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31/03/2004 | FRANCE | N°02-15268

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 31 mars 2004, 02-15268


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt déféré (Toulouse, 27 mars 2002), que M. X..., soutenant être titulaire de droits d'auteur sur un certain nombre de modèles de luminaires, et la société J. P. X... (société X...), se déclarant cessionnaire de ces modèles, ont poursuivi judiciairement la société Pierre Vergnes (société Vergnes ) et la société Peroni en contrefaçon de modèles et en concurrence déloyale ;

Sur le premier moyen, pris en ses quatre b

ranches :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en contre...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt déféré (Toulouse, 27 mars 2002), que M. X..., soutenant être titulaire de droits d'auteur sur un certain nombre de modèles de luminaires, et la société J. P. X... (société X...), se déclarant cessionnaire de ces modèles, ont poursuivi judiciairement la société Pierre Vergnes (société Vergnes ) et la société Peroni en contrefaçon de modèles et en concurrence déloyale ;

Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en contrefaçon de modèles, alors, selon le moyen,

1 / que l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous et peut en rapporter la preuve par tous moyens ; que Jean-Pierre X... et la société X... faisaient valoir, dans leurs écritures d'appel, sans être contredits, que, créée en 1947, elle avait été présidée depuis cette date et jusqu'en 1998 par Jean-Pierre X... qui avait créé des modèles de luminaires dont il avait cédé les droits d'exploitation à la société Jean-Pierre X..., que la société des établissements Vergnes ne pouvait contester avoir parfaitement connu la société Jean-Pierre X... et les modèles litigieux pour les avoir achetés à la société Jean-Pierre X... durant plusieurs années en vue de les commercialiser, qu'après avoir été cliente de la société X..., la société Vergnes avait supprimé ses commandes mais avait continué de diffuser un certain nombre de modèles et appliques qui étaient la contrefaçon de ceux qu'elle exploitait et qui étaient copiés dans les catalogues de la société X... ; que la preuve de la création antérieure par Jean-Pierre X... provenait des catalogues et des tarifs de la société Jean-Pierre X..., qui n'avaient jamais été contestés et établissaient par eux-mêmes, indépendamment des plans, l'antériorité des modèles dessinés par Jean-Pierre X... ; qu'en se bornant à énoncer que le nombre des plans ne correspondait pas à celui des modèles revendiqués, que les paraphes figurant sur ces plans et présentés comme étant l'oeuvre de Jean-Pierre Y... étaient très dissemblables de la signature de Jean-Pierre X... figurant sur d'autres documents, qu'un doute sérieux subsistait également quant à leur date, sans se livrer à aucun rapprochement entre ces documents et les catalogues et listes, de prix versés aux débats et afférant, pour les catalogues, aux années 82, 83, 84, 93 et 95, pour les tarifs aux années 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95 et 96, et pour les catalogues de luminaires de la collection Louisiane de X... à ceux de septembre 1984 et décembre 1989, et donc sans s'expliquer sur ces éléments de preuves au regard de chacun des modèles contrefaits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 111-1 et L. 511-1 du Code de la propriété intellectuelle ;

