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08/07/2003 | FRANCE | N°00-17846

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 08 juillet 2003, 00-17846


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches :

Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 25 février 2000), que la société suisse Weitnauer Trading Company Ltd (société Weitnauer) a acheté "Cip Moscou" une cargaison de biscuits à la société Lu, devenue Berlin Lu Biscuits (société Lu) qu'elle destinait à un client de Sibérie ; que la marchandise ayant été refusée par le client en raison de son caractère impropre à la consommation, la s

ociété Weitnauer a assigné la société Lu en indemnisation de son préjudice ; que la cour...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches :

Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 25 février 2000), que la société suisse Weitnauer Trading Company Ltd (société Weitnauer) a acheté "Cip Moscou" une cargaison de biscuits à la société Lu, devenue Berlin Lu Biscuits (société Lu) qu'elle destinait à un client de Sibérie ; que la marchandise ayant été refusée par le client en raison de son caractère impropre à la consommation, la société Weitnauer a assigné la société Lu en indemnisation de son préjudice ; que la cour d'appel a rejeté la demande ;

Attendu que la société Weitnauer reproche à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :

1 ) - que doit donner lieu à indemnisation de la part de l'auteur de la faute contractuelle le préjudice qui est une suite immédiate et directe de l'inexécution de la convention ; que l'obligation de résultat emporte présomption de causalité entre la prestation fournie et le dommage invoqué ; qu'en estimant, pour la débouter de sa demande d'indemnisation, que la Société Weitnauer ne prouvait pas que la faute contractuelle de la société Lu avait provoqué le préjudice constitué par la perte des marchandises endommagées du fait des conditions climatiques, cependant que, s'agissant de la violation d'une obligation contractuelle de résultat consistant en l'utilisation d'un conteneur thermique, c'était à la société Lu qu'il appartenait de démontrer que le dommage était dû à un cas de force majeure ou à une cause étrangère, la cour d'appel a violé les articles 1147 et 1315 du Code civil ;

2 ) - qu' en estimant que n'était pas établi le lien de causalité entre la faute contractuelle commise par la société Lu, qui n'avait pas utilisé de conteneur thermique pour la livraison des marchandises, et la perte de ces marchandises du fait de l'humidité et la rouille, cependant qu'elle a relevé que les marchandises étaient à destination de Moscou et que la livraison s'était effectuée en plein hiver, ce dont il résultait nécessairement que l'absence de conteneur thermique avait directement causé le dommage consistant en la perte des marchandises, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1151 du Code civil ;

3 ) - que le rôle causal est établi non seulement lorsque le manquement a provoqué le dommage, mais encore lorsqu'il l'a aggravé ;

qu'en estimant que n'était pas établi le lien de causalité entre la faute contractuelle commise par la société Lu, qui n'a pas utilisé de conteneur thermique pour la livraison des marchandises, et la perte de ces marchandises par l'humidité et la rouille, aux motifs que, pour des raisons non imputables à la société Lu, les marchandises étaient arrivées à destination à Moscou avec plus de quatre mois de retard après un stationnement prolongé dans un port glacé et que le conteneur avait été ouvert frauduleusement lors de ce stationnement, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si la faute contractuelle commise par la société Lu n'avait pas contribué à aggraver le dommage constitué par la perte des marchandises, a dans tous les cas privé sa décision de base légale au regard de l'article 1151 du Code civil ;

4 ) - qu'aux termes de la commande qui lui a été passée le 30 novembre 1993, la société Lu avait l'obligation de contracter une assurance pour garantir les dommages susceptibles d'être causés à la marchandise ; que dans ses conclusions d'appel, la société Weitnauer rappelait que la société Lu avait engagé sa responsabilité contractuelle en s'abstenant de contracter une assurance ; qu'en constatant que la société Lu ne justifiait pas avoir contracté une police d'assurance couvrant le transport litigieux, sans en tirer aucune conséquence sur le plan de la responsabilité contractuelle de cette société, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;

5 ) - qu'en estimant que la société Weitnauer ne pouvait reprocher à la Société Lu de n'avoir pas déclaré le sinistre à sa compagnie d'assurances, au motif que la société Weitnauer avait elle-même mis plusieurs années pour justifier de la réalité du sinistre, tout en constatant cependant que dès le 16 février 1994, soit un mois après la date prévue pour la livraison, cette société avait transmis un fax à la société Lu émettant toute réserve en ce qui concernait la qualité des produits concernés, ce dont il résultait nécessairement que le vendeur, dont il est constaté qu'il a laissé ce fax sans réponse, avait dès le 16 février 1994 les informations suffisantes pour prendre toute initiative utile pour sauvegarder ses droits et ceux de l'acquéreur auprès de son assureur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations et a violé l'article 1147 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant retenu, d'un côté, que les biscuits étaient arrivés avec un retard imputable à la société Weitnauer de plus de quatre mois après un stationnement prolongé dans un port glacé et que l'humidité et la rouille constatées à l'intérieur du conteneur avaient été provoquées ou accentuées par une ouverture frauduleuse de sa paroi lors du stationnement à Riga ou au cours du transport ferroviaire, et, d'un autre côté, que les dates de péremption des denrées étaient imputables aux retards du transport et de la mesure d'expertise, la cour d'appel, a pu en déduire que la faute contractuelle de la société Lu de n'avoir pas conditionné la marchandise dans un conteneur thermique n'était pas à l'origine du préjudice et statuer comme elle a fait ; qu'elle a ainsi, abstraction faite du motif, justement critiqué par la première branche mais inopérant, légalement justifié sa décision ;

Attendu, en second lieu, qu'ayant relevé que l'article 11 des conditions générales de la garantie "tous risques" contractée par la société Lu auprès de la société de courtage Sgca stipulait que la durée de l'assurance ne pouvait excéder un délai de soixante jours calculé depuis la fin du déchargement des facultés assurées du dernier navire de mer et que la société Weitnauer ne pouvait pas imputer à la faute de son vendeur son retard de plusieurs années à justifier de la réalité du sinistre, et la forclusion inévitable qui lui est opposée, la cour d'appel, a, en écartant ainsi les conclusions mentionnées à la quatrième branche et, sans encourir le grief de la cinquième branche, légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 1153, alinéa 3, du Code civil ;

Attendu que la partie qui doit restituer une somme qu'elle détenait en vertu d'une décision de justice exécutoire n'en doit les intérêts au taux légal qu'à compter de la notification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution ;

Attendu que pour condamner la société Weitnauer à restituer à la société Lu les sommes qu'elle lui a versées en exécution du jugement infirmé avec intérêt au taux légal à compter du 8 octobre 1999, l'arrêt a accueilli la demande de la société Weitnauer qui sollicitait que les intérêts courrent à compter de ses conclusions d'appel valant mise en demeure ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a assorti d'intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 1999 la condamnation de la société Weitnauer Trading company Ltd à restituer à la société Lu les sommes qu'elle a versées en exécution du jugement infirmé, l'arrêt rendu le 25 février 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne la société Lu aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la société Weitnauer services et de la société Lu ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 00-17846
Date de la décision : 08/07/2003
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (5e chambre civile C), 25 février 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 08 jui. 2003, pourvoi n°00-17846


Composition du Tribunal
Président : Président : M. TRICOT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:00.17846
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