AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Lubeck investissements et à la société Lubeck lab de ce qu'elles se sont désistées de leur pourvoi en tant que dirigé contre la Société des Colonnes ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 décembre 2000), rendu en matière de référé, que, suivant acte sous seing privé du 16 février 1996, la Société des Colonnes a donné à bail commercial à la société Cinéma d'archives et professionnel (la société CAP) des locaux situés 12 bis, rue des Colonnes du Trône à Paris ; que, par jugement du 28 octobre 1999, le tribunal de commerce a prononcé la résolution du plan de continuation dont bénéficiaient les sociétés CAP et Rénov'films et leur liquidation judiciaire, en autorisant la poursuite de leur activité jusqu'au 15 décembre 1999 ; que, par ordonnance du 2 décembre 1999, le juge-commissaire à la liquidation judiciaire de ces sociétés a autorisé M. X..., mandataire-liquidateur à ladite liquidation, à céder à la société Concorde investissements le fonds de commerce situé rue des Colonnes du Trône avec l'engagement de poursuivre certains contrats en cours ; que, par nouvelle ordonnance du 16 décembre 1999, le juge-commissaire a autorisé la société Lubeck investissements à se substituer à la société Concorde investissements dans l'acquisition du fonds de commerce des sociétés CAP et Rénov'films selon les conditions et modalités fixées dans sa précédente décision ; que la Société des Colonnes a assigné en référé M. X..., ès qualités, en résiliation du bail et en paiement des loyers ; que M. X... a judiciairement demandé qu'il soit constaté que l'obligation de payer les loyers pesait sur la société Lubeck investissements et que celle-ci soit condamnée à le garantir des condamnations prononcées au profit de la Société des Colonnes pour les loyers postérieurs au 14 décembre 1999, date de prise de possession des locaux par la société cessionnaire ;
Attendu que la société Lubeck investissements et la société Lubeck lab, venant aux droits de celle-ci, font grief à l'arrêt d'avoir dit que M. X..., ès qualités, serait garanti par la société Lubeck investissements des condamnations prononcées à son encontre à payer à titre provisionnel une certaine somme pour la période comprise entre le 14 décembre 1999 et la restitution par la société Lubeck investissements des clefs, alors, selon le moyen :
1 / que constitue une obligation sérieusement contestable celle qui pèserait sur la société Lubeck investissements, auteur d'une offre conditionnelle d'acquisition du fonds de commerce avec la clientèle et les machines nécessaires à l'exploitation, acquisition qui n'avait pu être réalisée en raison de l'inexistence du fonds de commerce sur lequel aurait porté la cession, afin de garantir le liquidateur judiciaire des sociétés dont le fonds était concerné par l'offre, M. X..., jusqu'à une certaine date, des condamnations provisionnelles prononcées contre lui au profit du bailleur des locaux occupés par lesdites sociétés, dès lors qu'il fallait trancher la question de savoir si les conditions assortissant l'offre avaient été accomplies et si la cession était concevable nonobstant l'inexistence du fonds de commerce, objet de la cession (violation des articles 809 du nouveau Code de procédure civile et L. 622-18 du Code de commerce) ;
2 / que la cour d'appel ne pouvait condamner la société Lubeck investissements à garantir M. X... jusqu'à la restitution des clefs le 30 juin 2000 sans répondre aux moyens des conclusions d'appel de cette société, faisant valoir qu'elle avait quitté les lieux le 23 mars 2000, les clefs étant restées en possession des salariés de la liquidation judiciaire, comme le confirmait le courrier reçu de l'un des salariés le 19 juin 2000, lequel avait restitué une clef remise immédiatement à M. X..., ce qui rendait entièrement contestable l'obligation à garantie après le 27 mars 2000 (violation des articles 455 et 809 du nouveau Code de procédure civile) ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt constate que la société Lubeck investissements a exploité le fonds de commerce situé dans les locaux loués ; qu'ayant ainsi fait ressortir que le paiement des loyers était due en raison de l'occupation de ces locaux, la cour d'appel a justement retenu que la société Lubeck investissements ne pouvait pas sérieusement prétendre qu'elle n'était tenue de verser aucune contrepartie alors qu'elle avait occupé les locaux ;
Et attendu, d'autre part, qu'ayant souverainement constaté que la société Lubeck investissements n'avait restitué les clefs des locaux que le 30 juin 2000, la cour d'appel, qui a ainsi répondu aux conclusions invoquées, a pu condamner la société Lubeck investissements à garantir M. X..., ès qualités, jusqu'à la restitution des clefs le 30 juin 2000 ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Lubeck investissements et Lubeck lab aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les sociétés Lubeck investissements et Lubeck lab à payer à M. X..., ès qualités, la somme de 1 800 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille trois.