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30/09/2003 | FRANCE | N°01-43207

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 septembre 2003, 01-43207


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 29 mars 2001), que la société Pages jaunes a notifié à M. X..., qu'elle employait en qualité de chef du service télévente, son licenciement pour faute grave suivant lettre du 23 septembre 1994 ;

Sur les deux moyens réunis :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir débouté M. X... de ses demandes d'indemnités de rupture et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le premier moyen :

1

/ que le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 29 mars 2001), que la société Pages jaunes a notifié à M. X..., qu'elle employait en qualité de chef du service télévente, son licenciement pour faute grave suivant lettre du 23 septembre 1994 ;

Sur les deux moyens réunis :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir débouté M. X... de ses demandes d'indemnités de rupture et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le premier moyen :

1 / que le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; qu'en se bornant à constater que, dans sa requête à fin de constat, M. X... avait déclaré que son supérieur hiérarchique lui avait seulement signifié une mise à pied conservatoire avant licenciement, sans rechercher elle-même si la décision de ce supérieur hiérarchique ne devait pas être qualifiée de licenciement pour faute grave, au vu de l'ensemble des éléments soumis à son examen, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 12 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / que le licenciement prend effet à la date à laquelle il est notifié ; que, malgré son irrégularité, le licenciement verbal a pour effet de rompre le contrat de travail ; qu'un employeur ne peut revenir sur sa décision de licenciement qu'avec l'accord du salarié ; que le licenciement notifié par écrit postérieurement à un licenciement verbal ne régularise pas celui-ci, qui se trouve sans cause réelle et sérieuse ; qu'après avoir constaté que le lendemain du départ de l'entreprise de M. X..., son supérieur hiérarchique, M. Y... avait annoncé aux autres salariés le renvoi du salarié, fait vider son bureau et enlever son nom sur la porte de celui-ci, la cour d'appel, qui en a déduit que ces faits mettaient en évidence que le principe du licenciement était acquis, mais a cependant considéré que la décision prise la veille par M. Y... n'était pas une décision de rupture mais une mise à pied conservatoire et que le fait d'annoncer le lendemain le licenciement de l'exposant constituait une irrégularité de procédure, n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations de fait, violant ainsi par fausse application l'article L. 122-4, alinéa 1, du Code du travail ;

3 / que M. X... avait rappelé, dans ses conclusions d'appel, le contenu des nombreuses attestations versées aux débats dont il résultait qu'il avait été licencié verbalement pour la faute grave par son supérieur hiérarchique, M. Y..., le 8 septembre 1994 ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions d'appel, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

et, selon le second moyen :

1 / que ne caractérise pas une faute grave le fait, pour un supérieur hiérarchique, d'inviter des salariées à des repas à l'extérieur de l'entreprise en leur faisant croire qu'elles n'y seraient pas seules ou en leur demandant de s'y rendre avec leur véhicule personnel, quand, d'une part, ce supérieur hiérarchique prenait avec tous les salariés, de manière usuelle, des repas à l'extérieur de l'entreprise, que d'autre part, il n'abordait lors de ces repas que des sujets d'ordre professionnel, et qu'au surplus, il encourageait certaines salariées à "l'engueuler" et à "ne pas tenir compte de la hiérarchie avec lui", ce dont il résultait que les salariées avaient la liberté de dire ce qu'elles pensaient à leur supérieur hiérarchique sans risque d'être sanctionnées et donc à refuser les invitations litigieuses ; qu'en s'abstenant de rechercher si tel n'était pas le cas en l'espèce, après avoir pourtant relevé que M. X... prenait des repas avec tous les salariés de l'entreprise et passait beaucoup de temps avec chacun d'eux, et qu'au surplus, il encourageait certaines salariées à lui dire ce qu'elles pensaient, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail ;

2 / que ne caractérise pas davantage une faute grave le fait pour un supérieur hiérarchique de déclarer, lors de l'entretien préalable à son licenciement, que l'une des salariées qu'il avait sous ses ordres avait un comportement "détestable" lorsqu'elle "avait ses règles", ce qui l'amenait à avoir un "comportement plus directif" vis-à-vis d'elle ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail ;

3 / que ne constitue pas davantage une faute grave le fait pour un supérieur hiérarchique d'encourager une salariée à lui dire ce qu'elle pense pour obtenir d'elle un développement personnel sur le plan professionnel, les expressions utilisées telles que "engueulez-moi" s'expliquant par le contexte général de l'entreprise, le supérieur hiérarchique invitant fréquemment les salariés à prendre des repas à l'extérieur du lieu de travail ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail ;

4 / que ne constitue pas non plus une faute grave le fait pour un supérieur hiérarchique de poser à des salariées placées sous ses ordres des questions sur leur vie privée lorsque ces questions s'expliquant par les relations existant entre le supérieur hiérarchique et les salariées, générées notamment par des repas pris hors de l'entreprise et la liberté conférée par le supérieur hiérarchique aux salariés de lui dire ce qu'ils pensaient, ce dont il résultait que les salariés pouvaient refuser de répondre aux questions qu'il leur posait sur leur vie privée sans risquer d'être sanctionnés ; qu'en s'abstenant de rechercher si tel n'était pas le cas en l'espèce, après avoir pourtant relevé que M. X... prenait des repas avec tous les salariés de l'entreprise et passait beaucoup de temps avec chacun d'eux, et qu'au surplus, il encourageait certaines salariées à lui dire ce qu'elles pensaient, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail ;

5 / que ne constitue pas enfin une faute grave le seul fait pour un supérieur hiérarchique, dont la seule intention était de motiver professionnellement des salariées qui obtenaient de faibles résultats, de caresser une fois les cheveux de l'une de d'elles ou de dire à une autre qu'il la préférait en jupe et en talon et qu'elle était "bien roulée", dès lors qu'un tel comportement ne portait pas atteinte à l'intégrité de la personne, ne mettait pas son emploi en péril et n'était pas de nature à dégrader le climat de travail ; qu'en décidant que le comportement précité constituait une faute grave au seul motif qu'il mettait "mal à l'aise" les salariées plaignantes, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel qui, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a retenu, répondant ainsi aux conclusions en les écartant, que la mesure notifiée verbalement au salarié le 8 septembre 1994 et confirmée par une lettre envoyée le même jour était une mise à pied conservatoire et non un licenciement, en a exactement déduit que le licenciement avait été prononcé le 23 septembre 1994 ;

Attendu, ensuite, que la cour d'appel, qui a constaté que M. X... avait eu, pendant plusieurs mois, à l'égard de quatre jeunes collaboratrices placées sous sa responsabilité et qui rencontraient des difficultés professionnelles un comportement indélicat fait de questions sur leur vie privée, de commentaires sur leur physique ou leurs tenues vestimentaires, d'invitations pressantes à déjeuner et de gestes équivoques, que ne pouvait justifier une gestion, même dynamique, du personnel et qui avait provoqué un profond sentiment de malaise chez les intéressées, a pu décider que ces agissements rendaient impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis et qu'ils constituaient une faute grave ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Les Pages jaunes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 01-43207
Date de la décision : 30/09/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (5e Chambre B sociale), 29 mars 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 sep. 2003, pourvoi n°01-43207


Composition du Tribunal
Président : Président : M. CHAUVIRE conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:01.43207
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