AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Rennes, 9 octobre 2001) d'avoir dit que M. X..., engagé en 1978 en qualité de technicien par la société Cit Alcatel et titulaire de mandats syndicaux de 1992 à 2000, n'avait fait l 'objet d'aucune discrimination syndicale de la part de son employeur et d'avoir en conséquence rejeté ses demandes de rappel de salaires et de congés payés afférents, alors, selon le moyen :
1 / qu'il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions, notamment en matière de formation professionnelle et d'avancement ; qu'en l'espèce, et alors qu'il n'était pas contesté que M. X... avait connu une évolution de carrière particulièrement lente par rapport aux autres salariés de l'entreprise bénéficiant d'un niveau d'étude et d'une ancienneté similaires, la cour d'appel s'est, pour dire que le salarié n'avait fait l'objet d'aucune discrimination syndicale, bornée à dire que cette situation était justifiée par son absence de souhait sur le plan de ses activités professionnelles, ainsi que par son absence de production, "dans la mesure où il consacre plus de 90 % de son temps à ses occupations syndicales", qu'en justifiant ainsi la différence de traitement dont M. X... était l'objet par l'importance du temps de travail consacré à ses activités syndicales, la cour d'appel a violé l'article L. 412-2 du Code du travail ;
2 / qu'en présence d'éléments de faits susceptibles de caractériser une atteinte au principe d'égalité de traitement, il incombe à l'employeur qui conteste le caractère discriminatoire du traitement réservé au salarié syndicaliste, d'établir que la disparité de situation constatée par les juges du fond est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur l'appartenance à un syndicat , qu'en estimant que la disparité de situation constatée au préjudice du salarié trouvait son fondement dans les bilans de fins d'année établis par l'employeur qui dénotaient chez lui "un déficit manifeste de motivation", ainsi que dans son manque d'intérêt pour les projets traités au sein du groupe, la cour d' appel n'a, en statuant de la sorte, relevé aucun élément objectif susceptible de justifier l'appréciation portée par la société Alcatel Cit sur les qualités professionnelles de M. X..., privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 412-2 du Code du travail ;
3 / qu'enfin, que dans ses écritures d'appel, le salarié soutenait n'avoir bénéficié que de 60 heures de formation depuis 1992, contre 240 heures pour la période allant de 1988 à 1992, et ceci malgré les demandes régulièrement adressées en ce sens, chaque année, auprès de son employeur ; qu'en jugeant dès lors que M. X... avait manifesté une absence de souhait particulier sur le plan de la formation, sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si la société Alcatel Cit n'avait pas, depuis 1992, systématiquement refusé à l'intéressé le bénéfice de formations qualifiantes, la cour d'appel n'a pas répondu au moyen pertinent soulevé par le salarié dans ses conclusions, violant l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'abstraction faite du motif critiqué dans la première branche du moyen et qui est surabondant, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre le demandeur dans le détail de son argumentation, a retenu, par motifs propres et adoptés, d'une part, que la différence de traitement du salarié par rapport à d'autres se trouvant dans des situations comparables était antérieure à l'exercice des mandats syndicaux, lesquels ne l'avaient pas privé du bénéfice d'une progression de carrière normale, d'autre part, que cette différence de traitement, préexistant aux mandats, reposait sur des raisons objectives, tenant aux compétences professionnelles de l'intéressé et exclusives de toute discrimination liée à l'appartenance à un syndicat ou à l'exercice d'une activité syndicale ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille quatre.