AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 novembre 2000), que le Crédit commercial de France (la banque) a consenti divers prêts aux sociétés civiles immobilières des Bus, du Galop et du Lac, dont M. Raymond de X... était le gérant, garantis par le cautionnement de M. de X... pour le crédit octroyé à la première, ceux donnés par M. de X..., son épouse et leurs deux enfants, Laurent et Pascale pour la deuxième, et ceux de M. et Mme de X... pour la dernière ; que, dans le même temps, les comptes courants ouverts à la banque au nom de ces sociétés, du gérant et de son épouse ont présenté des soldes débiteurs ;
que les SCI et M. Raymond de X... ont été mis en redressement judiciaire le 10 août 1995, M. Y... étant désigné administrateur de M. de X... et des trois sociétés ; qu'après avoir déclaré sa créance au titre des prêts et des soldes débiteurs des comptes courants, la banque a assigné en paiement M. Y..., ès-qualités, ainsi que les consorts de X..., Laurent de X... ayant, après le décès de son père, accepté la succession sous bénéfice d'inventaire tandis que Mme et Mlle de X... y renoncaient ; que M. Y..., ès qualités, et les consorts de X... se sont opposés à la demande en prétendant que la banque avait maintenu les diverses sociétés du "groupe" de X... artificiellement en activité par l'octroi de crédits abusifs ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que les consorts de X... et M. Y... en sa qualité d'administrateur des SCI du Lac, des Bus et du Galop et de M. Raymond de X... font grief à l'arrêt d'avoir condamné M. Y... , ès-qualités, à payer diverses sommes au Crédit commercial de France et d'avoir rejeté sa demande de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1 / que l'administrateur judiciaire a qualité pour engager, au nom du débiteur en redressement judiciaire, la responsabilité du banquier ayant accordé un soutien abusif au débiteur, ne serait-ce que pour s'opposer à une action du banquier dirigée contre lui (violation de l'article L. 621-22 du Code de commerce) ;
2 / que l'arrêt du 21 avril 2000 avait ordonné la réouverture des débats pour permettre aux consorts de X..., qui n'avaient pas formulé de prétentions dans les conclusions signifiées le 18 juin 1999, d'éclairer la cour d'appel sur les demandes présentées au nom de chacun d'eux et la qualité de caution ou d'héritier en laquelle ils étaient recherchés, de sorte que les conclusions répondant à cette injonction signifiées le 2 octobre 2000 ne valaient pas abandon par M. Y... de ses prétentions et moyens antérieurement invoqués (violation de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile) ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt du 21 avril 2000 a donné injonction aux appelants, au nombre desquels figurait M. Y... , ès-qualités, de déposer des conclusions récapitulatives au sens des dispositions de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile ; que celui-ci n'ayant pas récapitulé ses prétentions et moyens précédemment présentés, c'est à bon droit que la cour d'appel a dit qu'il était réputé les avoir abandonnés ;
Attendu, en second lieu, qu'il importe peu que la cour d'appel ait confirmé le jugement en ce qu'il avait dit irrecevable la demande de dommages-intérêts formulée par M. Y... , ès qualités, dès lors que, ayant constaté que ce dernier avait abandonné ses moyens et prétentions, elle avait ainsi fait ressortir qu'il ne présentait aucune demande ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le second moyen :
Attendu qu'il est fait reproche à l'arrêt d'avoir condamné les consorts de X... à payer diverses sommes au Crédit commercial de France et d'avoir rejeté leur demande de dommages-intérêts contre celui-ci, alors, selon le moyen, que le banquier engage sa responsabilité civile en cas d'octroi d'un crédit excessif à des entreprises dont la situation aurait dû commander une plus grande prudence, bien qu'elle ne fût pas irrémédiablement compromise ; que la cour d'appel aurait dû rechercher, comme elle y était invitée, si les nombreux concours consentis par le CCF n'étaient pas, par leurs montants excessifs et leurs modalités, inadaptés aux besoins des sociétés (manque de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil) ;
Mais attendu, qu'appréciant souverainement les éléments de preuve versés aux débats, la cour d'appel a retenu que les consorts de X... ne démontraient pas la faute commise par la banque dans l'octroi de ses concours ; qu'elle a ainsi procédé à la recherche invoquée ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts de X... et M. Y... , ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille trois.