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03/12/2003 | FRANCE | N°03-81023

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 décembre 2003, 03-81023


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois décembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CHANUT, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Lydia,

contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 28 novembre 2002,

qui, pour fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité, l'a condamnée à 6 mo...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois décembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CHANUT, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Lydia,

contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 28 novembre 2002, qui, pour fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité, l'a condamnée à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, 20 000 euros d'amende, a ordonné une mesure d'affichage et de publication, et a prononcé sur les demandes de l'administration des Impôts, partie civile ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Attendu que Lydia X..., à qui l'administration des Impôts reproche d'avoir minoré ses déclarations pour bénéficier du régime du forfait auquel elle ne pouvait prétendre en raison de son chiffre d'affaires réel, a obtenu du tribunal correctionnel un sursis à statuer sur les poursuites dont elle fait l'objet dans l'attente de la décision sur son recours devant le tribunal administratif relatif à la caducité du régime forfaitaire et à l'imposition ; que, sur appels du ministère public et de l'administration des Impôts, la cour d'appel, après avoir annulé le jugement et évoqué, a rejeté les exceptions de sursis à statuer et de nullité avant de déclarer la prévenue coupable des faits visés dans la prévention ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des des articles 1743 du Code général des impôts, 8, 9 du Code de commerce, 386, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation du principe de la séparation des pouvoirs ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a rejeté l'exception préjudicielle soulevée par Lydia X... ;

"aux motifs que les poursuites correctionnelles pour fraude fiscale et la procédure administrative tendant à la fixation de l'assiette et de l'étendue des impositions sont, par leur nature et leur objet, différentes et indépendantes l'une de l'autre et n'admettent pas les mêmes modes de preuve ; que d'ailleurs la décision de la juridiction administrative ne s'impose pas aux juridictions correctionnelles ;

"alors que seule la caducité avérée du régime forfaitaire entraîne l'obligation de produire une comptabilité conforme aux articles 8 et 9 du Code de commerce ; qu'à la suite de la notification du redressement envisagé par l'administration fiscale, le tribunal administratif de Montpellier a été saisi le 6 juin 2002 aux fins de statuer sur la légitimité ou non pour la prévenue de se maintenir au régime du forfait ; que le juge de l'impôt n'ayant pas, à ce stade de la procédure, confirmé la caducité du forfait, la cour d'appel ne pouvait imposer à la prévenue de s'acquitter des obligations comptables du régime réel simplifié, et lui reprocher son omission ; qu'en refusant de faire droit à l'exception préjudicielle dont elle était régulièrement saisie et de surseoir à statuer jusqu'à décision définitive de la juridiction administrative, la cour d'appel a violé les textes susvisés, et excédé ses pouvoirs" ;

Attendu que, pour rejeter la demande de sursis à statuer présentée par l'avocat de la prévenue, l'arrêt attaqué relève notamment que "le crédit du compte de Lydia X... dépasse pour 1994 la somme de 500 000 francs et que la caducité du forfait est automatique au vu de sa déclaration d'un chiffre d'affaires de 425 000 francs" ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel, qui disposait des éléments suffisants pour apprécier l'existence des délits reprochés, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 111-5 du Code pénal, L. 8, L. 57 du Livre des procédures fiscales, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a rejeté l'exception de nullité de la procédure administrative tirée de l'absence de motivation de la notification de redressement ;

"aux motifs que c'est à tort que Lydia X... soutient que l'administration des Impôts s'est basée sur un article inexistant pour déclarer la caducité des forfaits (L. 18 du Livre des procédures fiscales) et que, dès lors, elle n'a pas motivé son redressement, puisque c'est bien sur la base de l'article L. 8 - applicable jusqu'à la loi du 30 décembre 1998 - (et non L. 18 inscrit par erreur) que cette administration a déclaré la caducité des forfaits qui avaient été fixés au vu de renseignements inexacts ;

"alors, d'une part, que l'article L. 57 du Livre des procédures fiscales impose à l'administration d'indiquer les textes applicables aux faits reprochés afin d'éclairer le contribuable sur la base juridique sur laquelle son redressement fiscal est envisagé ;

que la cour d'appel qui constate que la notification de redressement adressée à la prévenue visait un article inexistant du Livre des procédures fiscales (article L. 18), de sorte que la notification présentait une motivation nécessairement erronée et insuffisante, ne pouvait refuser de faire droit à l'exception de nullité de la procédure administrative soulevée in limine litis par la prévenue, sauf à violer les textes susvisés par refus d'application ;

