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10/07/2003 | FRANCE | N°01-16628

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 10 juillet 2003, 01-16628


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 septembre 2001), qu'en suite d'une prise de participation croisée, la Caisse fédérale de Crédit mutuel du Nord de la France (le CMNF) est devenue associé commanditaire de la Banque Delubac (la banque), elle-même actionnaire de la société La Pérennité (La Pérennité) à hauteur de 24 %, société dont le CMNF restait associé majoritaire ; que des difficultés étant survenues entre le CMNF et la banque, les parties ont soumis l

eurs différends à l'arbitrage, les arbitres ayant les pouvoirs les plus étendus ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 septembre 2001), qu'en suite d'une prise de participation croisée, la Caisse fédérale de Crédit mutuel du Nord de la France (le CMNF) est devenue associé commanditaire de la Banque Delubac (la banque), elle-même actionnaire de la société La Pérennité (La Pérennité) à hauteur de 24 %, société dont le CMNF restait associé majoritaire ; que des difficultés étant survenues entre le CMNF et la banque, les parties ont soumis leurs différends à l'arbitrage, les arbitres ayant les pouvoirs les plus étendus pour trancher comme amiables compositeurs les contestations pouvant s'élever relativement aux affaires sociales ; qu'après l'échec de la mission de conciliation d'abord confiée aux arbitres, la procédure arbitrale est entrée dans une phase contentieuse, à l'issue de laquelle les arbitres ont condamné le CMNF à payer une certaine somme à la banque, moyennant le transfert par elle, au CMNF ou à toute personne désignée par lui, de la totalité des actions qu'elle détenait dans le capital de La Pérennité ; que le CMNF a formé un recours en annulation de cette sentence arbitrale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le CMNF fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté le recours en annulation, alors, selon le moyen, "que le silence d'une partie, qui s'apprécie in concreto, ne vaut pas, en toute occasion, renonciation à l'exercice d'un droit de recours ; qu'une partie n'a intérêt à se prévaloir d'une irrégularité de procédure que si cette contestation est utile ; qu'elle ne peut, en conséquence, s'en prévaloir qu'après en avoir eu connaissance, peu important que le risque d'irrégularité existe dès l'origine ; qu'en ne recherchant pas si le CMNF était en mesure de se prévaloir, au cours de la procédure arbitrale, de l'impartialité des arbitres, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1484.2 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que les conclusions du CMNF avaient invoqué une atteinte à l'impartialité objective du tribunal arbitral du fait de la mission de conciliation qu'il avait préalablement exercée, mais non la transgression par lui d'une obligation de confidentialité à l'égard des informations recueillies dans la phase de conciliation, dont le CMNF n'aurait pas été en mesure de se prévaloir au cours de la procédure arbitrale ;

D'où il suit que le moyen est nouveau et que, mélangé de fait et de droit, il est irrecevable ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que le CMNF fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté le recours en annulation, alors, selon le moyen, qu'aux termes de la clause compromissoire, les arbitres étaient compétents pour trancher uniquement "toutes contestations qui peuvent s'élever au cours de l'existence de la société ou après sa dissolution pendant le cours des opérations de liquidation, soit entre les associés et la société, soit entre les associés eux-mêmes, relativement aux affaires sociales" ; qu'en considérant que le tribunal arbitral était compétent pour statuer "sur les conséquences dommageables ou non de son (de CMNF) action sur la valorisation d'un des principaux actifs de la banque" ou encore "sur la cession des actions de La Pérennité dans SEFI et l'apport partiel d'actif de La Pérennité à ACMN Vie" et sur les préjudices subis par la Banque Delubac "en sa qualité d'associé de La Pérennité", la cour d'appel a violé ensemble les articles 1134 du Code civil et 1484.1 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que le tribunal arbitral avait justement constaté que la participation croisée entre les parties avait pour conséquence que les intérêts financiers de la banque, dont l'un des principaux actifs était constitué par sa participation dans La Pérennité, étaient concernés par les agissements du CMNF à l'égard de cette société, l'arrêt retient exactement que les arbitres, qui avaient délibéré sur toutes les questions dont l'examen était nécessaire, s'étaient conformés à la convention d'arbitrage en ne statuant que sur les droits de la banque à l'exclusion de ceux de La Pérennité ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que le CMNF fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté le recours en annulation, alors, selon le moyen :

1 / qu'il n'était pas discuté que le compromis d'arbitrage donnait mission aux arbitres de dire si le comportement du CMNF avait été fautif et, dans l'affirmative, de fixer les dommages-intérêts dus par le CMNF à la Banque Delubac en réparation de l'éventuel préjudice en résultant ; qu'en considérant cependant que le tribunal arbitral avait respecté sa mission en ordonnant à la Banque Delubac la cession de sa participation et en mettant à la charge du CMNF l'obligation d'acquérir les titres, la cour d'appel a violé l'article 1484.3 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / qu'en retenant d'office que la Banque Delubac avait, dans son second mémoire devant le tribunal arbitral, accepté de "renoncer au versement de dommages-intérêts, dans l'hypothèse où le prix offert aux termes de l'accord de Marrakech lui était versé sur la base de 201 600 000 francs" et de "livrer les titres qu'elle détient dans le capital de La Pérennité à toutes entités que le CMNF lui désignerait" sans inviter les parties à se prononcer sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / qu'en retenant la fixation du prix des actions à une somme de 129 000 000 francs à partir d'éléments non contradictoirement discutés, la cour d'appel a violé l'article 1484.4 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir mentionné que le tribunal arbitral avait pour mission de statuer sur le préjudice subi par la banque et de prononcer, le cas échéant, toutes condamnations, l'arrêt retient à bon droit qu'en évaluant le préjudice et en décidant qu'il serait inéquitable de laisser la banque propriétaire de ses parts dans le capital de La Pérennité, les arbitres avaient exercé leur pouvoir d'amiable compositeur et recherché, en équité, la solution la plus adéquate ;

Et attendu que, s'agissant de moyens analysés dans la sentence arbitrale et soumis à la discussion des parties, c'est sans méconnaître le principe de la contradiction que la cour d'appel a énoncé que la banque avait offert de livrer les titres qu'elle détenait dans le capital de La Pérennité et que les arbitres avaient évalué le préjudice sur la base de la valeur globale attribuée à cette société ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Caisse fédérale de Crédit mutuel du Nord de la France aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse fédérale de Crédit mutuel du Nord de la France ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 01-16628
Date de la décision : 10/07/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ARBITRAGE - Arbitre - Amiable compositeur - Pouvoirs - Etendue.

ARBITRAGE - Arbitre - Amiable compositeur - Sentence - Conformité à l'équité - Nécessité

C'est à bon droit qu'une cour d'appel retient, après avoir mentionné que le tribunal arbitral avait pour mission de statuer sur le préjudice subi par une banque et de prononcer, le cas échéant, toutes condamnations, qu'en évaluant le préjudice et en décidant qu'il serait inéquitable de laisser la banque propriétaire de ses parts dans le capital d'une société, les arbitres avaient exercé leur pouvoir d'amiable compositeur et recherché, en équité, la solution la plus adéquate.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 septembre 2001

A RAPPROCHER : Chambre civile 2, 1990-02-28, Bulletin 1990, II, n° 44, p. 24 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 10 jui. 2003, pourvoi n°01-16628, Bull. civ. 2003 II N° 233 p. 193
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2003 II N° 233 p. 193

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Ancel.
Avocat général : Premier avocat général :M. Benmakhlouf.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Etienne.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Defrenois et Levis, Me Choucroy.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:01.16628
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