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02/06/2004 | FRANCE | N°02-17510

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 02 juin 2004, 02-17510


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X..., agent général d'assurance de la compagnie d'assurances vie Trieste et Venise, aux droits de laquelle se trouve la compagnie Generali France assurances vie (la compagnie Generali) a conçu en 1967 le contrat d'assurance-groupe-emprunteur des Banques populaires, que sa mandante a placé auprès de ces banques après s'être engagée envers son agent à ne pas accepter la reprise de tels contrats par un autre agent ou courtier, même s'il produisait un ordre de

remplacement exclusif ; qu'afin de pouvoir prospecter, commercialiser ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X..., agent général d'assurance de la compagnie d'assurances vie Trieste et Venise, aux droits de laquelle se trouve la compagnie Generali France assurances vie (la compagnie Generali) a conçu en 1967 le contrat d'assurance-groupe-emprunteur des Banques populaires, que sa mandante a placé auprès de ces banques après s'être engagée envers son agent à ne pas accepter la reprise de tels contrats par un autre agent ou courtier, même s'il produisait un ordre de remplacement exclusif ; qu'afin de pouvoir prospecter, commercialiser et placer, sans exclusivité territoriale les contrats-groupe auprès des banques populaires, M. X... a changé de statut pour cette activité et créé en 1977 le cabinet de courtage Jacques X... (SCADA) et, en 1985, la société X... et fils, la compagnie Generali lui cédant, au prix de son indemnité compensatrice d'agent général à laquelle elle se substituait, l'entière propriété du portefeuille des Banques populaires ;

que la SCADA et la société X... et fils (les sociétés X...) ont bénéficié de l'exclusivité du placement des contrats-groupe des Banques populaires auprès de Generali jusqu'à la résiliation du contrat-groupe par l'une de ces banques en 1996, suivie, la même année, de la résiliation d'un second contrat et de la dénonciation par Generali à la société X... de tout engagement d'exclusivité relatif aux contrats des Banques populaires ; qu'au cours des trois années 1996 à 1998, quinze Banques populaires ont ainsi résilié leurs contrats auprès de la compagnie Generali, laquelle a délivré à quatorze de ces mêmes banques des contrats de remplacement par l'intermédiaire du Cabinet Besse ou de la Société de courtage de l'Est, sociétés de courtage dépendant du réseau des Banques populaires et qui rétrocédaient à leurs mandantes les commissions de courtage ; que les sociétés X... ont assigné la compagnie Generali pour la faire condamner à résilier les nouveaux contrats souscrits par les Banques populaires et à les réintégrer par un ordre de placement exclusif à leur profit, ainsi qu'à leur régler les commissions sur prime ; que le Syndicat français des assureurs conseils (SFAC) est intervenu volontairement à l'instance pour s'associer aux demandes des courtiers ; que l'arrêt attaqué (Paris, 26 mars 2002) a condamné la compagnie Generali à payer diverses sommes aux sociétés X... en réparation de leurs pertes de chance respective de garder en portefeuille les huit contrats-groupe des Banques populaires résiliés à l'échéance du 31 décembre 2000 par l'assureur et a rejeté toutes autres demandes ;

Sur le premier moyen, pris en ses sept branches, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe :

Attendu que, recherchant la commune intention des parties, l'arrêt, relève que M. X..., qui a reconnu, par lettre du 13 décembre 1976, que son portefeuille d'agent général de la compagnie Generali était transformé sur sa demande en portefeuille de courtage, et qui s'est soumis expressément aux usages du courtage excluant tout engagement de non-remplacement et d'exclusivité, a transféré sans restriction ni réserve l'entière et libre disposition du portefeuille faisant l'objet des cessions intervenues en 1977 et 1981, lesquelles ne reprenaient pas les engagements de non-remplacement et d'exclusivité pris à son égard en sa qualité d'agent général par l'assureur dans sa lettre du 17 juin 1968 de tels engagements étant contraires dans leur mécanisme aux principes du courtage d'assurances qui impliquent tant la liberté du donneur d'ordre de choisir son courtier qui est son mandataire et non celui de la compagnie, que la neutralité de l'assureur face au choix de l'assuré et alors que les contrats de groupe n'eussent pu, en tout état de cause, être inclus à ces cessions s'ils avaient été prospectés par M. X... en qualité de courtier agissant hors de la circonscription dans laquelle il était mandaté ; que l'arrêt, procédant à une interprétation de la lettre du 18 novembre 1991 annexée au protocole du 20 novembre de la même année rendue nécessaire par les termes des lettres de dénonciation et des réponses adressées par la compagnie Generali à des courtiers

concurrents, retient, sans se contredire, qu'il existait un accord de partenariat tacite et informel entre les parties, de telle sorte qu'en contrepartie du maintien des contrats de groupe des Banques populaires chez elle, la compagnie Generali protégeait contre les offensives de la concurrence les sociétés X... qui étaient devenues mandataires de ces banques et qui, ayant l'entière disposition de leur portefeuille d'assurance, pouvaient les replacer chez des assureurs concurrents ; que le moyen, inopérant en sa première branche n'est fondé en aucune de ses six autres branches ;