2 / que, de même, avaient été versées aux débats des factures des établissements X... aux établissements Vergnes qui établissaient, qu'entre 1989 et 1993, avaient été commandés par ces derniers, commande du 23 septembre 1989, le modèle référencé 26.879 H (1), commande du 16 novembre 1989 les modèles référencés 16.482 (2) et 26.512 (3), commande du 26 novembre 1990 le modèle référencé 16.659 (1), la commande du 6 novembre 1991, les modèles référencés 26.844 25 C (2), 26.73918CA 19 (2), 26.879 160 (2), 18.959 (1), facture du 24 décembre 1993, le modèle référencé 46.359.4VAL (1), et que le constat d'huissier faisait apparaître que le modèle référencé 26.879H était référencé aux établissements Vergnes 302.130, le modèle référencé 16.482 était référencé aux établissements Vergnes 412.530, le modèle référencé 26.512 était référencé aux établissements Vergnes 301.130, le modèle référencé 16.659 était référencé aux établissements Vergnes 403.530, le modèle référencé 26.844.25C était référencé aux établissements Vergnes 314.100, le modèle référencé 26.739 était référencé aux établissements Vergnes 201.120, le modèle référencé 26.879 était référencé aux établissements Vergnes 302.1330, le modèle référencé 18.959 était référencé aux établissements Vergnes 428.550, le modèle référencé 63.359 était référencé aux établissements Vergnes 601.620 ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué, qui n'en fait aucune mention, que ces pièces n'ont fait l'objet d'aucun examen par les juges d'appel ; qu'en omettant de s'expliquer sur ces preuves déterminantes, la cour d'appel a méconnu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / que la preuve de la propriété intellectuelle peut être faite par tous moyens, y compris par les déclarations des salariés d'une entreprise ; que, dans son attestation du 3 décembre 1997, M. Antoine Z... écrivait ; "Je..., employé par les établissements X... depuis le 29 novembre 1971 certifie que les plans que je dresse en vue de la fabrication de modèles de luminaires ou autres produits depuis de nombreuses années se sont toujours basés sur les dessins de modèles créés par M. Jean-Pierre X... ; il s'agit notamment des modèles copiés par la société Vergnes" ; qu'en écartant cette attestation au simple motif que M. Z..., salarié de la société X..., s'était borné à affirmer que "la fabrication des luminaires de la société X... s'est toujours basée sur les dessins de modèles réalisés par Jean-Pierre X...", la cour d'appel qui a dénaturé cette attestation en en réduisant la porté a violé l'article 1134 du Code civil ;

4 / que, s'agissant des modèles portant les références 18.709/5, 28.151 H, 38, 152 18 CA 15, 17.908 H 18 A, 30.D 27 A, 29668 (87CA), 29.146 (49 D 27), 18.037, 29.128 (29.128 LFI), M. X... faisait valoir dans ses conclusions signifiées le 4 janvier 2002 (point 7) qu'ils avaient tous fait l'objet de dépôt auprès de l'INPI et que la publicité de ces modèles avait été demandée à l'INPI et effectuée ; qu'en omettant de se prononcer sur ce moyen des conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 111-1 et L. 511-1 du Code de la propriété intellectuelle, méconnu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu en premier lieu, qu'ayant relevé que les modèles revendiqués avaient été créés antérieurement par des tiers et que certains d'entre eux étaient tombés dans le domaine public, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle écartait, a pu statuer comme elle a fait ;

Attendu en deuxième lieu, que c'est sans dénaturer l'attestation de M. Z..., que la cour d'appel a estimé que ce document était insuffisant à apporter la preuve des droits d'auteur de M. X... sur les modèles litigieux ;

Attendu enfin, que M. X... n'est pas fondé à reprocher à la cour d'appel d'avoir omis de répondre aux conclusions selon lesquels il faisait valoir que certains modèles avaient fait l'objet d'un dépôt auprès de l'INPI, dès lors que ces dépôts qui auraient été effectués au nom de la société X..., ne permettaient pas d'établir la qualité d'auteur de M. X... sur les modèles litigieux ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur les deuxième et troisième moyens, pris en leurs diverses branches, réunis :

Attendu que la société X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en contrefaçon de modèles créés par M. X..., alors selon le moyen,

1 / que, en l'absence de revendication du ou des auteurs d'une oeuvre, l'exploitation de l'oeuvre par une personne morale sous son nom, fait présumer, à l'égard des tiers recherchés pour contrefaçon, que cette personne est titulaire sur l'oeuvre, qu'elle soit ou non collective, du droit de propriété incorporelle de l'auteur ; qu'en décidant que la société Jean-Pierre X... ne pouvait se prévaloir d'aucun droit sur les modèles contrefaits dont elle assurait l'exploitation, cependant que ces modèles ne faisaient l'objet d'aucune revendication de leurs auteurs, la cour d'appel a violé l'article L. 113-5 du Code de la propriété intellectuelle ;

