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03/12/2003 | FRANCE | N°02-83953

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 décembre 2003, 02-83953


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois décembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROGER, les observations de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Hadjira,

- Y... Nordine,

contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 4ème chambre, en date du 7 mai 2002, qui, pour infractions

à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, a condamné la première, ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois décembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROGER, les observations de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Hadjira,

- Y... Nordine,

contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 4ème chambre, en date du 7 mai 2002, qui, pour infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, a condamné la première, à 12 ans d'emprisonnement, 200 000 euros d'amende, le second, à 9 ans d'emprisonnement, 100 000 euros d'amende, les deux à 5 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, et a ordonné une mesure de confiscation ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I - Sur le pourvoi de Nordine Y... :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II - Sur les pourvois formés par Hadjira X... :

Sur la recevabilité du pourvoi formé le 14 octobre 2002 :

Attendu que la demanderesse, ayant épuisé, par l'exercice qu'elle en avait fait le 13 mai 2002, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision ;

Vu les mémoires personnel et ampliatif produits ;

Sur la recevabilité du mémoire personnel :

Attendu que ce mémoire, transmis directement à la Cour de Cassation par la demanderesse, est parvenu au greffe le 15 octobre 2002, soit plus d'un mois après la date du pourvoi, formé le 13 mai 2002 ;

qu'à défaut de dérogation accordée par le président de la chambre criminelle, il n'est pas recevable au regard de l'article 585-1 du Code de procédure pénale ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, 121-6, 121-7, 122-2, 222-36, 222-40, 450-1 du Code pénal, 427, 485, 512, 591, 593, 706-32 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Hadjira X... coupable d'importation non autorisée de stupéfiants en état de récidive légale et d'association de malfaiteurs et, en répression, l'a condamnée à douze ans d'emprisonnement assortie d'une période de sûreté des deux-tiers et 200.000 euros d'amende, outre la confiscation des sommes saisies provenant du commerce lié aux délits reprochés ;

"aux motifs, d'une part, qu'Hadjira X... reconnaît sa participation active pour l'ensemble des faits de trafic de résine de cannabis pour lesquels le tribunal l'a retenue dans les liens de la prévention, tout en tentant de minimiser l'importance de son implication ; que si elle prétend n'avoir été qu'une intermédiaire "pour rendre service" entre Nordine Y... qui désirait acquérir, pour le compte d'un client anglais, des quantités importantes de haschisch et un ressortissant marocain surnommé Z... résidant en Espagne, les investigations entreprises et les conversations téléphoniques enregistrées au cours de la période considérée démontrent au contraire son rôle d'organisatrice d'un trafic international de résine de cannabis ; qu'en effet, ses fréquents voyages en Espagne et en Angleterre, ses démarches effectuées pour trouver les moyens d'acheminement de la drogue, ses directives adressées aux membres de ce réseau pour rechercher des lieux de stockage ou, s'agissant de Nordine Y..., pour apporter leur aide au conditionnement de la résine de cannabis, attestent de son rôle essentiel ; qu'il apparaît également qu'elle a assumé un rôle financier important, avançant les fonds à son fournisseur espagnol, récupérant les sommes d'argent par le truchement de Nordine Y... et Drice A..., se chargeant des opérations de change ; que l'importance de ses biens immobiliers en Espagne ou des fonds déposés sur ses comptes bancaires, en l'absence de revenus officiels, révèle à l'évidence sa participation essentielle à ce trafic de stupéfiants dans le but, comme elle l'a elle-même indiqué, de " saisir l'opportunité de prendre le marché international" ; qu'il convient par conséquent de confirmer le jugement déféré sur sa déclaration de culpabilité de ces chefs, sauf à préciser que les faits d'importation ou exportation illicite de 300 kilos de résine de cannabis ont été commis non courant février 1998, mais courant février 1999 et que le premier terme de la récidive légale est constitué par la condamnation contradictoire et définitive, après rejet du pourvoi le 5 janvier 1995, à trente mois d'emprisonnement prononcée le 26 juillet 1994 par la cour d'appel de Nîmes pour transport, détention, offre ou cession non autorisé de stupéfiants, condamnation sur laquelle son avocat a été mis en mesure de

s'expliquer ;

"aux motifs, d'autre part, qu'Hadjira X..., Nordine Y..., Najette B... et Salim C... avaient formé un groupement ou établi une entente en vue de la préparation et de la commission des délits d'importation et d'exportation de stupéfiants ; que les faits matériels caractérisant cette association de malfaiteurs ont été exposés, Hadjira X..., au centre du réseau, voyageant sans cesse entre la France, l'Espagne et l'Angleterre, avançant les fonds à ses fournisseurs de stupéfiants, récupérant les produits du trafic, apparaissant comme la véritable organisatrice de ce "marché international" de la drogue ; que le jugement ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a déclaré Hadjira X... coupable d'association de malfaiteurs ;

