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31/03/2004 | FRANCE | N°02-14902

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 31 mars 2004, 02-14902


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 20 février 2002), que la société Striebig AG, qui fabrique des scies verticales, avait confié la distribution de ses produits en France à la société X... (la société X... SA), devenue la SAS X..., dont le président-directeur général est M. X... ; qu'ayant décidé par la suite d'assumer directement cette commercialisation par le canal de sa filiale, la SARL Striebig, elle a passé avec son ancien concession

naire une convention autorisant celui-ci à faire usage de la marque "Striebig...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 20 février 2002), que la société Striebig AG, qui fabrique des scies verticales, avait confié la distribution de ses produits en France à la société X... (la société X... SA), devenue la SAS X..., dont le président-directeur général est M. X... ; qu'ayant décidé par la suite d'assumer directement cette commercialisation par le canal de sa filiale, la SARL Striebig, elle a passé avec son ancien concessionnaire une convention autorisant celui-ci à faire usage de la marque "Striebig", entre-temps déposée, jusqu'au 1er juillet 2000 ; qu'après cette échéance, les société Striebig AG et Striebig ont poursuivi M. X... et la société X... des chefs de contrefaçon de marque et concurrence déloyale, en demandant qu'il leur soit interdit d'utiliser les marques "X..." et "Striebig", de restreindre l'utilisation du nom patronymique X..., de les empêcher d'utiliser des documents commerciaux proches des leurs, et de commercialiser une scie verticale "Prestige", reprenant la présentation de la scie Striebig "Standard" ; que la société italienne Putsch Meniconi, qui fabrique les scies commercialisées sous l'appellation "Prestige", est intervenue à l'instance d'appel ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la SAS X..., M. X... et la société Putsch-Meniconi font grief à l'arrêt d'avoir dit que la société X... SA a commis des actes de contrefaçon par reproduction de la marque "Striebig", que la société X... SA et M. André X... ont commis des actes de contrefaçon par imitation de la marque "Striebig", que la société X... SA n'utilise pas le patronyme de M. André X..., et que cette utilisation porte atteinte aux droits du titulaire de la marque "Striebig", la société Striebig AG, dit que les sociétés Striebig AG et Striebig SARL ont subi un préjudice du fait des actes de contrefaçon par reproduction depuis la rupture du contrat de distribution, et des actes de contrefaçon par imitation de la marque "Striebig" par la société X... SA et M. André X..., interdit en conséquence à la société X... SA de reproduire et utiliser la marque internationale "Striebig" à quelque titre que ce soit sous astreinte de 7 622 euros par jour de retard, interdit à la société X... SA et à M. André X... d'utiliser les marques "X..." et "A. X..." imitant la marque internationale "Striebig" à quelque titre que ce soit sous astreinte de 7 622 euros par jour de retard, limité l'utilisation du nom patronymique de M. André X... en tant que dénomination sociale en lui imposant de le distinguer de manière significative, sous astreinte de la somme de 7 622 euros par jour de retard, et condamné solidairement la société X... SA et M. André X... au paiement de la somme provisionnelle de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts pour les actes de contrefaçon et de reproduction depuis la rupture du contrat de distribution de limitation de la marque "Striebig" par les marques "X..." et "A. X...", alors, selon le moyen :

1 ) que, selon les dispositions de l'article L. 713-6 du Code de la propriété intellectuelle, l'enregistrement d'une marque ne fait pas obstacle à l'utilisation du même signe ou d'un signe similaire comme nom commercial, dénomination ou enseigne, lorsque cette utilisation est, soit antérieure à l'enregistrement, soit le fait d'un tiers employant son nom patronymique ; qu'il résulte de ce texte, d'une part, que l'usage d'un nom patronymique identique dans une dénomination sociale n'est pas illicite si cet usage est exclusif de toute fraude, notamment lorsque le porteur du nom dirige personnellement l'entreprise, d'autre part, que peuvent coexister une marque et un nom commercial antérieur, et, enfin, que l'usage de son nom patronyme par un homonyme comme dénomination sociale, nom commercial ou enseigne, ne peut être constitutif d'un délit de contrefaçon que s'il contrevient à une décision judiciaire le réglementant ou l'interdisant ; qu'en estimant, néanmoins, qu'était caractérisé le délit de contrefaçon par imitation de la marque "Striebig", alors qu'il résultait de ses propres constatations que la société X... et M. André X... n'avaient fait qu'utiliser le nom patronymique de ce dernier, et que l'usage du nom "X...", similaire au terme "Striebig", était antérieur en tant que dénomination sociale au dépôt de la marque internationale "Striebig", la cour d'appel a violé, par fausse application,

l'article L. 713-3 du Code de la propriété intellectuelle, ensemble, par refus d'application, l'article L. 713-6 de ce Code ;

