AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 31 octobre 2000), que M. et Mme X... ont cédé un fonds de commerce de bar à la société Edelweiss ; que l'acte de cession mentionnait que les cédants étaient liés par un contrat de fourniture exclusive et par un prêt cautionné par le fournisseur et précisait que la société cessionnaire serait subrogée dans tous les droits et obligations en résultant et devrait en faire son affaire personnelle ; que le prêteur, invoquant la déchéance du terme stipulée en cas de cession du fonds de commerce, a obtenu le paiement du solde du prêt par la caution ; qu'après avoir désintéressé celle-ci, les cédants ont demandé que la société cessionnaire soit condamnée à leur rembourser cette somme ;
Attendu que la société Edelweiss fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande alors, selon le moyen :
1 ) que celui qui s'engage à reprendre la dette d'autrui s'oblige à se substituer à ce débiteur ; qu'en affirmant que la clause de l'acte de cession relative au contrat de fournitures ne prévoyait pas une substitution de débiteur tout en relevant qu'il résultait de cette clause que la société Edelweiss s'était engagée à reprendre la charge financière que représentait le remboursement du solde de l'emprunt contracté par les vendeurs, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'en évinçaient, a violé l'article 1134 du Code civil ;
2 ) que la substitution de débiteur ne peut s'opérer qu'avec l'accord du créancier ; qu'en faisant produire effet à l'engagement pris par l'acquéreur de supporter la charge financière que représentait le remboursement du solde de l'emprunt contracté par les vendeurs tout en constatant, implicitement mais nécessairement, que le créancier n'avait accepté ni que la société Edelweiss devienne son débiteur ni, a fortiori, que les époux X... soient déchargés de leur dette, la cour d'appel, qui, de nouveau, n'a pas tiré de ses constatations les conséquences qu'elles emportaient, a violé l'article 1275 du Code civil ;
3 ) que l'obligation dont l'exécution est impossible est nulle faute d'objet ; qu'en affirmant qu'il n'existait aucune incompatibilité entre l'obligation de reprise, par l'acquéreur du fonds, de la charge financière que représentait le paiement des échéances à venir de l'emprunt contracté par les vendeurs et l'article 3 du contrat de prêt, clause dont il résultait pourtant, dès lors qu'elle prévoyait la déchéance du terme en cas de cession amiable du fonds, que l'obligation de reprise était, ainsi que la société Edelweiss le faisait valoir dans ses conclusions, dépourvue d'objet faute de pouvoir être objectivement exécutée, la cour d'appel a violé l'article 1126 du Code civil, ensemble l'article 1108 du même Code ;
4 ) que la société Edelweiss faisait valoir que n'ayant perçu aucun centime sur les 200 000 francs qui avaient été prêtés aux époux X..., l'obligation contractée par elle de s'acquitter en leurs lieu et place du solde du prêt était dépourvue de cause ; qu'en affirmant que la société Edelweiss était tenue de s'acquitter du solde du prêt consenti aux époux X... sans répondre à ce moyen déterminant tiré de l'absence de cause de cette obligation, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la reprise par la société cessionnaire de la charge financière représentant le remboursement de l'emprunt avait fait partie des négociations et avait été acceptée par la société Edelweiss, que cette reprise n'était pas incompatible avec la déchéance du terme résultant de la cession du fonds de commerce et qu'il ne s'agissait pas en l'espèce d'une substitution de débiteur, la cour d'appel, qui, répondant par là-même aux conclusions prétendument délaissées, a ainsi fait ressortir que la société cessionnaire s'était engagée, à l'égard des cédants et en contrepartie des obligations mises à la charge de ceux-ci, à supporter une obligation ayant pour objet le montant du solde du prêt, a jugé à bon droit que cet engagement n'était pas soumis, dans les rapports entre les parties, à l'accord du créancier ;
que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Edelweiss aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la condamne à payer à M. et Mme X... la somme globale de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf octobre deux mille trois.