La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/01/2004 | FRANCE | N°03-42757

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 janvier 2004, 03-42757


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° N 03-42.757, Q 03-42.759, S 03-42.761, T 03-42.762, X 03-42.766, Y 03-42.767, Z 03-42.768, C 03-42.771, D 03-42.772, E 03-42.773 et K 03-42.778 ;

Attendu que M. X... et dix autres salariés ont été mis à la disposition de la société Sovab par diverses entreprises de travail temporaire pour effectuer différentes missions entre les années 1991 et 2001 ; qu'estimant avoir été mis à disposition de la société Sovab afin de pourvoir d

urablement des emplois liés à l'activité normale et permanente de l'entreprise, l...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° N 03-42.757, Q 03-42.759, S 03-42.761, T 03-42.762, X 03-42.766, Y 03-42.767, Z 03-42.768, C 03-42.771, D 03-42.772, E 03-42.773 et K 03-42.778 ;

Attendu que M. X... et dix autres salariés ont été mis à la disposition de la société Sovab par diverses entreprises de travail temporaire pour effectuer différentes missions entre les années 1991 et 2001 ; qu'estimant avoir été mis à disposition de la société Sovab afin de pourvoir durablement des emplois liés à l'activité normale et permanente de l'entreprise, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification de ces contrats de travail temporaire en contrats de travail à durée indéterminée, ainsi que le paiement de diverses sommes à titre d'indemnité de requalification ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Sovab fait grief à l'arrêt attaqué (Nancy, 19 février 2003), d'avoir accueilli les demandes de requalification, et par conséquent de l'avoir condamnée au paiement de diverses sommes au titre de cette requalification, alors, selon le moyen :

1 / que l'arrêt qui, contrairement au jugement, estime illicite le recours à des travailleurs intérimaires pour pourvoir à l'activité normale de l'entreprise (construction de véhicules utilitaires), viole l'article L. 124-2-1,2 du Code du travail d'où il résulte précisément que des intérimaires peuvent être utilisés en cas d'accroissement de l'activité de l'entreprise ;

2 / qu'en posant en principe que le recours au travail intérimaire serait limité aux cas de surcroît de travail occasionnel l'arrêt attaqué viole ensemble l'article L. 124-2 qui ne prévoit l'interdiction du travail intérimaire que s'il s'agit de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale de l'entreprise et l'article L. 124-2-2 d'où il résulte que ce type de contrat est licite pour une durée pouvant atteindre dix-huit mois ;

3 / que la société Sovab ayant fait valoir que l'accroissement durable de l'activité de l'entreprise au cours de la période considérée avait été effectivement prise en compte par le recrutement d'un effectif important de salariés sous le régime du contrat de travail à durée indéterminée et que le recours à des salariés sous le régime du contrat de travail à durée déterminée tendait seulement à résorber des surcroîts temporaires d'activité, méconnaît le pouvoir de direction du chef d'entreprise en violation des articles L. 121-1, L. 124-2 et suivants du Code du travail l'arrêt qui se substitue à l'employeur pour fixer une prétendue proportion normale entre l'augmentation du nombre de salariés intérimaires et celle du nombre de salariés sous contrat à durée indéterminée, le chef d'entreprise demeurant seul responsable de déterminer les moyens nécessaires pour répondre à un accroissement temporaire d'activité ;

4 / qu'en décidant que l'incertitude quant à l'évolution du marché ne saurait constituer un motif légal de recours à l'intérim, l'arrêt attaqué statue par voie de disposition abstraite et générale au lieu d'analyser les besoins spécifiques de la production de la société Sovab à l'époque où le défendeur au pourvoi a été mis, par la société d'intérim, à sa disposition ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 4 du Code civil et l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

5 / qu'en affirmant que la création d'un grand nombre d'emplois à durée indéterminée ne constituerait pas un motif légal de recours parallèle à l'emploi précaire, la cour d'appel viole derechef les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile, la société Sovab n'ayant jamais émis une telle prétention ;

Mais attendu qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 124-2 du Code du travail, le contrat de travail temporaire ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice ; que selon le second alinéa de ce texte, un utilisateur ne peut faire appel à des salariés intérimaires que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire dénommée "mission", et seulement dans les cas énumérés à l'article L. 124-2-1, et notamment en cas d'accroissement temporaire d'activité ; qu'il en résulte que, dans ce dernier cas, le recours à des salariés intérimaires ne peut être autorisé que pour les besoins d'une ou plusieurs tâches résultant du seul accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, notamment en cas de variations cycliques de production, sans qu'il soit nécessaire ni que cet accroissement présente un caractère exceptionnel, ni que le salarié recruté soit affecté à la réalisation même de ces tâches ;

Et attendu que la cour d'appel a constaté, tant par motifs propres qu'adoptés, que, d'une part, la société Sovab bénéficiait d'une augmentation constante de sa production, et, d'autre part, que les différents contrats de mission des salariés intérimaires s'inscrivaient dans cet accroissement durable et constant de son activité ; qu'elle a exactement décidé, abstraction faite du motif surabondant tiré du caractère accidentel de l'augmentation de la charge de travail, que ces contrats de travail temporaire, qui avaient pour effet de pourvoir durablement des emplois liés à l'activité normale et permanente de l'entreprise, devaient être requalifiés en contrats de travail à durée indéterminée ;

D'où il suit que le moyen, qui n'est fondé en aucune de ses branches, ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen :

Attendu que les salariés font grief à l'arrêt d'avoir décidé que la requalification du contrat devait intervenir à compter du point de départ de la première mission effectuée chez l'utilisateur, alors, selon le moyen :

1 / qu'en vertu de l'article 124-7 du Code du travail, le salarié qui considère que l'utilisateur a recours à ses services en violation des dispositions légales peut faire valoir auprès de celui-ci les droits afférents à un contrat à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission ; que dès lors, en faisant remonter les effets de la requalification au premier jour de la première mission précédemment accomplie par le défendeur au pourvoi, indépendamment des emplois qu'il a pu occuper entre-temps auprès d'autres utilisateurs, la cour d'appel ajoute au texte susvisé, en violation de celui-ci, une disposition qu'il ne contient pas ;

2 / qu'en vertu du contrat le liant à la société d'intérim, le défendeur au pourvoi est à la disposition de celle-ci et accomplit des missions auprès d'autres entreprises utilisatrices, de sorte que l'arrêt attaqué qui constate que pendant de nombreux mois l'intérimaire n'a pas été utilisé par la société Sovab et qui, cependant, fait fictivement remonter son ancienneté au premier jour de la première mission dans cette entreprise, viole ensemble les articles L. 121-1 du Code du travail et 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'il résulte de l'alinéa 2 de l'article L. 124-7 du Code du travail que lorsqu'un utilisateur a recours à un salarié d'une entreprise de travail temporaire en violation caractérisée des dispositions des articles L. 124-2 à L. 124-2-4, ce salarié peut faire valoir auprès de l'utilisateur les droits afférents à un contrat à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa première mission irrégulière ;

Et attendu que la cour d'appel, qui a fait ressortir que les effets de la requalification remontaient au premier jour de la première mission irrégulière effectuée par le salarié auprès de l'entreprise utilisatrice, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Sovab aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Sovab à payer à MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D... et le Syndicat CGT de la Sovab, chacun, la somme de 100 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 03-42757
Date de la décision : 21/01/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy (chambre sociale), 19 février 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 jan. 2004, pourvoi n°03-42757


Composition du Tribunal
Président : Président : M. SARGOS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.42757
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award