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26/11/2003 | FRANCE | N°00-10079

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 novembre 2003, 00-10079


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 septembre 1999), que la société Concepts, études, coordination + informatique (la société CEC + I) a conclu avec les sociétés Serete, devenue CIPM international, et Serete régions, aux droits de laquelle se trouve la société Jacobs Serete, une convention stipulant notamment que ces dernières consulteraient prioritairement la société CEC + I pour la sous-traitance de certaines missions ; que la société

CEC + I, invoquant l'inexécution de cet engagement, a demandé que les société...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 septembre 1999), que la société Concepts, études, coordination + informatique (la société CEC + I) a conclu avec les sociétés Serete, devenue CIPM international, et Serete régions, aux droits de laquelle se trouve la société Jacobs Serete, une convention stipulant notamment que ces dernières consulteraient prioritairement la société CEC + I pour la sous-traitance de certaines missions ; que la société CEC + I, invoquant l'inexécution de cet engagement, a demandé que les sociétés Serete et Serete régions soient condamnées à lui payer des dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen, pris en ses cinq branches :

Attendu que les sociétés Serete et Serete régions font grief à l'arrêt de les avoir condamnées à payer à la société CEC + I la somme provisionnelle de 500 000 francs, alors, selon le moyen :

1 / qu'en constatant, d'une part, que les parties "ont (...) manifestement écarté toute référence à un engagement de la société Serete et de ses filiales à confier à la société CEC + I un certain nombre de missions de nature à générer pour cette société un chiffre d'affaires de cinq millions de francs", que "seul peut être retenu le sens courant du terme consulter à savoir demander son avis" et d'autre part "qu'il est manifeste que la consultation prioritaire de la société CEC + I a pour finalité l'attribution en sous-traitance à la société CEC + I de missions confiées à la société Serete et à ses filiales dans un domaine très précis intitulé Electricité/Automatismes industriels", la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / qu'en fondant sa décision sur deux interprétations contraires entre elles des mêmes conventions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

3 / qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'expression "consultera prioritairement pour la sous-traitance de mission" signifiait "demander son avis" et non "confiera la sous-traitance de mission" et que les parties avaient manifestement écarté tout engagement de la société Serete et de ses filiales à confier à la société CEC + I un certain nombre de missions de sous-traitance de nature à générer un chiffre d'affaires de l'ordre de cinq millions de francs ; qu'il (s') en déduit que les sociétés Serete et Serete régions n'ont pu faire perdre une chance à la société CEC + I d'obtenir des missions de sous-traitance ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1134 du Code civil ;

4 / qu'en toute hypothèse le débiteur d'une obligation de moyens n'engage sa responsabilité que s'il n'a pas mis en oeuvre tous les moyens pour honorer sa mission ; qu'il ne s'oblige pas à obtenir un résultat ; qu'en l'espèce, en ne recherchant pas, bien qu'y étant invitée, si l'obligation à la charge des sociétés Serete et Serete régions n'était pas une obligation de moyens en sorte que la seule absence de consultation de la société CEC + I ne pouvait suffire à engager leur responsabilité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du Code civil ;

5 / que celui qui ne peut exécuter son obligation en raison de la conjoncture économique et d'une manière générale en raison d'une cause étrangère, n'engage pas sa responsabilité ; qu'en l'espèce, les motifs invoqués par les sociétés Serete et Serete régions et tenant à la conjoncture économique étaient donc de nature à exonérer de leur responsabilité ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'interprétant la stipulation litigieuse par référence au sens que lui conférait l'acte entier, la cour d'appel a relevé que si les sociétés Serete et Serete régions ne s'étaient pas engagées à confier à la société CEC + I un certain nombre de missions de sous-traitance de nature à engendrer un chiffre d'affaires déterminé, elles n'en avaient pas moins contracté l'obligation de consulter prioritairement cette dernière en vue de l'attribution éventuelle de missions de cette nature ; qu'en l'état de cette interprétation exempte de contradiction, la cour d'appel a exactement décidé que les sociétés Serete et Serete régions avaient, en s'abstenant de consulter la société CEC + I, privé celle-ci de toute chance d'obtenir des missions de sous-traitance ;

