AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société ML Malis Larrieux que sur le pourvoi incident relevé par la société Combeau frères ;
Donne acte à M. X..., liquidateur de la société ML Malis Larrieux du désistement de son pourvoi en tant que dirigé contre la société ML Malis Larrieux et M. Y..., administrateur judiciaire de la société ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, que la société Combeau frères, en liquidation judiciaire, représentée par son liquidateur, Mme Z... a vendu à la société ML Malis Larrieux (société ML) un fonds de commerce ; qu'une partie du prix n'ayant pas été payée à l'échéance, Mme Z... a assigné la société ML aux fins de voir constater la résolution de plein droit de la vente ; que, par jugement du 15 septembre 1999, le tribunal a constaté la résolution de plein droit de la vente, dit que la somme de 350 000 francs déjà versée restera acquise à la liquidation judiciaire de la société Combeau frères et condamné la société ML au paiement de différentes sommes ; qu'au cours de l'instance d'appel, la société ML a été mise en redressement puis liquidation judiciaires ; que la cour d'appel a confirmé le jugement ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches, du pourvoi incident qui est préalable :
Attendu que Mme Z... fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable l'appel formé par la société ML, alors, selon le moyen :
1 / que selon l'article 642 du nouveau Code de procédure civile, tout délai expire le dernier jour à 24 heures ; que, selon l'article 902 du même Code, la remise de la déclaration d'appel est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que, selon la date apposée par le secrétariat-greffe sur la déclaration d'appel, celui-ci était tardif, la cour d'appel a considéré pour déclarer l'appel recevable, qu'en l'état d'une défaillance du dispositif d'enregistrement des déclarations d'appel le dernier jour utile entre 17 heures et minuit, la déclaration d'appel litigieuse avait été déposée ce dernier jour utile entre 17 heures et minuit ; qu'en déduisant la régularité de l'appel de la seule défaillance du dispositif d'enregistrement, sans établir en quoi la déclaration d'appel de la société ML aurait bien été déposée le dernier jour utile entre 17 heures et minuit, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés, ensemble l'article 528 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que, dans ses conclusions d'appel, Mme Z... avait fait valoir qu'en l'état de la date figurant sur la déclaration d'appel, rien ne permettait de déroger à l'application des dispositions d'ordre public dont il résultait que l'appel était irrecevable ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, la cour d'appel a pu retenir que la date d'enregistrement figurant sur la déclaration d'appel de la société ML était manifestement entachée d'erreur, en raison de la défaillance du dispositif d'enregistrement et que la déclaration d'appel avait en réalité été déposée dans le délai ; que, répondant ainsi aux conclusions invoquées, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen du pourvoi principal, pris en ses deux branches :
Attendu que le liquidateur de la société ML fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement ayant condamné la société ML à payer à Mme Z..., ès qualités, la somme de 10 000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, alors, selon le moyen :
1 / qu'en statuant comme elle a fait, sans constater que la société Combeau frères, par l'intermédiaire de son liquidateur avait procédé à la déclaration de sa créance de frais irrépétibles, antérieure à la procédure collective, la cour d'appel ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles 47, 48 et 50 de la loi du 25 janvier 1985 devenus les articles L. 621-40, L. 621-41 et L. 621-43 du Code de commerce ;
2 / que la cour d'appel ne pouvait confirmer le jugement entrepris, qui avait prononcé la condamnation de la société ML à payer au liquidateur de la société Combeau frères la somme de 10 000 francs au titre des frais irrépétibles, après avoir pourtant constaté que la société ML avait été placée en liquidation judiciaire au cours de l'instance d'appel, le 17 mars 2000 ; qu'en se prononçant comme elle a fait, la cour d'appel viole les articles 47 et 48 de la loi du 25 janvier 1985 devenus les articles L. 621-40 et L. 621-41 du Code de commerce ;
Mais attendu que la créance résultant de l'application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, mise à la charge du débiteur, trouve son origine dans la décision et entre dans les prévisions de l'article L. 621-32 du Code de commerce lorsque cette décision est postérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur les premier, deuxième, troisième et cinquième moyens du pourvoi principal, pris chacun en leur première branche, réunis :
Vu les articles 47, 48 et 50 de la loi du 25 janvier 1985, devenus les articles L. 621-40, L. 621-41 et L. 621-43 du Code de commerce ;
Attendu que le jugement de redressement judiciaire suspend, jusqu'à la déclaration de créance, toute action en justice de la part des créanciers de sommes d'argent dont la créance a son origine antérieurement audit jugement et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ; que, sous réserve des dispositions relatives aux instances prud'homales, les instances en cours sont suspendues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de créance ; qu'elles sont reprises à l'initiative du créancier demandeur après mise en cause, en cas de liquidation judiciaire, du liquidateur ;
Attendu que, pour confirmer le jugement en ce qu'il avait dit que la somme de 350 000 francs déjà payée sur le prix de cession resterait acquise à la liquidation judiciaire de la société Combeau frères et en ce qu'il avait condamné la société ML au paiement de diverses sommes, la cour d'appel retient que les conditions de la vente ont été acceptées par le cessionnaire, et que ce dernier n'avait soulevé aucun moyen sérieux devant le tribunal de commerce pour s'opposer aux demandes du cédant et ne critiquait pas plus précisément le jugement quant au montant des pénalités accordées ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans rechercher, au besoin d'office, si la société Combeau frères avait déclaré les créances qui avaient leur origine antérieurement au jugement d'ouverture du redressement judiciaire, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur les premier, deuxième, troisième et cinquième moyens du pourvoi principal, pris chacun en leur seconde branche, réunis :
Vu les articles 47 et 48 de la loi du 25 janvier 1985, devenus les articles L. 621-40 et L. 621-41 du Code de commerce ;
Attendu que la cour d'appel a confirmé le jugement en ce qu'il avait dit que la somme de 350 000 francs déjà payée sur le prix de cession resterait acquise à la liquidation judiciaire de la société Combeau frères et en ce qu'il avait condamné la société ML au paiement de la somme de 15 000 francs au titre de la clause pénale, outre les intérêts, d'une indemnité d'occupation, et d'une somme de 40 000 francs à titre de dommages et intérêts ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle pouvait uniquement, après reprise de l'instance en cours dans les conditions prévues à l'article L. 621-41 du Code de commerce, constater les créances et en fixer le montant, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal :
Rejette le pourvoi incident formé par Mme Z..., ès qualités ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement ayant dit que la somme de 350 000 francs déjà payée sur le prix de cession restera acquise à la liquidation judiciaire de la société Combeau frères, et ayant condamné la société ML Malis Larrieux au paiement de la somme de 15 000 francs, d'une indemnité d'occupation et de la somme de 40 000 francs, l'arrêt rendu le 27 février 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne Mme Z..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X..., ès qualités ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille quatre.