AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 30 janvier 1998, avant sa mise en redressement judiciaire, la Société Mauzaire a cédé, selon les modalités de la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981, à la Banque parisienne de crédit aux droits de laquelle se trouve la société Fortis banque France, trois créances qu'elle détenait sur la société Sainte-Lucie ; que celle-ci, à laquelle la cession avait été notifiée le 9 février 1998, s'est opposée au règlement sollicité par la banque en faisant valoir qu'une saisie-attribution avait été pratiquée entre ses mains, le 6 février 1998, sur les mêmes créances par la société Oltan Boyer ; qu'à l'audience du tribunal de commerce devant lequel la société Sainte-Lucie avait été assignée, le représentant légal de celle-ci a indiqué qu'il attendait de savoir à qui il devait payer la somme litigieuse ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 42 de la loi du 9 juillet 1991, 1 et 4 de la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 devenus les articles L. 313-23 et L. 313-27 du Code monétaire et financier ;
Attendu que pour rejeter les demandes en paiement de la Banque parisienne de crédit, l'arrêt retient que le 6 février 1998, la société Sainte-Lucie n'avait pas encore reçu notification par la Banque parisienne de crédit de la cession de créance de sorte qu'elle pouvait se libérer valablement entre les mains de la société Oltan Boyer des sommes dont elle était débitrice à l'égard de la société Mauzaire ;
Attendu qu'en statuant ainsi alors, qu'indépendamment de sa notification au débiteur cédé, la cession avait, selon les dispositions de l'article 4, alinéa 1, de la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 devenu l'article L. 313-27 du Code monétaire et financier, pris effet entre les parties et était devenue opposable aux tiers, le 30 janvier 1998, date portée sur le bordereau, ce dont il résultait que les créances cédées étant sorties, ce même jour, du patrimoine de la société Mauzaire par un acte opposable à la société Oltan Boyer, elles n'étaient plus susceptibles d'être appréhendées par cette dernière, le 6 février 1998, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 1240 du Code civil ;
Attendu que pour statuer comme il a fait, l'arrêt retient encore que le paiement effectué, de bonne foi, par la société Sainte-Lucie au créancier ayant pratiqué une saisie-attribution antérieurement à la réception de la notification, avait été libératoire ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors, qu'à le supposer avéré, ce paiement, intervenu en cours de procédure, alors que la société Sainte-Lucie était informée de la cession, n'était pas libératoire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 janvier 2001, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;
Condamne la société Oltan Boyer et la société Sainte Lucie aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille trois.