"alors que, devant les juges du fond, les moyens de défense peuvent être établis par tout mode de preuve ; qu'informée en cours de procédure de l'immixtion répréhensible des services de police dans la commission des infractions reprochées à la prévenue, dont les explications exhaustives versées au dossier de procédure, et adressées par courriers au président de chambre de la cour d'appel, décrivaient précisément les fonctions d'informatrice qu'elle avait assumées auprès d'un commissaire de police de Lyon, lequel l'avait fortement incitée à participer aux faits qui lui sont reprochés afin de se rapprocher du dénommé Nourdine Y..., la rassurant par ailleurs sur la légalité de ses agissements en lui affirmant l'avoir dûment répertoriée en sa qualité d'informatrice auprès des services des renseignements généraux, et s'il lui appartenait le cas échéant d'apprécier la force probante de ces éléments de défense, la cour d'appel ne pouvait en revanche s'abstenir totalement de s'en expliquer et entrer néanmoins en voie de condamnation d'infractions provoquées par les services de police ; qu'en statuant en ce sens, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble les droits de la défense et le principe de la liberté de la preuve" ;

Attendu que, faute d'avoir été proposé devant les juges du fond, par des conclusions auxquelles ils auraient été tenus de répondre, le moyen, mélangé de fait, est nouveau et, comme tel, irrecevable ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 121-6, 121-7, 132-9, 222-36, 222-40, 222-41, 222-44 du Code pénal, L. 627 du Code de la santé publique, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Hadjira X... coupable d'importation non autorisée de stupéfiants, avec cette circonstance qu'elle se trouvait en état de récidive légale et, en répression, l'a condamnée à douze ans d'emprisonnement assortie d'une période de sûreté des deux-tiers et 200 000 euros d'amende, outre la confiscation des sommes saisies provenant du commerce lié aux délits reprochés ;

"aux motifs qu'Hadjira X... reconnaît sa participation active pour l'ensemble des faits de trafic de résine de cannabis pour lesquels le tribunal l'a retenue dans les liens de la prévention, tout en tentant de minimiser l'importance de son implication ; que si elle prétend n'avoir été qu'une intermédiaire " pour rendre service " entre Nordine Y... qui désirait acquérir, pour le compte d'un client anglais, des quantités importantes de haschisch et un ressortissant marocain surnommé Z... résidant en Espagne, les investigations entreprises et les conversations téléphoniques enregistrées au cours de la période considérée démontrent au contraire son rôle d'organisatrice d'un trafic international de résine de cannabis ; qu'en effet, ses fréquents voyages en Espagne et en Angleterre, ses démarches effectuées pour trouver les moyens d'acheminement de la drogue, ses directives adressées aux membres de ce réseau pour rechercher des lieux de stockage ou, s'agissant de Nordine Y..., pour apporter leur aide au conditionnement de la résine de cannabis, attestent de son rôle essentiel ; qu'il apparaît également qu'elle a assumé un rôle financier important, avançant les fonds à son fournisseur espagnol, récupérant les sommes d'argent par le truchement de Nordine Y... et Drice A..., se chargeant des opérations de change ; que l'importance de ses biens immobiliers en Espagne ou des fonds déposés sur ses comptes bancaires, en l'absence de revenus officiels, révèle à l'évidence sa participation essentielle à ce trafic de stupéfiants dans le but, comme elle l'a elle-même indiqué, de " saisir l'opportunité de prendre le marché international" ; qu'il convient par conséquent de confirmer le jugement déféré sur sa déclaration de culpabilité de ces chefs, sauf à préciser que les faits d'importation ou exportation illicites de 300 kilos de résine de cannabis ont été commis non courant février 1998, mais courant février 1999 et que le premier terme de la récidive légale est constitué par la condamnation contradictoire et définitive, après rejet du pourvoi le 5 janvier 1995, à trente mois d'emprisonnement prononcée le 26 juillet 1994 par la cour d'appel de Nîmes pour transport, détention, offre ou cession non autorisés de stupéfiants, condamnation sur laquelle son avocat a été mis en mesure de s'expliquer ;

"alors, d'une part, que ne peut être déclaré coupable d'importation non autorisée de stupéfiants au titre de l'article 222-36 du Code pénal que l'auteur ayant pris une part active au passage de la frontière nationale par les marchandises prohibées ; qu'en se bornant à faire état des prétendues démarches réalisées par Hadjira X... et de son éventuel rôle financier, sans pour autant caractériser sa participation active et personnelle au passage des stupéfiants par la frontière nationale, la cour d'appel a privé son arrêt attaqué de base légale au regard des textes précités ;

