AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 septembre 1999), que la BNP (la banque) a fait pratiquer une saisie-attribution, le 4 mars 1996, entre les mains de la société Gestrim Victoire sur les loyers que celle-ci avait mandat d'encaisser pour le compte de la SCI Le Clos Saint-Gênes (la SCI) pour avoir paiement de la somme de 9 009 549,80 francs que cette dernière lui avait empruntée ; qu'après la mise en liquidation judiciaire de la SCI, le 8 avril 1997, la SCP Mizon-Thoux, désignée comme liquidateur, a assigné la banque devant le tribunal de commerce afin de la voir condamnée à rapporter à la liquidation judiciaire les sommes que lui avait versées la société Gestrim Victoire postérieurement à l'ouverture de la procédure collective et demander que cette société se libère entre ses mains des sommes perçues pour le compte de la SCI ; qu'après avoir rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la banque, le tribunal a accueilli la demande ; que la banque a relevé appel du jugement ; que le liquidateur a invoqué l'irrecevabilité de l'appel comme étant tardif ;
Sur le premier moyen, après avertissement donné aux parties :
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré l'appel recevable alors selon le moyen, que le délai pour interjeter appel d'un jugement rendu sur le fondement de la loi du 25 janvier 1985 et du décret du 27 décembre 1985 relatif au redressement et à la liquidation judiciaires est de dix jours à compter de la notification aux parties ; que ce délai s'applique à tous les jugements rendus sur le fondement de ces textes ; qu'en l'espèce, pour déclarer recevable l'appel formé par la BNP, la cour d'appel a décidé que ce délai de dix jours n'était pas applicable car la décision frappée d'appel n'était pas mentionnée à l'article 171 de la loi de 1985 ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 157 du décret du 27 décembre 1985 ;
Mais attendu que le jugement de redressement ou de liquidation judiciaire est sans effet sur la saisie-attribution ; qu'il s'ensuit que le jugement ayant condamné le créancier saisissant à rapporter à la liquidation les sommes reçues postérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire, au titre de la saisie-attribution pratiquée antérieurement, n'est pas rendu en matière de redressement et de liquidation judiciaires ; que, dès lors, l'appel de ce jugement est soumis au droit commun ; que, par ce motif de pur droit, l'arrêt se trouve justifié ;
que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le second moyen :
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le moyen, que la saisie-attribution d'une créance à exécution successive pratiquée avant l'ouverture d'une procédure collective ne produit pas d'effet sur les sommes échues après le jugement d'ouverture de la procédure, et donc disponibles seulement après l'ouverture de cette procédure ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1er et 152 de la loi du 25 janvier 1985, et les articles 13 et 43 de la loi du 9 juillet 1991 ;
Mais attendu qu'il résulte des articles 13 et 43 de la loi du 9 juillet 1991 et des articles 69 et suivants du décret du 31 juillet 1992, que la saisie-attribution d'une créance à exécution successive, pratiquée à l'encontre de son titulaire avant la survenance du jugement d'ouverture d'un redressement ou d'une liquidation judiciaires de celui-ci, poursuit ses effets sur les sommes échues en vertu de cette créance, après ledit jugement ; que, dès lors, la cour d'appel qui a retenu que la saisie avait définitivement produit son effet attributif avant le jugement de liquidation judiciaire de la société, a décidé, à bon droit, de rejeter la demande de remboursement des loyers ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCP Mizon-Thoux, ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette toutes les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille trois.