2 ) que la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en énonçant, pour établir le délit de contrefaçon par imitation imputé à la SAS André X..., à M. X... et à la société Putsch-Meniconi, d'une part, qu'il était incontesté que les marques "X..." et "A.Streibig" avaient été utilisées par ces derniers pour des produits et services identiques à ceux désignés à l'enregistrement de la marque "Striebig", d'autre part, que la société X... et M. André X... ne rapportaient pas la preuve qu'avant l'enregistrement de la marque "Striebig", les termes "X..." ou "A. X..." avaient servi de marques de fabriques, la cour d'appel a statué par motifs contradictoires, et de ce chef violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3 ) qu'il appartient au demandeur à l'action en contrefaçon de rapporter la preuve des faits dont il invoque le caractère contrefaisant ;

qu'en estimant, pour retenir le délit de contrefaçon par imitation et écarter l'exception d'antériorité de leurs droits sur la dénomination "X..." invoquée par la société X... et M. André X..., que ces derniers confondaient la dénomination sociale de l'entreprise et la marque des produits et services, et qu'ils ne rapportaient pas la preuve qu'avant l'enregistrement de la marque "Striebig", les termes "X..." ou "A. X..." avaient servi de marques de fabrique, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant constaté que la société X... et M. X... ne contestaient pas avoir utilisé le terme "X..." à titre de marque, c'est à bon droit que la cour d'appel a écarté l'application de l'article L. 713-6 du Code de la propriété intellectuelle, qui ne couvre que l'utilisation à titre de dénomination sociale, de nom commercial ou d'enseigne ;

Attendu, d'autre part, qu'en retenant ensuite qu'il n'était pas établi que cette utilisation fût antérieure à l'enregistrement de la marque "Striebig", la cour d'appel ne s'est pas déterminée par motifs contradictoires ;

Et attendu enfin, qu'en déférant aux défendeurs à l'action en contrefaçon le soin d'établir la réalité des faits invoqués à l'appui de leur défense, la cour d'appel n'a pas inversé la charge de la preuve ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;

Et sur le second moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la SAS X..., M. X... et la société Putsch-Meniconi font encore grief à l'arrêt d'avoir dit que la société X... SA et M. André X... ont commis des actes de concurrence déloyale sous forme de parasitisme en présentant la marque "X..." sur le côté droit des document commerciaux et de la scie verticale "Prestige" et en imprimant cette marque en couleur gris foncé, précédée d'une forme géométrique de couleur rouge, dit que la société X... SA a commis des actes de parasitisme, interdit à la SAS André X... sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard de commercialiser les scies verticales "Premium", "Classic" et "Economic", en ce qu'elles sont de couleur rouge sur fond blanc et en ce qu'elles comportent des rouleaux freinés débrayables par pédale, restriction qui doit être également étendue à la scie "Prestige", dit que les sociétés Striebig AG et Striebig SARL ont subi un préjudice du fait des actes de concurrence déloyale, et condamné solidairement la société X... SA et M. André X... au paiement de la somme provisionnelle de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts pour les agissements en concurrence déloyale commis par eux à l'égard des sociétés Striebig AG et Striebig SARL, alors, selon le moyen :

1 ) que le cumul d'une action en contrefaçon et d'une action en concurrence déloyale n'est possible que si aux faits de contrefaçon spécialement condamnés par la loi viennent s'ajouter d'autres faits dont le caractère abusif ou excessif résulte des principes généraux du droit ou des usages fondés sur des règles de probité commerciale ; qu'il s'ensuit qu'un tel cumul d'actions implique qu'existent des faits distincts de contrefaçon d'une part et de concurrence déloyale de l'autre, une action en concurrence déloyale ne pouvant compléter une action en contrefaçon que si l'acte déloyal n'est pas l'accessoire de celui de contrefaçon mais en est détachable ; qu'en estimant, néanmoins, qu'un acte de concurrence déloyale pouvait être imputé à la société X... et à son dirigeant consistant dans "l'aggravation du risque de confusion visuelle déjà provoquée par l'emploi de la marque contrefaisante", alors pourtant que l'aggravation du risque de confusion né de la contrefaçon ne pouvait être considéré comme un fait distinct et détachable de l'acte de contrefaçon lui-même et par conséquent justifier un cumul de l'action en contrefaçon et de l'action en concurrence déloyale, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles 1382 et 1383 du Code civil ;