"alors, d'autre part, que la cour d'appel ne pouvait déclarer Hadjira X... coupable des infractions prévues aux articles 121-7 et 222-36 du Code pénal, sans établir précisément que les démarches prétendument effectuées par elle, de même que son éventuelle participation financière, auraient eu pour objet de faciliter sciemment la préparation ou la consommation de l'infraction d'importation non autorisée de stupéfiants ; qu'en s'abstenant de procéder aux constatations utiles, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des textes susvisés" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 450-1, 222-36 du Code pénal, L. 627 du Code de la santé publique, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Hadjira X... coupable d'association de malfaiteurs et, en répression, l'a condamnée à douze ans d'emprisonnement assortie d'une période de sûreté des deux-tiers et 200 000 euros d'amende, outre la confiscation des sommes saisies provenant du commerce lié aux délits reprochés ;

"aux motifs que, Hadjira X..., Nordine Y..., Najette B... et Salim C... avaient formé un groupement ou établi une entente en vue de la préparation et de la commission des délits d'importation et d'exportation de stupéfiants ; que les faits matériels caractérisant cette association de malfaiteurs ont été exposés, Hadjira X..., au centre du réseau, voyageant sans cesse entre la France, l'Espagne et l'Angleterre, avançant les fonds à ses fournisseurs de stupéfiants, récupérant les produits du trafic, apparaissant comme la véritable organisatrice de ce "marché international" de la drogue ; que le jugement ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a déclaré Hadjira X... coupable d'association de malfaiteurs ;

"alors que la simple participation à une entente coupable d'un individu n'ignorant pas le but de cette entente ne suffit pas à elle seule à caractériser l'élément intentionnel de l'infraction ; qu'ainsi, faute d'avoir établi que la prévenue se serait véritablement affiliée à l'entente en ayant la volonté de commettre l'infraction d'importation non autorisée de stupéfiants, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 450-1 du Code pénal" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré la prévenue coupable ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-19, 132-24 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Hadjira X... à la peine de douze ans d'emprisonnement assortie d'une période de sûreté des deux-tiers ;

"aux motifs qu'Hadjira X..., déjà titulaire de deux condamnations pour infractions à la législation sur les stupéfiants et se trouvant en état de récidive légale, apparaît comme l'élément permanent de cette organisation, participant de façon prépondérante à ce trafic de drogue par les instructions qu'elle donnait en vue de sa préparation et de sa réalisation ; que son mutisme est révélateur de son appartenance à un réseau d'envergure, car elle connaissait nécessairement les moyens de contacter les fournisseurs, les intermédiaires et les acheteurs ; que de telles transactions ne sauraient être le résultat de rencontres fortuites ; que ces éléments justifient qu'une peine privative de liberté soit prononcée à son encontre, en prenant en considération les particularités des infractions commises, l'importance de sa participation aux faits qui lui sont reprochés ainsi que ses antécédents judiciaires et sa personnalité ;

"alors que les juridictions correctionnelles ne peuvent prononcer une peine d'emprisonnement ferme qu'après avoir spécialement motivé le choix d'une telle peine en fonction, d'une part, des circonstances de l'infraction et, d'autre part, de la personnalité de l'auteur ; qu'à ce titre, les juges répressifs doivent se livrer à un véritable examen des faits de la cause et de la personnalité de l'auteur, l'accomplissement de cet examen devant ressortir de la seule lecture de la motivation du prononcé de la peine ferme ; qu'ainsi, en se bornant à motiver le prononcé d'une peine de douze ans d'emprisonnement assortie d'une période de sûreté des deux-tiers à l'égard de la prévenue par une motivation abstraite et générale, reproduisant les termes de la loi, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Attendu que, pour condamner Hadjira X..., déclarée coupable d'infractions à la législation sur les stupéfiants et d'association de malfaiteurs, à une peine d'emprisonnement sans sursis, l'arrêt attaqué se détermine par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations répondant aux exigences de l'article 132-19 du Code pénal, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Pibouleau conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Roger conseiller rapporteur, MM. Challe, Dulin, Mme Thin, MM. Rognon, Chanut conseillers de la chambre, Mme de la Lance, MM. Soulard, Samuel conseillers référendaires ;

Avocat général : Mme Commaret ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-83953
Date de la décision : 03/12/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 4ème chambre, 07 mai 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 déc. 2003, pourvoi n°02-83953


Composition du Tribunal
Président : Président : M. PIBOULEAU conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.83953
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