Sur les deuxième et troisième moyens, pris en leurs diverses branches, tels qu'énoncés au mémoire en demande et reproduits en annexe :

Attendu que l'arrêt retient, d'abord, que à supposer que les engagements de non-remplacement et d'exclusivité pris par la compagnie Generali en 1968 aient été indissolublement attachés au portefeuille de contrats de groupe des Banques populaires et à la personne de M. X... ou de ses sociétés, il s'agirait alors d'engagements à durée indéterminée, donc résiliables à tout moment par l'une des parties et, ensuite que le désaccord qui s'est élevé au cours de l'année 1996 entre l'assureur et les sociétés de courtage sur les méthodes de traitement et de gestion informatique des contrats de groupe, les prétentions exorbitantes de ces dernières quant aux "royalties futures" découlant de l'adoption de leur logiciel ainsi que les pressions exercées sur les clientes qui s'en étonnaient auprès de l'assureur, justifiaient la dénonciation de l'accord de partenariat par l'assureur et constituait un motif légitime de dénonciation de celui-ci qui n'emportait en tout état de cause aucune obligation de résultat à la charge de la compagnie Generali ; qu'il résulte, enfin, de l'arrêt, qui écarte par des constatations souveraines toute collusion entre l'assureur et les banques, que le préjudice allégué par les sociétés X... résultait de la perte de leurs mandats sur les contrats de groupe souscrits par les banques populaires, de sorte que la cour d'appel a pu écarter toute l'imputabilité de ce préjudice à la compagnie Generali ; que, répondant ainsi aux conclusions prétendument délaissées, la cour d'appel qui, sans procéder par voie de simple affirmation, a caractérisé un motif légitime dispensant la compagnie Generali d'assortir d'un préavis, la dénonciation d'un accord de partenariat dont elle a pu estimer qu'il en constituait qu'une simple protection offerte par la compagnie Generali contre les offensives de la concurrence constitutive d'une simple obligation de moyens, a légalement justifié sa décision ; que le deuxième moyen, qui ne peut être accueilli en ses deux premières branches, n'est pas fondé en sa troisième et que le troisième moyen, qui ne peut être accueilli en ses première et cinquième branches, n'est pas fondé en ses autres griefs ;

Sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe :

Attendu que l'arrêt, qui se fonde sur le troisième usage du courtage et écarte l'existence d'une convention contraire à cet usage dans la mesure où les versements dont a bénéficié l'une des sociétés X... après la résiliation des contrats de groupe d'une des banques populaires détenus par l'autre société X... étaient dépourvus de force probante s'agissant de sociétés de courtage ayant le même dirigeant, décide exactement, hors la dénaturation alléguée de la convention d'assurance de groupe "garantie de prêt", que ce contrat de groupe n'était pas une somme d'assurances individuelles dépendantes d'une convention cadre dès lors que les adhérents étaient dépourvus de qualité pour résilier le contrat de groupe conclu entre le souscripteur et l'assureur pour en fixer les conditions, ainsi que pour révoquer le mandat du courtier, et que le contrat de groupe avait pour objet de permettre au souscripteur de s'assurer contre le risque d'insolvabilité de ses emprunteurs en faisant supporter à ces derniers le coût final des primes dont la perception par l'assureur postérieurement à la résiliation du contrat constituait la contrepartie nécessaire de maintien des garanties qu'il devait contractuellement assumer après la cessation de l'assurance, laquelle ne coïncidait pas dans ce cas avec la cessation des garanties ;

que la cour d'appel n'ayant pas à répondre à des conclusions que ses motifs rendaient inopérants, le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Sur le cinquième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe :

Attendu que la cour d'appel, répondant aux conclusions prétendument délaissées, retient que le préjudice subi par les sociétés X... consistait en la perte de chance de garder en portefeuille les huit contrats de groupe litigieux, s'ils n'avaient pas été résiliés à l'échéance par l'assureur, dont l'initiative, si elle n'avait pas provoqué le processus de désengagement irréversible des Banques populaires auprès de leurs anciennes sociétés de courtage entamé dès 1996, en avait accéléré le processus ; que réparant le préjudice au titre d'une perte de chance par l'allocation d'une somme dont elle a souverainement évalué le montant, la cour d'appel a fait une exacte application du principe de la réparation intégrale du dommage ; qu'infondé en sa première branche, le moyen ne peut être accueilli en sa seconde ;

Et sur le sixième moyen, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe :

Attendu que la cour d'appel s'est livrée à un examen effectif des moyens en répondant aux conclusions dont elle était saisie et dont elle a apprécié la pertinence en analysant spécialement les lettres de la compagnie Generali à M. X... des 17 juin 1968 et 23 septembre 1996, ainsi que les conventions de cession de portefeuille de 1977 et 1981 n'encourt pas la critique du moyen ; que celui-ci ne peut donc être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Cabinet Jacques X... et la société Jacques X... et fils aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Cabinet Jacques X... et la société Jacques X... et fils à payer à la société Generali France assurances vie la somme de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux juin deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 02-17510
Date de la décision : 02/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (7e Chambre, Section A), 26 mars 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 02 jui. 2004, pourvoi n°02-17510


Composition du Tribunal
Président : Président : M. LEMONTEY

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:02.17510
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