AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 143-14 du Code du travail et 2277 du Code civil ;
Attendu que M. X... a été embauché en qualité de cadre technique par la société Dicker et Cie en juin 1971 et a pris sa retraite en 1994 ; que, le 6 décembre 1982, une "convention de retraite" avait été conclue auprès d'une compagnie d'assurances pour constituer, selon le salarié, un complément de retraite ; que, devant le refus de l'employeur de lui réserver le capital ainsi constitué, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de ce capital ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande du salarié, la cour d'appel énonce que si la souscription faite par l'employeur d'une assurance lui permettant, selon lui, d'assumer l'obligation de payer l'indemnité de départ à la retraite prévue à l'article L. 122-14-3 du Code du travail soumise, selon une jurisprudence constante, à la prescription trentenaire, il en va, en revanche, tout autrement de la souscription par la société Dicker d'une assurance pour le compte de M. X... qui constituerait pour celui-ci un avantage en nature ; que le droit allégué par lettre recommandée est celui de percevoir un avantage social constitué au fil de la relation de travail par le seul employeur qui a assuré le paiement de primes d'assurance capitalisées à la somme de 183 418,11 francs en application du contrat "vita" ; que cet avantage social est un avantage lié au contrat de travail et au statut de cadre, qu'il a comme tel un caractère salarial ; qu'il est exclu que la somme réclamée puisse avoir un caractère indemnitaire qui ferait double emploi avec l'indemnité de départ à la retraite qui a été par ailleurs réglée à M. X... ; qu'il s'agit donc bien d'une réclamation de nature salariale, comme résultant d'une contribution périodique de la société Dicker, en sus du salaire, présentée pour
la première fois le 9 avril 1999, alors que le salarié a fait valoir ses droits à la retraite le 1er février 1994 ; que la demande est, en conséquence, irrecevable en raison de la prescription acquise par les cinq années écoulées depuis la naissance du droit éventuel jusqu'à sa revendication en justice, par application des textes susvisés ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la demande de M. X... portait sur une somme payable en une seule fois et n'était donc pas soumise à la prescription quinquennale, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 juin 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne la société Dicker et Cie aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Dicker et Cie à payer à M. X... la somme de 1 200 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille trois.