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24/09/2003 | FRANCE | N°02-12858

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 septembre 2003, 02-12858


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu l'article 13 modifié de l'ordonnance du 10 septembre 1817 ;

Statuant sur la requête présentée par la SCP Torelli en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Image photogravure à l'encontre de l'avis émis le 22 novembre 2001 par le Conseil de l'ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation au sujet d'une action en responsabilité formée par lui contre M. X..., avocat à la Cour de Cassation :

Attendu que la

société Image photogravure (la SIP) a été mise en redressement puis liquidation judic...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu l'article 13 modifié de l'ordonnance du 10 septembre 1817 ;

Statuant sur la requête présentée par la SCP Torelli en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Image photogravure à l'encontre de l'avis émis le 22 novembre 2001 par le Conseil de l'ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation au sujet d'une action en responsabilité formée par lui contre M. X..., avocat à la Cour de Cassation :

Attendu que la société Image photogravure (la SIP) a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 25 septembre 1992 et 8 octobre 1993 ; que la SCP Torelli, désignée comme liquidateur, a demandé la condamnation des époux Y..., anciens dirigeants de la SIP, au paiement de tout ou partie des dettes sociales ; que le tribunal a condamné les époux Y... à payer la somme de 10 000 000 francs ;

que, par arrêt du 24 février 1997, la cour d'appel a annulé le jugement, dit que les époux Y... avaient commis une faute en ne déposant pas le bilan de l'entreprise dans les quinze jours de la date de cessation des paiements et, avant dire droit, a ordonné une expertise ; que, par arrêt du 24 janvier 2000, la cour d'appel a rejeté les prétentions du liquidateur ;

que par lettre du 2 mars 2000, M. Z..., conseil de la SCP Torelli, a saisi M. X... en lui demandant de lui donner un premier avis sur les chances de succès d'un pourvoi, lui précisant que la signification à partie de l'arrêt était intervenue le 8 février 2000 ; que n'ayant pas obtenu cet avis, M. Z... a adressé à M. X..., le 15 mars 2000, une seconde lettre par laquelle il lui a demandé de "formaliser un pourvoi conservatoire en attente de votre avis" ; qu'aucun pourvoi en cassation n'ayant été régularisé, le liquidateur a saisi le Conseil de l'ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation pour qu'il se prononce sur la responsabilité de M. X... et fixe son préjudice à la somme de 10 000 000 francs ;

Attendu que le Conseil de l'ordre a retenu que M. X... avait commis une faute en s'abstenant de régulariser le pourvoi, bien qu'il ait reçu l'instruction expresse de le faire de son correspondant, sans lui indiquer, en temps utile pour lui permettre de s'adresser à un autre avocat, les motifs qui s'opposaient à ce qu'il régularise cet acte de procédure ; qu'il a cependant considéré qu'aucun des moyens de cassation envisagés par la SCP Torelli dans sa requête ne présentait de chance d'aboutir en l'état d'un texte, l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985, qui met à la charge du demandeur la preuve de la faute de gestion imputable aux dirigeants, d'une jurisprudence qui laisse aux juges du fond le pouvoir souverain de décider de ne pas retenir la responsabilité d'un dirigeant social sur le fondement de ce texte et d'un rapport d'expertise qui, sauf sur des points mineurs, n'attribuait pas l'insuffisance d'actif à des fautes de gestion des dirigeants ; que, par délibération du 22 novembre 2001, le Conseil de l'ordre a, en conséquence, émis l'avis qu'en l'absence de lien de causalité entre la faute reprochée à M. X... et le préjudice allégué par la SCP Torelli, la responsabilité professionnelle de M. X... n'était pas engagée ;