2 ) que le cumul d'une action en contrefaçon et d'une action en concurrence déloyale n'est possible que si aux faits de contrefaçon spécialement condamnés par la loi viennent s'ajouter d'autres faits dont le caractère abusif ou excessif résulte des principes généraux du droit ou des usages fondés sur des règles de probité commerciale ; qu'il s'ensuit qu'un tel cumul d'actions implique qu'existent des faits distincts de contrefaçon d'une part et de concurrence déloyale de l'autre, une action en concurrence déloyale ne pouvant compléter une action en contrefaçon que si l'acte déloyal n'est pas l'accessoire de celui de contrefaçon mais en est détachable ; qu'il en est de même en ce qui concerne le grief de parasitisme, même si les faits allégués sont très proches de ceux constitutifs de la contrefaçon ; qu'en estimant, néanmoins, qu'un acte de concurrence déloyale par parasitisme pouvait être imputé à la société X... et à son dirigeant aux motifs qu'ils avaient étendu l'aire de confusion qu'ils avaient fait naître en France, ce dont il résultait que le comportement qualifié de parasitaire ne procédait pas d'un fait distinct et détachable de l'acte de contrefaçon lui-même, à tout le moins que cet acte n'en était que l'accessoire, la cour d'appel, méconnaissant les principes relatifs au cumul de l'action en contrefaçon et de l'action en concurrence déloyale, a derechef violé, par fausse application, les articles 1382 et 1383 du Code civil ;

3 ) que la similitude entre deux produits n'est pas un acte de concurrence déloyale lorsque le point sur lequel porte cette similitude est banal, qu'elle est imposée par des normes de standardisation, par des considérations techniques, comme une nécessité fonctionnelle, ou par son appartenance au domaine public ; qu'en estimant que la ressemblance des produits obtenue par un changement de couleur et une modification du système de support avait été intentionnellement créée par la société X... avec la forme d'ensemble des machines de marque "Striebig", ce qui avait aggravé le risque de confusion déjà produit dans l'esprit de la clientèle par la marque contrefaisante, constituait un acte de concurrence déloyale, et justifiait que l'interdiction prononcée soit confirmée pour le modèle "Prestige" et étendue aux modèles "Premium", "Classic" et "Economic", sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si les similitudes présentées par les produits ne constituaient pas qu'un aspect technique et utilitaire et si le système dont ils étaient équipés, parce qu'il ne faisait l'objet d'aucune protection, soit au plan des marques, soit au plan des dessins et modèles, pouvait être librement utilisé, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant constaté l'imitation de certains aspects distinctifs, non compris dans l'enregistrement de marque, consistant en l'inscription sur le bord droit des documents commerciaux, de mentions verticales imprimées en gris et précédées d'un carré rouge, puis constaté que la société X... était intervenue auprès de la société Putsch-Meniconi, afin que les scies commercialisées par celle-ci soient revêtues des couleurs, rouge et blanc, employées par la société Striebig, et que les supports inférieurs fixes de ces machines soient remplacés par des rouleaux freinés, tels qu'utilisés par cette société, la cour d'appel a caractérisé l'existence de faits distincts de ceux fondant la condamnation pour contrefaçon de marque ;

Et attendu, en second lieu, que la cour d'appel a fait ainsi ressortir que ces imitations n'étaient pas dictées par des considérations techniques ;

Que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la SAS André X..., M. X... et la société Putsch-Meniconi, Putsch groupe aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, les condamne à payer à la société Striebig AG et à la SARL Striebig la somme globale de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 02-14902
Date de la décision : 31/03/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar (1e chambre civile), 20 février 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 31 mar. 2004, pourvoi n°02-14902


Composition du Tribunal
Président : Président : M. TRICOT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:02.14902
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