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23/09/2003 | FRANCE | N°01-02915

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 23 septembre 2003, 01-02915


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que dans un document dénommé "décision à caractère normatif "n 1999-001 des 26-27 mars 1999, le Conseil national des barreaux a institué "le règlement intérieur harmonisé (RIH) des barreaux de France" et a enjoint à chaque barreau de l'insérer dans son propre règlement intérieur ; que le conseil de l'ordre des avocats au barreau de Bordeaux ayant procédé à cette intégration par délibérations du 4 octobre 1999, M. X..., avocat, président de la Selafa BJC

Bordeaux Juris-Conseil et un certain nombre d'autres avocats membres de cette st...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que dans un document dénommé "décision à caractère normatif "n 1999-001 des 26-27 mars 1999, le Conseil national des barreaux a institué "le règlement intérieur harmonisé (RIH) des barreaux de France" et a enjoint à chaque barreau de l'insérer dans son propre règlement intérieur ; que le conseil de l'ordre des avocats au barreau de Bordeaux ayant procédé à cette intégration par délibérations du 4 octobre 1999, M. X..., avocat, président de la Selafa BJC Bordeaux Juris-Conseil et un certain nombre d'autres avocats membres de cette structure ont saisi le bâtonnier d'une demande d'annulation de dispositions de l'article 12-3 du règlement intérieur ; que l'arrêt attaqué a, d'une part, "infirmé les décisions du conseil de l'ordre du 19 juin 2000 en ce qu'elles ont rejeté les recours concernant la délibération du conseil de l'ordre du 4 octobre 1999 ayant intégré en l'article 12-3, paragraphe 4, intitulé "périmètre", et en l'article 12-3, paragraphe 5, intitulé "incompatibilité", alinéa 2, du règlement intérieur du barreau de Bordeaux, les dispositions des articles 16-4 et 16-5, alinéa 2, du RIH et annulé cette délibération du 4 octobre 1999 sur l'article 12-3, paragraphe 4 et sur l'article 12-3 paragraphe 5, alinéa 2" ; qu'il a, d'autre part, confirmé les décisions du conseil de l'ordre du 19 juin 2000 en ce qu'elles ont rejeté les recours concernant la délibération du 4 octobre 1999 ayant intégré en l'article 12-3 paragraphe 3, intitulé "dénomination", 3e alinéa, et en l'article 12-3, paragraphe 4, intitulé "périmètre", les dispositions des articles 16-3, alinéa 3 et 16-4 du RIH et déclare valable cette délibération du 4 octobre 1999 sur l'article 12-3, paragraphe 3, alinéa 3 et sur l'article 12-3, paragraphe 4" ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe :

Attendu que la cour d'appel étant saisie d'un recours tendant à l'annulation des articles 12-3, paragraphes 3, 4 et 5 du règlement intérieur du barreau de Bordeaux adopté par délibération du Conseil de l'Ordre, reprenant les articles 16-3, 16-4 et 16-5 du RIH, se trouvait compétente pour en apprécier la légalité, peu important que ces textes aient résulté d'une délibération du conseil national des barreaux ;

que le moyen est dépourvu de fondement en ses trois branches ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe :

Attendu que l'arrêt attaqué retient exactement que les dispositions de l'alinéa 3 de l'article 67 de la loi du 31 décembre 1971 qui, en favorisant une information complète du public, ne font que régir à titre transitoire la situation des sociétés ou groupements de conseils juridiques affiliés à un réseau national ou international non exclusivement juridique, n'instaurent aucune interdiction à compter du 1er janvier 1997 pour tout avocat de faire mention de son appartenance à un tel réseau, de sorte que l'article 12-3, paragraphe 3 du règlement intérieur destiné à informer clairement le public n'est pas contraire à ces dispositions ; que le moyen, inopérant en sa première branche, n'est donc pas fondé en sa seconde ;

Mais sur le troisième moyen pris en sa première branche :

Vu les articles 17.1 , 5 et 10 , et 19, alinéa 1er, de la loi modifiée du 31 décembre 1971, ensemble l'article 53 de la même loi ;

Attendu que la fixation des règles de déontologie revêtant un caractère impératif pour la profession d'avocat, relève de la compétence du gouvernement agissant dans le respect des principes posés par l'article 53 de la loi susvisée ;

