AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société DMS que sur le pourvoi incident relevé par M. X..., liquidateur de la société Le Goff ;
Attendu, selon l'arrêt déféré (Rennes, 21 novembre 2001), que, par ordonnance du 18 septembre 2000, le juge-commissaire de la liquidation judiciaire de la société Le Goff a autorisé M. X..., liquidateur, à procéder, sur le fondement de l'article 156 de la loi du 25 janvier 1985, à la cession de gré à gré au profit de la société DMS de divers actifs de la société en liquidation ; que la société Cadiou, auteur d'une offre d'acquisition non retenue, a formé un recours contre cette ordonnance ;
que le tribunal a déclaré le recours recevable, a mis à néant l'ordonnance du juge-commissaire pour violation du principe de la contradiction et a renvoyé le liquidateur à régulariser la procédure auprès du juge-commissaire dans le cadre de l'article L. 622-17 du Code de commerce ; que la société DMS a relevé appel nullité et appel réformation de ce jugement ;
Sur les trois moyens réunis du pourvoi principal, pris en leurs diverses branches :
Attendu que la société DMS fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré son appel irrecevable, alors, selon le moyen :
1 / qu'une partie a intérêt à faire appel dès lors que ses prétentions n'ont pas été complètement accueillies ; que la société DMS, qui a succombé devant le tribunal puisque le jugement a annulé l'ordonnance du juge-commissaire qui autorisait la cession de gré à gré à son profit, avait bien intérêt à interjeter appel de cette décision ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 546 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que ne statue pas sur un recours contre une ordonnance du juge-commissaire rendue en application de l'article 156 de la loi du 25 janvier 1985, mais tranche une demande nouvelle, et partant est susceptible d'appel, le jugement qui ne se contente pas d'annuler l'ordonnance déférée en ce qu'elle a retenu l'offre d'un acquéreur, mais qui décide en outre que les parties devront présenter de nouvelles offres sur le nouveau fondement de l'article 155 de la loi applicable aux unités de production, et tranche pour la première fois une question de droit qui n'avait jamais été débattue devant le juge-commissaire ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 543 du nouveau Code de procédure civile et 173-1 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 623-5 du Code de commerce ;
3 / que l'acquéreur évincé n'a pas de prétention à faire valoir et n'a pas la qualité de partie à l'ordonnance du juge-commissaire qui autorise la vente d'une unité de production ou la cession de gré à gré ;
que, dès lors qu'il n'est pas non plus désigné par le juge-commissaire comme devant recevoir notification de l'ordonnance, l'acquéreur évincé n'est pas recevable à former un recours contre cette ordonnance ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 25 du décret du 27 décembre 1985 ;
4 / que l'appel-nullité est recevable en cas d'excès de pouvoir ou de méconnaissance d'un principe essentiel de procédure ;
qu'en déclarant irrecevable l'appel-nullité formé contre un jugement qui a accueilli le recours formé par un acquéreur évincé contre l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la cession au profit de la société DMS, la cour d'appel a violé l'article 173-1 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 623-5 du Code de commerce ;
Mais attendu que la société DMS, candidat repreneur évincé, n'avait aucune prétention à soutenir au sens des articles 4 et 31 du nouveau Code de procédure civile, de sorte que son appel était irrecevable ; que, par ce motif substitué à ceux de l'arrêt, la décision de la cour d'appel est légalement justifiée ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que M. X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en paiement de dommages-intérêts contre la société DMS pour appel abusif, alors, selon le moyen, que, dans ses conclusions, M. X..., ès qualités, avait fait valoir que l'appel abusif formé par la société DMS avait causé un préjudice à la liquidation judiciaire dès lors que, durant l'instance d'appel, il était tenu de payer sur les fonds disponibles, les loyers qui restaient dus pour éviter la résiliation des contrats de location, ces paiements diminuant d'autant les sommes à répartir entre les créanciers ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que rien ne permettait de caractériser le prétendu préjudice subi par la société en liquidation, la cour d'appel a répondu en les écartant aux conclusions prétendument délaissées ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Condamne la société DMS et M. X..., ès qualités, aux dépens afférents à leur pourvoi respectif ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société DMS à payer à la commune de Plovezet la somme de 1 800 euros et rejette les autres demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille quatre.