2 / que sont inopérantes, au regard de l'article L. 113-5 du Code de la propriété intellectuelle, les énonciations suivant lesquelles la société Vergnes rapporterait, par les catalogues produits, la preuve de la prétendue antériorité des modèles fabriqués par des sociétés étrangères, dès lors que ces sociétés n'ont jamais revendiqué ces modèles en qualité d'auteur ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué est privé de base légale au regard des textes susvisés ;

3 / que ces motifs vagues et imprécis, qui n'analysent aucun des catalogues produits et qui se rapportent à l'ensemble des modèles argués de contrefaçon, sans cependant démontrer, à propos de chacun d'entre eux, qu'il est tombé dans le domaine public ou qu'il est effectivement la propriété d'un tiers, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 111-1 et L. 511-1 du Code de la propriété intellectuelle ;

4 / que, dès lors qu'aucune des sociétés prétendument créatrices de certains des modèles argués de contrefaçon n'en a revendiqué la propriété, l'exploitation de ces modèles par la société JP X... faisait présumer qu'elle en était propriétaire ; que, dès lors, est inopérante l'énonciation que les modèles revendiqués étaient largement commercialisés par la concurrence ; qu'en rejetant la prétention de la société JP X... pour les motifs sus-rappelés, la cour d'appel a violé l'article L. 113-5 du Code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu que, dès lors qu'elle constatait que les modèles litigieux étaient antériorisés ou tombés dans le domaine public, ce dont il résultait que ceux-ci ne présentaient aucun caractère original susceptible d'être protégés par le droit d'auteur, la cour d'appel a pu en déduire que la société X... qui dans ses conclusions d'appel n'a pas contesté ces antériorités, ne pouvait se prévaloir de droit privatif sur ces modèles ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches;

Attendu que M. X... et la société X... reprochent à l'arrêt leur condamnation au paiement de dommages-intérêts pour actions abusives, alors, selon le moyen,

1 / que la censure qui sera prononcée sur le fondement du moyen de cassation précédent emportera, par voie de conséquence et en application de l'article 625 du nouveau Code de procédure civile, la censure de ce chef de l'arrêt attaqué ;

2 / que la preuve par témoin étant légalement admise, ne commet aucune faute le demandeur qui sollicite des témoignages ou attestations émanant de tiers au litige et susceptibles de rapporter la preuve de sa prétention alors surtout que ces témoignages ou attestations ne comportent aucun dénigrement de la partie défenderesse ; qu'il s'ensuit que le témoignage du président de la chambre syndicale des céramistes, M. A..., qui s'est borné à faire l'éloge professionnel de Jean-Pierre X... et a attesté qu'il était connu, dans ces catalogues depuis 1959, comme "créateur de luminaires au sein des métiers d'art" a été à tort analysé par la cour d'appel comme une faute ayant causé un préjudice aux sociétés défenderesses ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 1382 du Code civil et 199 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'une part, que dès lors que le moyen précédent a été rejeté, le présent moyen doit l'être également ;

Attendu d'autre part, que le moyen qui, en sa seconde branche, critique un motif surabondant de l'arrêt ne saurait être accueilli ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société X..., et M. J.P. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société J.P. X... et M. J.P. X... à payer à la société Etablissements Pierre Vergnes la somme de 3 000 euros ;

Les condamne à une amende civile de 1 000 euros envers le Trésor public ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 02-15268
Date de la décision : 31/03/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse (2ème chambre civile, 1ère section), 27 mars 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 31 mar. 2004, pourvoi n°02-15268


Composition du Tribunal
Président : Président : M. TRICOT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:02.15268
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