Attendu que pour rejeter la demande tendant à l'annulation de l'article 12-3 5, alinéa 2, du règlement intérieur, l'arrêt retient que cette restriction, limitée et aisément identifiable, de l'activité de l'avocat membre d'un réseau à l'égard de certains clients d'un commissaire aux comptes faisant partie du même réseau se justifiait par le caractère absolu et impératif du secret professionnel et la nécessité de l'absence de suspicion de la part des clients ;

Attendu qu'en statuant ainsi alors que les dispositions de l'article 12-3 5, alinéa 2, du règlement intérieur, quel qu'en soit le mérite, font interdiction à un avocat membre d'un réseau de prêter son concours à son client, même avec l'accord de celui-ci, si un autre membre du réseau contrôle ou certifie les comptes dudit client, notamment en qualité de commissaire aux comptes, la cour d'appel, qui a ainsi reconnu à un conseil de l'Ordre le pouvoir de créer une incompatibilité non prévue par une disposition légale ou réglementaire, a violé les textes susvisés ;

Sur le quatrième moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 12 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter les recours dirigés contre la délibération du conseil de l'Ordre ayant intégré en l'article 12-3 5, intitulé "dénomination" alinéa 3, les dispositions de l'article 16-5, alinéa 3, du RIH, l'arrêt retient que l'article 12-3 5 du règlement intérieur du barreau de Bordeaux, bien qu'étant une disposition générale excluant les avocats de tout réseau dont certains des membres perçoivent des honoraires soit d'une société pour laquelle un autre membre assure une mission de contrôle des comptes, soit de personnes physiques ou morales qui sont actionnaires de contrôle ou dirigeants d'une telle société, soit de membres du groupe de sociétés auxquelles elle appartient, ne fait pas l'objet de critiques dans les conclusions des auteurs du recours, bien qu'elles concluent à la nullité de l'ensemble de l'article 12-3 5 et ne peut dés lors pas faire l'objet d'une censure ;

Attendu qu'en statuant ainsi, tout en constatant que les appelants concluaient à la nullité de l'ensemble de l'article 12-3 5 et alors qu'il résultait de ses propres constatations que le conseil de l'Ordre avait, en adoptant une interdiction générale excluant certaines catégories d'avocats, crée une incompatibilité non prévue par une disposition légale ou réglementaire, la cour d'appel, quel que soit le mérite des dispositions critiquées, a violé le texte susvisé ;

Et sur le cinquième moyen du même pourvoi :

Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que dans ses motifs, l'arrêt attaqué retient que l'article 12-3 4 du règlement intérieur du barreau de Bordeaux, qui est contraire à la liberté d'exercice de la profession d'avocat, doit être annulé ; qu'en confirmant, dès lors dans son dispositif les décisions du conseil de l'Ordre en ce qu'elles ont rejeté les recours formés contre la délibération du 4 octobre 1999 ayant intégré en l'article 12-3 4 intitulé "périmètre" les dispositions de l'article 16-4 du RIH et en déclarant valable cette délibération adoptant l'article 12-3 4, sans en donner de motifs, la cour d'appel n'a satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté le recours formé contre les articles 12-3 4 et 12-3 5, alinéas 2 et 3, du règlement intérieur du barreau de Bordeaux, l'arrêt rendu le 15 janvier 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;

Vu l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi en ce qui concerne l'article 12-3 5 dudit règlement intérieur ;

Et statuant de nouveau,

Annule l'article 12-3 5, alinéas 2 et 3, du règlement intérieur précité ;

Renvoie, pour le surplus, les parties devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 01-02915
Date de la décision : 23/09/2003
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

(Sur le 3e moyen) AVOCAT - Barreau - Règlement intérieur - Modification par décision du Conseil national des barreaux - Disposition selon laquelle un avocat membre d'un réseau ne peut prêter son concours à son client si un autre membre du réseau contrCBle ou certifie les comptes dudit client - Demande d'annulation.


Références :

Loi 71-1130 du 31 décembre 1971 art. 17-1°, 5° et 10°, 19 alinéa 1er

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux (1re chambre civile), 15 janvier 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 23 sep. 2003, pourvoi n°01-02915


Composition du Tribunal
Président : Président : M. LEMONTEY

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:01.02915
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