Et attendu, en second lieu, que l'engagement de consulter prioritairement une personne en vue de contracter éventuellement avec elle, dont l'exécution n'est affectée d'aucun aléa, constitue une obligation de résultat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, devant laquelle il n'était pas allégué que les sociétés Serete et Serete régions auraient été empêchées d'exécuter cette obligation par des circonstances constitutives d'une cause étrangère, a décidé à bon droit qu'en s'abstenant de consulter la société CEC + I, les sociétés Serete et Serete régions avaient commis une faute engageant leur responsabilité ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que les sociétés Serete et Serete régions font encore le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :

1 / qu'une société à responsabilité limitée est représentée par son gérant ; qu'une société anonyme est représentée par le président du conseil d'administration et par les directeurs généraux ; qu'en l'espèce, M. X..., qui occupait à la fois les fonctions de gérant de la société CEC + I et celles de dirigeant des sociétés Smet et Serete régions représentait ces différentes sociétés et les engageait par ses décisions ;

qu'il s'ensuit que la société CEC + I avait nécessairement entériné les décisions prises par les sociétés Serete et Serete régions ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 49, 113, alinéas 1 et 2, 117, alinéa 2, de la loi du 24 juillet 1966 ;

2 / qu'il résulte des constatations souveraines de l'arrêt que les faits reprochés aux sociétés Serete et Serete régions seraient survenus à compter du 1er septembre 1994 et que M. X... exerçait encore à cette date ses fonctions au sein des sociétés CEC + I, Smet et Serete régions ; qu'il s'ensuit qu'à cette date la société CEC + I avait nécessairement entériné les décisions prises par les sociétés Serete et Serete régions ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu que le seul fait, à le supposer établi, que la société créancière et la société débitrice aient des dirigeants communs ne peut suffire, en l'absence de toute autre circonstance, à faire preuve de la renonciation de la première à invoquer les manquements contractuels de la seconde ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a exactement décidé que le seul fait que M. X... ait exercé des responsabilités tant au sein de la société CEC + I que des sociétés Smet et Serete régions ne saurait valoir entérinement par la première du comportement des secondes ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le troisième moyen :

Attendu que les sociétés Serete et Serete régions font enfin grief à l'arrêt d'avoir ordonné une mesure d'expertise destinée à fournir à la cour d'appel tous les éléments lui permettant d'évaluer le préjudice subi par la société CEC + I, alors, selon le moyen, qu'en aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations souveraines de l'arrêt que pour fixer son préjudice la société CEC + I avait produit des éléments insuffisants pour statuer ;

qu'en ordonnant cependant une mesure d'instruction en vue de suppléer la carence de la société CEC + I constatée par elle, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article 146, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir énuméré les éléments de preuve produits par la société CEC + I et retenu que ces éléments étaient insuffisants pour statuer sur l'étendue du préjudice subi, la cour d'appel, en nommant un expert chargé de recueillir toutes pièces utiles à l'évaluation du préjudice et notamment celles, détenues par la société Serete et ses filiales, auxquelles la société CEC + I n'avait pas accès, loin de violer l'article 146, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, a fait l'exacte application du premier alinéa du même texte ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés CIPM international et Jacobs Serete aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette leur demande ; les condamne à payer la somme globale de 1 800 euros à la société Concepts, études, coordination + informatique ; les condamne à payer la somme globale de 1 500 euros à Mme Y..., ès qualités, la société Barbier Frinault et la société Ernst and Young audit, ès qualités ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 00-10079
Date de la décision : 26/11/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (5e chambre, section A), 29 septembre 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 nov. 2003, pourvoi n°00-10079


Composition du Tribunal
Président : Président : M. TRICOT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:00.10079
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