AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré, que la SAPPM dont M. X... était dirigeant est devenue en 1992 la SAPPM holding ; qu'à la même période, une filiale, la SAPPM SA (la société), dont M. X... était aussi le dirigeant, a été constituée ; que la société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 27 juillet 1993 et 10 avril 1994, le liquidateur a, par assignation du 14 mars 1997, demandé la condamnation de M. X..., au paiement des dettes sociales et le prononcé à son encontre d'une mesure de faillite personnelle ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt d'avoir déclaré recevable la demande du liquidateur tendant à lui faire supporter les dettes de la société, alors, selon le moyen :
1 ) que la cour d'appel a dénaturé les conclusions récapitulatives de M. X... qui avait seulement reconnu qu'il n'habitait plus à Cénon et a ainsi violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
2 ) que faute d'avoir précisé dans sa décision les diligences effectuées par l'huissier de justice, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle et n'a pas donné de base légale à cette décision au regard de l'article 656 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient que l'assignation a été régulièrement délivrée, le 19 mars 1994, à la mairie de Bégadan, localité où M. X... reconnaît avoir été domicilié 2 rue des Bertins, que l'huissier a régulièrement relaté les diligences effectuées et qu'il n'est justifié d'aucun grief au sens de l'article 114 du nouveau Code de procédure civile ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'a pas dénaturé les conclusions récapitulatives de M. X... qu'elle n'a pas visées, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt d'avoir prononcé à son encontre une mesure de faillite personnelle, alors, selon le moyen :
1 ) que la cour d'appel, qui n'a pas précisé à quelles dates la plupart des dettes qu'elle a relevées, étaient exigibles et exigées, ou qui a constaté que ces dettes n'étaient exigibles que postérieurement à la date de cessation des paiements retenue, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 625-5 et L. 621-1 du Code de commerce ;
2 ) que la cour d'appel n'ayant pas légalement établi que la cessation des paiements remontait au 1er janvier 1993, a aussi privé sa décision de base légale au regard des articles L. 625-4 et L. 624-5 du Code de commerce ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que, dans son jugement du 27 juillet 1993, le tribunal avait fixé la date de cessation des paiements au 20 juillet 1993, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'à la suite de la création de la société, le passif de la SAPPM holding, en état virtuel de cessation des paiements, lui a été transféré tandis que cette dernière conservait tous ses actifs, que les comptes n'ont, ensuite, cessé de se dégrader, M. X... continuant à percevoir dans son intérêt personnel une rémunération de 25 000 francs par mois ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants évoqués à la première branche, n'a fait qu'user des pouvoirs qu'elle tient des articles L. 624-5, 4 et L. 625-4 en statuant comme elle a fait ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche :
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt de l'avoir condamné à supporter la totalité des dettes de la société, alors selon le moyen, que la seule faute relevée à l'encontre de M. X... est d'avoir, en sa qualité de dirigeant de la SAPPM holding, soustrait le patrimoine immobilier de cette société au gage des créanciers dans le seul intérêt des actionnaires de celle-ci ; qu'une telle faute, commise dans la gestion d'une autre personne morale, ne pouvait justifier la condamnation de M. X..., en sa qualité de dirigeant de la société, seule en liquidation judiciaire, à payer les dettes de cette dernière société ; qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 624-3 du Code de commerce ;
Mais attendu qu'en retenant, par motifs propres et adoptés, que l'acte d'apport partiel d'actif du 26 octobre 1992 avait eu pour conséquence de transférer à la société, nouvellement constituée, le passif de la SAPPM holding en état virtuel de cessation des paiements tandis que cette dernière conservait tous ses actifs, la cour d'appel a caractérisé la faute commise par M. X... dans la gestion de la société mise ultérieurement en liquidation judiciaire ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 devenu l'article L. 624-3 du Code de commerce ;
Attendu que pour condamner M. X... au paiement des dettes sociales, l'arrêt retient que la faute de gestion est caractérisée et justifie la sanction prononcée ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi sans rechercher si la faute de gestion qu'elle retenait avait contribué à l'insuffisance d'actif de la société, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il a condamné M. X... au paiement de la somme de 11 298 618,75 francs, l'arrêt rendu le 23 avril 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;
Condamne la SCP Silvestri-Baujet, ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq février deux mille quatre.