AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 40-3, alinéa 1er, du décret du 7 avril 1928, modifié ;
Attendu que, si, aux termes du texte susvisé, le juge peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite, il ne peut cependant, pour prescrire des telles mesures, trancher le fond du litige ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu en matière de référé, que, par contrat sous seing privé du 9 novembre 1999, la société Total Pacifique (la société Total) a donné en location-gérance à la société GJL un fonds de commerce de station-service à Nouméa ; que ce contrat était conclu pour une durée d'une année à compter du 1er décembre 1999 et renouvelable par tacite reconduction ; que l'article 11.1 prévoyait que le non-renouvellement du contrat devait être signifié, moyennant un préavis de trois mois, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise de récépissé ou par lettre remise par huissier de justice ; que son article 11.2 prévoyait une résiliation de plein droit sans préavis et sans formalité judiciaire, sur simple notification par la société Total, dans un certain nombre de cas, notamment en cas de non-respect par le locataire gérant d'une des clauses du contrat et ce malgré une mise en demeure fixant un délai pour mettre fin à l'infraction, qui lui aurait été adressée par lettre recommandée avec avis de réception ; que, par lettre recommandée avec avis de réception du 24 juillet 2000, la société Total a informé la société GJL du non-renouvellement du contrat en application de son article 11 et en conséquence de son terme le 30 novembre 2000, en énumérant plusieurs griefs qui motivaient le non-renouvellement et en précisant qu'elle
avait tenu à informer son locataire avant la date prévu par le délai de préavis pour lui permettre de prendre les mesures qui s'imposaient ; que la société GJL a alors saisi le juge des référés pour faire constater que la lettre de résiliation du 24 juillet 2000 que lui avait adressée la société Total n'avait pas été précédée de la mise en demeure prévue à l'article 11.2 et faire juger que cette lettre n'avait aucune incidence sur la poursuite des relations contractuelles ;
Attendu que, pour déclarer le juge des référés incompétent, l'arrêt retient que la lettre du 24 juillet 2000 par laquelle la société Total informe son locataire-gérant, la société GJL, de son intention de ne pas renouveler le contrat à son échéance, constitue incontestablement un non-renouvellement du contrat à son échéance du 30 novembre 2000 respectant les formes et délais de son article 11.1 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE et ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 février 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa, autrement composée ;
Condamne la société Total Pacifique aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Total Pacifique à payer à la société GJL la somme de 2 200 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille quatre.