AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. X... de Y... de la Z... et à Mme X... de Y... de la Z..., épouse A..., de ce que, en tant qu'héritiers de Marie-Antoinette B..., épouse de Y... de la Z..., décédée le 1er octobre 2002, ils reprennent l'instance introduite par celle-ci ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société B... et fils (la société), constituée en 1948 entre Paul B... et ses enfants, Pierre et Marie-Antoinette, épouse de Y... de la Z..., avait pour objet l'exploitation d'une usine de fabrication de feutres appartenant à Paul B... ; qu'à cet effet, ce dernier a, par acte du 7 février 1949, consenti à la société un bail d'immeuble portant sur les locaux industriels et un contrat de location-gérance du fonds de commerce ; qu'après le décès de Paul B..., ses héritiers ont, le 3 juillet 1958, cédé à la société l'ensemble du mobilier et du matériel d'exploitation ; que le 6 janvier 1964, le bail consenti en 1949 a été renouvelé ; que Pierre B... est décédé en 1977, laissant pour héritiers ses enfants, Mme Marie-Coralie B..., épouse C... de D..., et M. Georges-Paul B..., qui est devenu gérant de la société ; que par acte du 28 décembre 1989, Mme de Y... de la Z... a cédé à ce dernier la totalité des parts qu'elle détenait dans le capital de la société ;
que par acte du 19 décembre 1989, la société a cédé à la société Feutres Depland son activité feutres vélins incluant la moitié des droits dont elle était titulaire dans un procédé pour lequel une demande de brevet avait été déposée le 21 avril 1989 ; que Mme de Y... de la Z..., soutenant que cette cession l'avait spoliée de la valeur du fonds de commerce dont elle avait conservé la copropriété indivise, a demandé que la société et M. B... soient condamnés à lui payer la moitié du prix de cession ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 141-5 et L. 144-1 du Code de commerce ;
Attendu que pour rejeter les demandes de Mme de Y... de la Z..., l'arrêt retient que la société est devenue propriétaire du mobilier et du matériel d'exploitation en 1958 et que le bail du 6 janvier 1964 ne portait donc plus que sur l'immeuble, la clientèle et le nom commercial et non pas sur un fonds de commerce ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le bail ayant pour objet la clientèle et le nom commercial porte nécessairement sur le fonds de commerce, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur la troisième branche du moyen :
Vu les articles L. 141-5 et L. 144-1 du Code de commerce ;
Attendu que l'arrêt retient encore que la société n'avait pas vendu tout ou partie du fonds de commerce donné en location-gérance mais une partie de son activité qu'elle avait développée à la suite d'un brevet qu'elle avait déposé au mois d'avril 1989 ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la société s'était, dans cette activité, constitué une clientèle propre et distincte de celle du fonds de commerce donné en location-gérance, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur la quatrième branche du moyen :
Vu les articles L. 141-5 et L. 144-1 du Code de commerce ;
Attendu que l'arrêt retient enfin que, même à supposer que le fonds de commerce ait existé, il résulte d'une étude réalisée à la demande de Mme de Y... de la Z... qu'il avait une valeur nulle ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle constatait que la société avait cédé une partie de son activité pour le prix de 2 400 000 francs et sans rechercher si l'activité cédée était distincte de celle du fonds de commerce donné en location-gérance, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 mars 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;
Condamne la société B... et fils et M. B... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette leur demande ; les condamne à payer à M. X... de Y... de la Z... et à Mme X... de Y... de la Z..., épouse A..., la somme globale de 1 800 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille quatre.