AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu que Mme X... qui avait reçu l'investiture du Front National pour les élections régionales de mars 1992, s'était engagée par contrat du 3 février 1992, dans le cas où elle serait élue, à rembourser au parti la quote-part des dépenses non directement liées à la campagne dans sa circonscription mais engagées au plan national par le Front National relativement à l'élection à venir et s'élevant à la somme de 180 000 francs ; qu'après avoir exécuté cet engagement jusqu'en décembre 1996, elle a invoqué la nullité du contrat pour cause illicite et a sollicité le remboursement des sommes versées ;
Attendu que le Front National fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 12 novembre 2001) d'avoir fait droit à cette demande, alors, selon le moyen :
1 ) qu'en retenant que la cause de l'engagement du candidat était l'investiture du Front National et non la volonté de participer aux dépenses engagées par celui-ci au plan national pour permettre l'élection de ses candidats, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
2 ) que le fait que l'exercice effectif du mandat électoral obtenu sous l'étiquette du Front National ait été une condition de l'obligation du candidat de participer aux dépenses de campagne engagées au plan national n'impliquant en aucune manière que la cause réelle du contrat fût l'investiture du Front National, la condition stipulée étant tout à fait indépendante de la cause du contrat, la cour d'appel, en décidant le contraire, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1128, 1131 et 1134 du Code civil ;
3 ) en ne s'expliquant pas sur la lettre de Jean-Marie Le Y... (bi-mensuel du Front National) du 15 novembre 1991 et sur la liste des candidats du Front national aux élections régionales de mars 1992 dans le département du Haut-Rhin signée par M. Z..., en date du 16 janvier 1992, versées aux débats par l'exposante, dont il résultait qu'à la date du contrat conclu entre le Front National et Mme X... le 3 février 1992, celle-ci avait déjà reçu, comme les autres candidats aux élections régionales de mars 1992, l'investiture du Front National qui ne pouvait pas ainsi constituer la cause dudit contrat, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1128, 1131 et 1134 du Code civil ;
Mais attendu que c'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l'ambiguïté des termes de la convention du 3 février 1992 rendait nécessaire, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a estimé que la cause déterminante de cette convention n'était pas la participation du candidat aux dépenses électorales engagées au plan national par le Front National mais son investiture à une élection politique, laquelle formait avec la reconnaissance de dettes une opération unique et indivisible ; que la cour d'appel en a déduit à bon droit que le contrat qui était fondé sur une cause illicite devait être annulé ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association Front National aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille quatre.