AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1147 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, sur instruction de sa cliente, la Sarl Cinex (le donneur d'ordre) a acquis des marchandises auprès d'une société de droit anglais ; que le Crédit lyonnais (la banque) a ouvert, pour en garantir le paiement, un crédit documentaire irrévocable, soumis aux règles et usances uniformes n° 500 de la Chambre de commerce internationale, et dont les instructions incluaient la présentation d'une facture de 18 324,42 . ; que la banque ayant reçu le 14 octobre 1996 une facture de 21 410 ., en a avisé le donneur d'ordre en vue d'un règlement pour le 2 décembre suivant ; que le donneur d'ordre a "refusé le 8 novembre 1996 les irrégularités de la facture" ; que, par télécopie du 27 novembre suivant, la banque a demandé au donneur d'ordre des instructions concernant le règlement du crédit ; que, par télécopie du 4 décembre suivant, le donneur d'ordre a demandé à la banque de ne pas payer ledit crédit documentaire ; que la banque a rappelé au donneur d'ordre qu'elle avait, le 2 décembre 1996, en exécution du crédit documentaire, réglé la somme de 18 324,42 . ; que le donneur d'ordre a contesté le débit de son compte à due concurrence et, estimant la responsabilité de la banque engagée, l'a poursuivie judiciairement ;
Attendu que pour écarter la responsabilité de la banque émettrice vis-à-vis du donneur d'ordre, l'arrêt retient que le refus de ce dernier de lever les réserves de la facture devait s'interpréter non comme un refus explicite de tout paiement mais, en l'absence d'autres irrégularités, comme un refus de payer le montant du dépassement de la facture par rapport à la somme contractuellement prévue et que le donneur d'ordre n'avait pas, dans les délais, donné d'instructions précises ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que lorsque les documents ne sont pas conformes avec les termes du crédit documentaire irrévocable, il appartient au seul donneur d'ordre d'autoriser la banque à payer sans réserves ; que la cour d'appel, qui a relevé que celle-ci a réitéré le 27 novembre 1996 sa demande d'instructions, reconnaissant par là même n'avoir pas obtenu l'autorisation requise, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 décembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne le Crédit lyonnais aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes du Crédit lyonnais et de la société Cinex ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept janvier deux mille quatre.