AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que la société française Ammann-Yanmar, qui fabrique des machines de travaux publics, a chargé la société belge Zwaans de la distribution exclusive de ses produits en Belgique, suivant contrat du 17 mai 1990, résilié par le concédant le 15 décembre 1995 à compter du 1er janvier suivant ; que la société Zwaans ayant demandé devant le tribunal de commerce de Saint-Dizier des dommages-intérêts à la société Ammann-Yanmar pour ne pas avoir respecté le préavis d'un an convenu à cet accord, l'arrêt attaqué, faisant application de la loi belge du 27 juillet 1961, a dit que la société Ammann-Yanmar avait violé le préavis qu'elle avait donné ;
Sur le premier moyen, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe au présent arrêt :
Attendu que sous couvert du grief infondé de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en cause les constatations et les appréciations par lesquelles la cour d'appel a souverainement estimé que le contrat du 17 mai 1990 avait été accepté par les deux parties, même s'il n'avait pas été signé et si certaines stipulations n'avaient pas fait l'objet d'exécution ; que le moyen est sans fondement ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu l'article 4, paragraphe 2, de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles ;
Attendu que, selon ce texte, en l'absence de choix par les parties, le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits ; qu'est présumé présenter de tels liens, celui où le débiteur qui doit la prestation caractéristique a, au moment de la conclusion du contrat, sa résidence habituelle; que pour un contrat de distribution, la fourniture du produit est la prestation caractéristique ;
Attendu que pour appliquer la loi belge du 27 juillet 1961, l'arrêt attaqué retient que les ventes passées entre le concédant et le concessionnaire étant des contrats distincts du contrat de concession, la prestation caractéristique du contrat était la distribution, laquelle incombait à la société Zwaans domiciliée en Belgique, de sorte que ce contrat présentant les liens les plus étroits avec la Belgique devait être soumis à la loi de cet Etat ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la fourniture du produit émanait de la société française Ammann-Yanmar et que l'arrêt avait relevé qu'il n'y avait pas d'éléments suffisants pour écarter la présomption de l'article 4, paragraphe 2, de la Convention de Rome, de sorte que la loi française et non la loi belge était applicable au contrat du 17 mai 1990, la cour d'appel a violé, par fausse application, le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen :
CASSE ET ANNULE, en ce qu'il a fait application de la loi belge au contrat du 17 mai 1990, l'arrêt rendu le 19 décembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille trois.