AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à Mme X... de ce qu'elle s'est désistée de son pourvoi en tant que dirigé contre la Caisse primaire d'assurance maladie du Loiret ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 29 avril 2002), et les productions, qu'un collège d'experts a été désigné pour rechercher s'il existait un lien de causalité entre l'injection de vaccins contre l'hépatite B, fournis par la société Pasteur vaccins, et la maladie développée ultérieurement par Mme X... ; que la société Pasteur vaccins a sollicité la récusation de l'expert Y..., en soutenant, notamment, que les tierce oppositions qu'il avait formées à l'encontre d'arrêts rendus par une autre cour d'appel qui avait prononcé sa récusation à l'occasion d'un autre litige l'opposant à une personne vaccinée, constituaient un procès entre celui-ci et elle-même, et que par la publication d'articles, il avait publiquement pris parti sur l'une des questions relevant de sa mission d'expertise ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir désigné un autre expert, alors, selon le moyen :
1 / qu'une partie ne peut utilement invoquer, pour obtenir la récusation d'un technicien, l'existence d'un procès dont elle a pris l'initiative et qui trouve son origine dans une mesure d'instruction confiée au même technicien dans un litige similaire ; qu'en retenant, pour faire droit à la demande de récusation de la société Pasteur vaccins, qu'à l'appui de la tierce opposition formée à l'encontre de l'arrêt rendu le 15 novembre 2000 par la cour d'appel de Versailles, M. Y... avait non seulement contesté sa récusation mais encore demandé la publication de la décision et l'indemnisation de ses frais irrépétibles, quand ces prétentions trouvaient toutes leur origine dans la mission d'expertise litigieuse, la cour d'appel a violé les articles 234 et 341-4 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / qu'en se bornant à retenir, pour prononcer la récusation du M. Y..., que ce dernier avait, à l'appui de la tierce opposition formée à l'encontre de l'arrêt rendu le 15 novembre 2000 par la cour d'appel de Versailles, contesté sa récusation et demandé la publication de la décision et l'indemnisation de ses frais irrépétibles, sans expliquer en quoi cette circonstance pouvait faire naître un doute sur l'objectivité de l'expertise, qui était confiée à un collège d'experts dont M. Y... n'était qu'un des membres, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 234 du nouveau Code de procédure civile et 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3 / que l'impartialité d'un technicien ne peut être mise en doute que s'il existe des raisons de craindre qu'il manque à son devoir d'impartialité et de neutralité ; que si l'exigence d'impartialité interdit au technicien d'avoir un préjugé en faveur de l'une des parties, elle ne fait nullement obstacle à ce qu'il ait, avant sa désignation, émis un avis général sur la question scientifique qui fait l'objet de sa mission ; qu'en retenant, pour faire droit à la demande tendant à la récusation de M. Y..., que ce dernier avait publié des articles dans lesquels il exposait que l'absence de lien entre la vaccination contre l'hépatite B et les complications qui lui sont imputées n'était pas établie et que la pertinence de la campagne de vaccination organisée en France était discutable, ce qui ne préjugeait en rien de son avis sur le cas particulier de Mme X..., la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant, violant les articles 234 du nouveau Code de procédure civile et 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4 / qu'en retenant que la société Pasteur vaccins était en droit de mettre en doute l'objectivité de M. Y... en raison de ses publications, tout en constatant que celui-ci n'avait fait état ni des marques de vaccin contre l'hépatite B, ni des noms de laboratoires les fabriquant et, qu'en s'interrogeant sur le point de savoir si les personnes vaccinées n'avaient pas été induites en erreur sur le bénéfice individuel qu'elles pouvaient en escompter, faute de travail épidémiologique préalable permettant de justifier l'intérêt d'une campagne de vaccination systématique, il ne visait que les autorités sanitaires, la cour d'appel a violé les articles 234 du nouveau Code de procédure civile et 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que la cour d'appel, après avoir relevé qu'il ressortait des prises de position publiques de M. Y..., de surcroît à caractère polémique, que celui-ci avait fait part de son opinion sur l'absence d'études épidémiologiques sérieuses préalables à l'administration systématique de la vaccination contre l'hépatite B, allant jusqu'à émettre l'idée que les personnes vaccinées pouvaient estimer avoir été victimes d'une publicité abusive, a pu considérer que la société Pasteur vaccins était en droit de mettre en cause l'objectivité de M. Y..., ce qui justifiait sa récusation ;
Que par ce seul motif, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Pasteur vaccins ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille quatre.