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02/12/2003 | FRANCE | N°03-81334

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 décembre 2003, 03-81334


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux décembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI, les observations de la société civile professionnelle BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Roger,

contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 6 décembre 2

002, qui, pour exercice illégal de la médecine, l'a condamné à 3 000 euros d'amende dont ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux décembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI, les observations de la société civile professionnelle BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Roger,

contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 6 décembre 2002, qui, pour exercice illégal de la médecine, l'a condamné à 3 000 euros d'amende dont 1 500 euros avec sursis, et qui a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 49 du Traité CE (ancien article 59 du Traité CEE), L. 4161-1 et L. 4161-5 du Code de la santé publique, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Roger X... coupable d'exercice illégal de la médecine ;

"aux motifs que Roger X... communique un certificat d'inscription à la chambre de commerce et d'industrie de Fribourg comme "Lebensberatung" depuis le 18 juin 1997, des publications sur les tradipraticiens guérisseurs et 27 attestations de clients allemands et français satisfaits de ses services ; que, cependant les directives 89/48 CEE, 92/51 CEE et 1999/42 CEE sont claires, à savoir que les connaissances et compétences doivent être attestées par un diplôme, un certificat ou un titre délivré par l'Etat membre correspondant à ceux exigées par les dispositions nationales ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, Roger X... n'ayant aucun diplôme, notamment de médecin, ni français ni allemand ; que si la profession de médecin est reconnue en France, celle de magnétiseur, reconnue en Allemagne, ne l'est pas en France ; qu'il n'a au demeurant pas communiqué de certificat attestant de ses compétences à la suite d'un stage ou d'une épreuve-test ; qu'il n'appartient à aucune association ou syndicat professionnel et n'est donc soumis à aucun contrôle ni à des règles déontologiques ; qu'il reconnaît se livrer à ses activités de manière habituelle et suivie ; qu'ainsi le prévenu ne rapporte pas la preuve qu'il est titulaire d'un diplôme allemand figurant sur la liste de ceux permettant l'exercice dans tous les Etats membres de la Communauté européenne ; que, dès lors, les articles L. 4161-1 et L. 4161-5 du Code de la santé publique ne constituent pas une entrave à la libre circulation des prestations de service pour les titulaires de diplômes ;

"alors que les restrictions à la libre prestation des services à l'intérieur de la communauté sont interdites à l'égard des ressortissants des Etats membres établis dans un pays de la Communauté autre que celui du destinataire de la prestation ; que cette interdiction fait obstacle à ce que soit pénalement condamné celui qui, établi dans un pays membre où il exerce légalement une activité, fournit des services analogues dans un autre Etat membre, peu important que ceux-ci n'y soient ni réglementés ni reconnus ;

que, dès lors, en se fondant, pour déclarer Roger X... coupable d'exercice illégal de la médecine, pour avoir en France une activité de magnétiseur, sur la circonstance, par elle-même insuffisante, qu'il ne justifiait pas être titulaire d'un diplôme figurant sur la liste de ceux en permettant l'exercice dans tous les Etats membres tout en constatant qu'il est inscrit à la Chambre de commerce et d'industrie de Fribourg depuis le 18 juin 1997 pour exercer cette activité qui est légale en Allemagne, la cour d'appel a violé les textes ci-dessus mentionnés" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Roger X..., ressortissant français, inscrit à la chambre de commerce et d'industrie de Fribourg (Allemagne) en qualité de "Lebensberatung", c'est-à-dire "conseil en chose de la vie", a accompli en France des impositions de mains en vue de guérir et soulager, a procédé à un diagnostic par interprétation des résultats d'une analyse médicale, a délivré des conseils concernant des régimes alimentaires, a sollicité l'interruption d'un traitement médical, a délivré un médicament et a formulé des commentaires sur divers produits prescrits par des médecins ; qu'il a été poursuivi pour exercice illégal de la médecine sur le fondement des articles L. 4161-1 et L. 4161-5 du Code de la santé publique ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable de ce délit, les juges d'appel, qui énoncent que les dispositions pénales précitées ne constituent pas une entrave à la libre prestation de services, relèvent que Roger X... ne justifie d'aucun diplôme, certificat, titre ou attestation de compétence, qui lui permettraient, conformément aux directives communautaires sur la reconnaissance mutuelle des diplômes, d'exercer l'activité de médecin dans la Communauté ; qu'ils ajoutent que l'intéressé se livre de manière habituelle à une activité qui l'amène à élaborer des diagnostics et à participer à des traitements ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision au regard des articles L. 4161-1 et L. 4161-5 du Code de la santé publique, sans méconnaître le principe de libre prestation de services garanti par les articles 49 et 50 du Traité instituant la communauté européenne ;

Qu'en effet, réservant l'exercice de la médecine aux personnes titulaires des diplômes, certificats ou titres prévus par l'article L. 4131-1, 1 et 2 , dudit Code, les articles L. 4161-1 et L. 4161-5, applicables sans distinction à tous les prestataires exerçant sur le territoire français, sont justifiés par la protection de la santé publique, mesure impérieuse d'intérêt général dont ces textes poursuivent la réalisation de façon proportionnée ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Farge conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Agostini conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-81334
Date de la décision : 02/12/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

COMMUNAUTES EUROPEENNES - Libre prestation des services - Professions médicales - Ressortissant communautaire non titulaire des diplômes, certificats ou titres exigés par le Code de la santé publique - Exercice illégal de la médecine - Compatibilité.

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin-chirurgien - Exercice illégal de la profession - Communautés européennes - Libre prestation des services - Compatibilité

Les articles L. 4161-1 et L. 4161-5 du Code de la santé publique, qui réservent l'exercice de la médecine aux personnes titulaires des diplômes, certificats ou titre prévus par l'article L. 4131-1, 1° et 2°, dudit Code, ne sont pas contraires au principe de libre prestation de services garanti par les articles 49 et 50 du Traité instituant la Communauté européenne. En effet, applicables sans distinction à tous les prestataires exerçant sur le territoire français, ces textes sont justifiés par la protection de la santé publique dont ils poursuivent la réalisation de façon proportionnée.. En conséquence, est justifié l'arrêt déclarant coupable du délit d'exercice illégal de la médecine, un ressortissant français installé en Allemagne en qualité de " conseil en choses de la vie " et qui n'est titulaire d'aucun des diplômes, certificats, titres ou attestations de compétence qui lui permettraient d'accomplir en France de façon habituelle des actes relevant de l'art médical.


Références :

Code de la santé publique L. 4161-1, L. 4161-5, L. 4131-1, 1° et 2°
Traité CE art. 49, 50

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar (chambre correctionnelle), 06 décembre 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 déc. 2003, pourvoi n°03-81334, Bull. crim. criminel 2003 N° 227 p. 920
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2003 N° 227 p. 920

Composition du Tribunal
Président : M. Farge, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Mme Commaret.
Rapporteur ?: Mme Agostini.
Avocat(s) : la SCP Bachellier et Potier de la Varde.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:03.81334
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