"alors, d'autre part, que la violation des droits de la défense au cours de la procédure administrative antérieure à la plainte des services fiscaux et à la citation directe du ministère public emporte l'annulation des poursuites pénales subséquentes ;

qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la confusion commise par l'administration entre les articles L. 8 et L. 18 du Livre des procédures fiscales n'avait pas privé la prévenue de son droit à être informée du fondement textuel du redressement fiscal envisagé, et n'avait pas ainsi porté atteinte à ses droits de la défense, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 8 du Livre des procédures fiscales, 38, 93 du Code général des impôts, 427, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a rejeté l'exception de nullité de la procédure administrative tirée du renversement de la charge de la preuve ;

"aux motifs que si Lydia X... a toujours affirmé que les recettes de son compte bancaire provenaient en partie de remises de fonds de sa vie privée, elle n'a jamais offert à l'administration des Impôts de le prouver en produisant spontanément le moindre document afférent à ces écritures ;

qu'ainsi il ne peut être reproché à l'administration des Impôts d'avoir confondu les articles 38 et 93 du Code général des impôts ;

"alors qu'en exigeant de la prévenue qu'elle justifie du caractère mixte du compte bancaire litigieux, quand il appartenait en réalité à l'Administration, conformément à l'article L. 8 du Livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve du caractère inexact des renseignements transmis par elle et du lien de causalité entre ces renseignements et la détermination du forfait, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité de la procédure de vérification fiscale, l'arrêt attaqué relève que l'avis de redressement adressé à Lydia X... lui indiquait qu'elle avait la possibilité d'être assistée par un conseil, et que cette assistance a été effective ;

Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs et dès lors qu'il a été satisfait aux prescriptions de l'article L. 47 du Livre des procédures fiscales, seules susceptibles d'affecter la procédure pénale, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1741, 1743 du Code général des impôts, L. 227 du Livre des procédures fiscales, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Lydia X... coupable de fraude fiscale et d'omission d'écritures comptables et, en répression, l'a condamnée à six mois d'emprisonnement avec sursis et 20 000 euros d'amende, outre les publicités et affichages obligatoires ;

"aux motifs que le crédit du compte de Lydia X... dépasse pour 1994 la somme de 500 000 francs et que la caducité du forfait est automatique au vu de sa déclaration d'un chiffre d'affaires de 425 000 francs ; que la caducité des forfaits entraînait la production d'une comptabilité conforme ce qui n'a pas été le cas ;

que l'intention frauduleuse de la prévenue est manifeste dès lors qu'elle s'est délibérément maintenue sous un régime fiscal qui ne lui était pas applicable, et qu'elle a minoré ses recettes ;

"alors, d'une part, que la seule constatation tirée de ce que la prévenue n'aurait pas produit les documents comptables exigés d'elle consécutivement à la décision de caducité de son forfait fiscal est impropre à caractériser l'élément matériel de l'infraction reprochée d'omission d'écritures comptables, lequel ne résulte par ailleurs d'aucune autre constatation de l'arrêt ;

"alors, d'autre part, que l'infraction visée à l'article 1473 du Code général des impôts requiert que soit démontré le caractère intentionnel de l'omission d'écritures reprochée ; qu'en s'abstenant d'établir que la prévenue aurait sciemment omis de passer des écritures comptables, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'infraction en son élément intentionnel ;

"alors, encore, que la preuve du caractère intentionnel de l'infraction de fraude fiscale est exigée par l'article L. 227 du Livre des procédures fiscale ; que la cour d'appel qui se borne à déduire l'intention frauduleuse requise de la circonstance selon laquelle la prévenue se serait maintenue à tort sous un régime fiscal déterminé de concert avec l'administration compétente, n'a pas caractérisé sa volonté de tromper ladite administration, privant ainsi sa décision de base légale" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré la prévenue coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Pibouleau conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Chanut conseiller rapporteur, M. Challe conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-81023
Date de la décision : 03/12/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, chambre correctionnelle, 28 novembre 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 déc. 2003, pourvoi n°03-81023


Composition du Tribunal
Président : Président : M. PIBOULEAU conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:03.81023
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