Attendu que le liquidateur fait valoir que le Conseil de l'ordre ne pouvait se retrancher tout à la fois derrière le prétendu caractère facultatif de la sanction et le pouvoir souverain des juges du fond, qu'en l'espèce la cour d'appel ayant rejeté sa demande, non pour des raisons tirées de l'opportunité mais sur l'absence d'éléments objectifs de la responsabilité, sur lesquels la Cour de Cassation exerce son contrôle, il soutient que des moyens sérieux auraient pu être invoqués si le pourvoi avait été formé ; qu'ainsi, rappelant que la date de cessation des paiements de la SIP a été fixée au 1er octobre 1991, il reproche à la cour d'appel, qui a constaté que les époux Y... n'avaient pas procédé à sa déclaration dans le délai légal et qu'au vu des pertes 1991 et 1992, l'insuffisance d'actif s'était creusée d'environ 10 365 000 francs, de ne pas avoir tiré les conséquences légales de ses constatations ; que le liquidateur reproche aussi à la cour d'appel un manque de base légale au regard de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 pour s'être bornée à retenir d'une part que le montant du crédit-bail immobilier concernant un immeuble situé à Issy-les-Moulineaux n'avait pas fait l'objet de critique, qu'en outre il n'était pas démontré que les loyers étaient manifestement excessifs et d'autre part que les investissements directs réalisés en 1989, fussent-ils excessifs, n'étaient pas susceptibles de justifier une condamnation au paiement de l'insuffisance d'actif ; qu'il reproche enfin à la cour d'appel d'avoir méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile en ne répondant pas à des conclusions faisant valoir que les époux Y... s'étaient octroyé des salaires exorbitants en pleine période de difficulté de la SIP ; qu'en conséquence le liquidateur fait valoir que la faute commise par M. X... doit être regardée comme l'ayant privé de toute perspective certaine d'obtenir une contribution au paiement de l'insuffisance d'actif et demande de fixer le préjudice à la somme de 1 524 490 euros et de dire que cette somme sera assortie des intérêts à compter de la demande ;

Mais attendu que l'arrêt retient que les investissements réalisés en 1989 et en 1990 ne paraissent pas démesurés par rapport aux perspectives et au chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise, que s'agissant de l'immeuble d'Issy-les-Moulineaux, l'avance faite par la SIP, au bénéfice de la société Honorine, compense largement l'occupation gratuite des locaux par celle-là pendant les premiers mois et qu'il n'est pas démontré que les loyers, eu égard à la valeur locative des immeubles dans la zone considérée, soient manifestement excessifs ; que l'arrêt relève encore qu'une très faible part de l'insuffisance d'actif créée entre le 1er juillet 1991 et la fin du mois de septembre 1992 provient des fautes de gestion pouvant être reprochées aux dirigeants ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations et dès lors que la cour d'appel, qui, en application de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile, n'avait pas à répondre à des moyens réputés abandonnés puisque non repris dans les dernières écritures du liquidateur, n'a fait qu'user des pouvoirs qu'elle tient de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 624-3 du Code de commerce, en ne condamnant pas les dirigeants de la SIP au paiement des dettes sociales, les moyens proposés auraient été regardés comme mal fondés ;

Attendu en conséquence qu'en ne régularisant pas le pourvoi que le conseil de la SCP Torelli lui avait donné instructions de former, M. X... n'a pas privé cette dernière d'une quelconque chance d'obtenir la condamnation des dirigeants au paiement de tout ou partie de l'insuffisance d'actif de la société SIP ; que la demande en indemnisation formée par le liquidateur n'est donc pas fondée ;

PAR CES MOTIFS :

HOMOLOGUE, l'avis émis le 22 novembre 2001 par le Conseil de l'ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation :

REJETTE le recours formé par la SCP Torelli en sa qualité de liquidateur de la société Image photogravure ;

Condamne la SCP Torelli, ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 02-12858
Date de la décision : 24/09/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Avis du conseil de l'Ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, 22 novembre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 sep. 2003, pourvoi n°02-12858


Composition du Tribunal
Président : Président : M. TRICOT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.12858
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