personnels officiers en date du 30 juin 1997 jusqu'au moment de sa dénonciation, la cour d'appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;

4 / qu'aux termes de l'article 25 du Code du travail maritime, il peut être dérogé par accord collectif d'entreprise ou d'établissement aux dispositions réglementaires relatives à l'aménagement et à la répartition des honoraires de travail sur un navire marchand pour tenir compte des contraintes propres aux diverses activités maritimes ; qu'en décidant néanmoins que ne saurait s'appliquer l'obligation faite au capitaine, par le protocole d'accord des personnel officiers en date du 30 juin 1997, d'assurer le quart à la mer selon la décision d'effectif dans la mesure où cette disposition lui était plus défavorable que la Convention collective nationale des personnels navigants officiers des entreprises de transports maritimes en date du 29 novembre 1976 et que les dispositions du décret du 6 septembre 1983, qui exigent, pour cette tâche, un officier par bordée, en sus du capitaine, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

5 / que, selon la résolution de la 12e assemblée de l'OMI, annexe 2, article 2.2.3 en date du 19 novembre 1981, sauf à bord des navires de dimensions restreintes, il faudra prévoir suffisamment d'officiers pour éviter que le capitaine soit tenu d'assurer régulièrement le quart ; qu'en retenant néanmoins, pour refuser de rechercher, comme elle y était invitée, si le navire "Pointe de cormoran" n'était pas un navire de dimensions restreintes, que le décret n° 83-793 du 6 septembre 1983 avait opéré transposition en droit interne de la résolution de la 12e assemblée de l'OMI, fixant un seuil de 500 tonneaux, quand ce décret a été pris pour l'application de l'article 25 du Code de travail maritime, la cour d'appel a violé ensemble l'article 55 de la Constitution, l'article 2.2.3, annexe 2, de la 12e assemblée de l'OMI et l'article 25 du Code de travail maritime ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, après avoir constaté que les deux capitaines s'étaient trouvés dans l'obligation d'effectuer, non seulement leur propre travail, mais aussi une partie de celui de l'officier manquant, a exactement décidé, sans substituer son appréciation à celle de l'autorité maritime, que les intéressés devaient bénéficier des dispositions de l'article 26 de la Convention collective nationale des personnels navigants officiers des entreprises de transports maritimes du 29 novembre 1976 aux termes duquel, si un officier manque à l'effectif fixé conformément aux dispositions légales en vigueur, la solde de l'officier manquant sera répartie entre les officiers qui seront appelés à assurer son travail ou son quart ;

Attendu, ensuite, que la cour d'appel ayant relevé que les dispositions du protocole d'organisation du travail à bord des navires établi par la Société navale française le 27 mars 1998, qui faisaient obligation au capitaine d'assurer le quart à la mer selon la décision d'effectif, étant plus défavorables à cet égard que celles de la Convention collective nationale des personnels navigants officiers des entreprises de transports maritimes du 29 novembre 1976 et de l'article 15 du décret du 6 septembre 1983, a exactement décidé que ledit protocole ne pouvait recevoir application ;

Et attendu, enfin, que la cour d'appel ayant constaté, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation des éléments de fait, que le navire "Pointe du cormoran"appartenait à la catégorie des cargos d'une jauge brute supérieure à 500 tonneaux qui effectuent des séjours à la mer d'une durée normale de plus de 24 heures tels que définis par l'article 15 du décret du 6 septembre 1983 et des cargos armés au long cours ou au cabotage international visés à l'article 13 du même décret et qu'il ne pouvait donc être considéré comme étant de dimensions restreintes au sens de la résolution de la 12e assemblée de l'OMI, annexe 2, article 2.2.3, du 19 novembre 1981 aux termes de laquelle "sauf à bord des navires de dimensions restreintes, il faudra prévoir suffisamment d'officiers pour éviter que le capitaine soit tenu d'assurer régulièrement le quart" ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique commun aux pourvois formés par les deux capitaines :

Vu le décret n° 83-793 du 6 septembre 1983 et les dispositions de la Convention collective nationale des personnels navigants officiers des entreprises de transports maritimes du 29 novembre 1976 ;

Attendu que, pour rejeter partiellement les demandes de paiement des créances salariales des deux officiers, les arrêts attaqués retiennent qu'au cours des périodes pendant lesquelles ils ont été amenés à effectuer non seulement leur propre travail mais aussi une partie de celui de l'officier manquant, en fait un tiers pour chacun, en raison d'une répartition de cette tâche entre trois officiers à bord ; que sur cette base, la cour d'appel leur a alloué le tiers du salaire d'un lieutenant augmenté des congés payés ;

Qu'en statuant ainsi, alors que MM. Y... et X... réclamaient également des sommes aux titres des heures supplémentaires, des repos compensateurs et congés payés afférents, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à ses décisions ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en leurs dispositions ayant limité les sommes allouées aux deux officiers à titre du salaire qui aurait dû être payé à l'officier manquant, les arrêts rendus le 20 février 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et signé par Mme Mazars, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément aux dispositions de l'article 456 du nouveau Code de procédure civile, en son audience publique du trente juin deux mille quatre.


Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes (2e chambre commerciale), 20 février 2002


Publications
Proposition de citation: Cass. Soc., 30 jui. 2004, pourvoi n°02-14361

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Composition du Tribunal
Président : Président : Mme MAZARS conseiller

Origine de la décision
Formation : Chambre sociale
Date de la décision : 30/06/2004
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 02-14361
Numéro NOR : JURITEXT000007465726 ?
Numéro d'affaire : 02-14361
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2004-06-30;02.14361 ?
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