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23/09/2003 | FRANCE | N°00-18972

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 23 septembre 2003, 00-18972


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que, par délibération du 13 octobre 1999, le Conseil de l'Ordre des avocats au barreau de Grasse a inséré, dans son règlement intérieur, un article 12-2 réglant certaines modalités d'enchères dans les ventes à la barre du tribunal, relatives, notamment, aux conflits en matière d'enchères et à la consignation obligatoire pour enchérir ; que le conseil de l'ordre a, par délibération du 15 mars 2000, rejeté la demande d'annulation de ces dispositions formée p

ar la société civile professionnelle Hannequin-Kieffer-Monasse (la SCP), avoca...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que, par délibération du 13 octobre 1999, le Conseil de l'Ordre des avocats au barreau de Grasse a inséré, dans son règlement intérieur, un article 12-2 réglant certaines modalités d'enchères dans les ventes à la barre du tribunal, relatives, notamment, aux conflits en matière d'enchères et à la consignation obligatoire pour enchérir ; que le conseil de l'ordre a, par délibération du 15 mars 2000, rejeté la demande d'annulation de ces dispositions formée par la société civile professionnelle Hannequin-Kieffer-Monasse (la SCP), avocat à ce barreau ; que l'arrêt attaqué a rejeté le recours formé contre cette délibération ;

Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches, tel qu'énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe :

Attendu que l'arrêt retient que les dispositions litigieuses résultant du paragraphe 2 de l'article 12-2 du règlement intérieur, aux termes duquel l'avocat ne peut porter l'enchère pour un même bien pour le compte de plusieurs mandants, étaient complétées par la disposition selon laquelle l'avocat ne peut notamment porter d'enchères pour des personnes qui sont en conflit d'intérêts ; qu'il relève ensuite qu'en restreignant le nombre de mandats au cas où il existe par nature un conflit d'intérêts, le conseil de l'ordre n'a pas appliqué de manière erronée un principe général contenu dans l'article 155 du décret du 27 novembre 1991 et qu'il n'a pas commis d'erreur sur l'exactitude matérielle des faits ou de leur qualification juridique, les droits des enchérisseurs étant eux-mêmes concurrents, tandis que le cas de l'avocat poursuivant demeure réservé par le règlement intérieur compte tenu de la rédaction de l'article 12-2 pris dans son ensemble, dès lors que celui-ci ne peut être assimilé au "porteur d'enchères" après ouverture de celle-ci et n'a précisément le bénéfice de l'adjudication qu'en l'absence d'enchère ; que la cour d'appel, en ayant déduit à bon droit que les dispositions critiquées ne recelaient pas d'abus de pouvoir ni d'illégalité, le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 34 et 37 de la Constitution, ensemble les articles 17 et 19 de la loi du 31 décembre 1971 ;

Attendu que pour rejeter le recours, en ce qu'il portait sur le paragraphe 5 de l'article 12-2 du règlement intérieur disposant qu'à moins qu'il soit chargé d'enchérir pour une personne publique ou un organisme public, l'avocat doit se faire remettre préalablement, par chèque de banque ou caution bancaire spéciale, une consignation tenant compte des frais préalables, des droits de mutation, des frais de publicité foncière et des émoluments, l'arrêt retient que cette disposition a été prévue pour protéger les avocats contre les conséquences d'une défaillance du mandant et que les articles 702 à 711 du Code de procédure civile n'ayant pas réglementé la matière, sauf à interdire l'enchérissement pour des personnes notoirement insolvables, la mesure contestée ne contient aucune illégalité pour violation de la loi, ni d'erreur quant à ses motifs, puisque la liberté des enchères ne se trouve pas entravée par une telle modalité limitée à des frais que l'enchérisseur doit par définition être en mesure de payer, outre le prix de vente, et qu'il n'existe pas non plus de détournement de pouvoir, puisque l'intérêt général suppose la solvabilité des personnes publiques et justifie d'autre part la garantie de solvabilité exigée de tout autre enchérisseur ;

Attendu cependant qu'en statuant ainsi, quel que soit le mérite de la disposition critiquée, alors qu'il appartient aux pouvoirs législatif ou réglementaire de décider de la nature des garanties dont l'enchérisseur doit justifier pour participer à l'adjudication en vue de garantir les intérêts des parties, la cour d'appel, qui a conféré à l'ordre professionnel une compétence qu'il n'avait pas, a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'il y a lieu, conformément à l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du second moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en sa disposition rejetant la demande d'annulation de l'article 12-2, paragraphe 5, du règlement intérieur du barreau d'Aix-en-Provence, l'arrêt rendu le 23 juin 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Et statuant de nouveau :

ANNULE l'article 12-2, paragraphe 5, du règlement intérieur précité ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes des parties ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 00-18972
Date de la décision : 23/09/2003
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

(Sur le 2e moyen) AVOCAT - Barreau - Règlement intérieur - Modification par le Conseil de l'Ordre - Modifications concernant les garanties dont l'enchérisseur doit justifier pour participer à une adjudication - Question relevant de la compétence des pouvoirs législatif ou réglementaire - Annulation.


Références :

Constitution du 04 octobre 1958 art. 34 et 37
Loi 71-1130 du 31 décembre 1971 art. 17 et 19

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence (audience solennelle), 23 juin 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 23 sep. 2003, pourvoi n°00-18972


Composition du Tribunal
Président : Président : M. LEMONTEY

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:00.18972
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