AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique pris en ses deux branches :
Attendu que Mme X..., médecin traitant de Mme Le Y..., a établi un certificat médical attestant que l'état de santé psychique de sa patiente lui semblait nécessiter l'ouverture d'une mesure de curatelle et l'a remis au fils de cette dernière ; que sur requête de M. Le Y..., le juge des tutelles a placé Mme Le Y... sous sauvegarde de justice pendant la durée de l'instance ; qu'après avoir ordonné un examen médical et entendu cette dernière, il a dit qu'il n'y avait pas lieu à ouverture d'un régime de protection ; que Mme Le Y..., invoquant une violation du secret médical, a assigné Mme X... en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que Mme Le Y... fait grief au jugement attaqué (Tribunal d'instance de Saint-Brieuc, 15 mai 2000), de l'avoir déboutée de sa demande, alors selon le moyen ;
1 / que constitue une violation du secret médical le fait pour un médecin traitant de délivrer à un tiers un certificat médical analysant l'état de santé son patient ; qu'en considérant dès lors qu'il ne pouvait être reproché à Mme X... d'avoir remis au fils de Mme Le Y... un certificat médical attestant que l'état de santé psychique de sa mère nécessitait l'ouverture d'une mesure de protection sous curatelle, motif pris de ce que ce certificat ne lierait pas le juge des tutelles, le tribunal a violé l'article 226-13 du nouveau Code pénal et l'article 4 du Code de déontologie médicale ;
2 / qu'il ressortait des propres constatations du tribunal que l'ouverture d'un régime de protection à l'égard de Mme Le Y... avait été engagée sur le fondement du certificat médical délivré par Mme X... ;
qu'en considérant cependant que Mme Le Y... n'établissait pas de lien de causalité entre son préjudice et la délivrance de ce certificat, le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 1383 du Code civil ;
Mais attendu qu'aux termes des articles 493 et 509 du Code civil, l'ouverture d'une curatelle peut être prononcée à la requête des descendants de la personne qu'il y a lieu de protéger ; que selon l'article 490-1 du Code civil, les décisions par lesquelles le juge des tutelles organise la protection des intérêts civils sont précédées de l'avis du médecin traitant ; que par l'effet de cette dernière disposition, le professionnel est déchargé de son obligation au secret relativement aux faits dont il a eu connaissance dans l'exercice de sa profession ; qu'il s'ensuit qu'après avoir constaté que Mme X... s'était bornée à donner son avis sur l'opportunité d'une mesure de protection, le tribunal en a justement déduit, en l'absence de révélation de toute autre information sur l'état de santé de sa patiente, qu'elle n'avait pas commis la faute reprochée ; qu'il s'ensuit que le moyen, mal fondé en sa première branche, est, en l'absence de faute, inopérant en sa seconde ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille quatre.