AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Met, sur sa demande, hors de cause la Société générale, à l'encontre de laquelle n'est dirigé aucun des griefs du pourvoi ;
Attendu que par acte du 23 mars 1990, publié au Registre public de la cinématographie et de l'audiovisuel (RPCA), la société Thames télévision international limited (TTI) a concédé à la société GSO une licence exclusive d'exploitation cinématographique, télévisuelle et vidéographique du film "Danny, the champion of the world" pour divers pays dont la France, la diffusion par satellite étant toutefois exclue ; que des clauses de la convention subordonnaient toute sous-licence ou cession à l'accord écrit et préalable du concédant ; que le 15 novembre 1991, en méconnaissance de ces stipulations, la société Génération films, devenue Studio Canal + services, et aujourd'hui Studio Canal image, a conventionnellement obtenu de la société GSO les droits d'exploitation télévisuelle du film en France par câble et voie hertzienne, avant de les céder le 12 décembre 1991 à la société Canal + pour diffusion par câble et satellite ; que, par arrêt du 20 décembre 1994, la cour de Paris a prononcé la nullité des contrats des 15 novembre et 12 décembre 1991 et condamné in solidum les sociétés Studio Canal + services et Canal + à 210 000 francs de dommages-intérêts envers la société TTI ; que cette décision a été cassée (première chambre civile 18 novembre 1997, Bulletin n° 316), en ce qu'elle n'avait pas recherché si la consultation du RPCA par les deux sociétés condamnées n'avait pas constitué une vérification suffisante de nature à justifier leur croyance légitime dans la validité des droits cédés, la publication de ces derniers étant la condition de leur opposabilité ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, tel qu'exposé au mémoire en demande et reproduit en annexe :
Attendu que pour dire les clauses du contrat du 23 mars 1990, subordonnant toute sous-licence ou cession à l'accord écrit et préalable de la société TTI, opposables à la société Studio Canal + services, l'arrêt attaqué, statuant sur renvoi après cassation (première chambre civile, 18 novembre 1997, Bull. n° 316), a relevé qu'elle n'avait sollicité du conservateur du registre que des extraits de l'acte, négligeant ainsi la faculté ouverte par l'article 37 du Code de l'industrie cinématographique à toute personne intéressée d'en obtenir délivrance intégrale, sans qu'il soit justifié d'une pratique professionnelle tenant pour suffisante la consultation d'extraits, laquelle ne saurait aller contre l'opposabilité des droits afférents à un film dès le jour de leur dépôt, spécifiquement prévue à l'article 33 du même Code ; qu'ayant énoncé, en outre, que la société Studio canal+ services n'avait pu se satisfaire de la mention figurant au contrat du 15 novembre 1991 selon laquelle la société GSO déclarait disposer sans restriction ni réserve des droits cédés, elle a légalement justifié sa décision sur ce point ;
Mais sur la seconde branche du même moyen :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que pour dire établies la mauvaise foi et la complicité de la société Studio Canal + services dans la violation des obligations contractuelles de la société GSO envers la société TTI, la cour d'appel relève exclusivement une lettre par laquelle celle-ci, le 19 février 1992, informe la société Canal + d'un contentieux consécutif à sa décision de résilier le contrat du 23 mars 1990 ; qu'en statuant par ce motif, qui, par son fond et par sa date, n'implique en rien la société Studio Canal + services, elle a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
Et sur le second moyen pareillement exposé et reproduit :
Vu l'article 1153 du Code civil ;
Attendu que, pour débouter la société Studio Canal + services de sa demande en paiement des intérêts de retard, jamais acquittés, dus depuis la 26 février 1998, date de signification de l'arrêt de la Cour de Cassation ayant mis à néant sa condamnation exécutée à verser la somme de 210 000 francs de dommages-intérêts, la cour a énoncé que sa demande n'est pas justifiée dès lors qu'elle succombe dans ses prétentions ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher ni prendre en considération les montants ainsi indûment conservés, elle a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné, in solidum avec la société Canal +, la société Studio Canal+ services au titre de sa mauvaise foi, et en ce qu'il a écarté la demande formée par cette même société en paiement des intérêts de retard à l'encontre de la société LTT en paiement des intérêts de retard inhérents à l'inexécution de son obligation de restituer une somme perçue au titre d'une décision cassée, toutes autres dispositions étant expressément maintenues, l'arrêt rendu le 20 juin 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette toutes les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille quatre.